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[Fiction Fantasy moderne] G.I.S


Daemon
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  Voilà voilà, donc c'est la dernière histoire qui m'est passée par la tête... Elle trotte entre mes neurones depuis un bon bout de temps, mais comme la maladie des vacances s'est emparée de moi, je n'ai encore écrit qu'un chapitre. J'espère pouvoir vite corriger ça^^

  Par "Fantasy Moderne", j'entend des aventures fantastico magique dans notre monde moderne. D'ailleurs ça se passe dans mon bon vieux Sud de la France, dans ma ville même^^. L'inspiration est toujours à portée, il suffit de la saisir. :D

  Pour vous rassurer: Non, je ne suis pas le personnage principal, non je ne mettrais pas en scène un héros au super pouvoirs qui sauve l'humanité... Nan, le héros, il sauve l'humanité, mais sans pouvoirs, oui monsieur  ;D

 Bref... Tout ça pour dire que c'est toujours en chantier et que j'ignore encore comment ça va tourner... Donc si jamais ça part en sucette, prévenez moi, que je me foutte une ou deux baffe.

 Bon, je n'en dit pas plus, et je vous envoie direct le préambule suivit du premier chapitre. Et pour les initiales, je vous laisse le loisir d'imaginer à quoi elles correspondent... Bien que personnellement, je ne trouve pas ça trop dur^^ Allez, enjoy!

  Rectification: et zut, trop de caractères^^ Je ne mets donc que le préambule pour l'instant  :(

  Edit 2: et hop, première partie du chapitre1. On n'entre pas tout de suite dans le vif du sujet, mais ça viendra.______________________________________________________________________________________________________________

 

G.I.S

 

Préambule :

 

 

     De tout temps, l’Homme a cherché des réponses. Non content de se satisfaire des contes, des traditions et de la Religion, il se tourne aujourd’hui vers la science et tente de percer les mystères de l’espace.

     Sommes nous seuls dans l’Univers ?

     Cette question est sans doute celle que se pose nombre d’astrologues comme de gens du commun.

     Mais plutôt que de se demander si la Terre et les Hommes ont un équivalent dans l’Univers infini, ces derniers feraient mieux de se pencher sur leur bonne vieille patrie.

     Non, nous ne sommes pas seuls. Mais la réalité pourrait être bien plus proche que ce que nous imaginons. Trop proche au goût de certains. Il existe d’autres êtres, sur Terre, qui défient l’imagination et ont tout de cruels petits hommes verts.

     Mais ne ressortez pas vos grimoires ni vos vieux livres de contes antiques. Le peuple a déformé au cours des siècles le peu de vérité qu’il possédait.

     Non, laissez faire les experts. Ceux qui, depuis des temps immémoriaux, luttent dans le plus grand secret et œuvrent au bien être de l’espèce humaine en la protégeant de créatures qu’elle n’oserait même pas imaginer.

     Nous ne sommes pas seul. Même pas sur Terre. Mais quand vous vous en rendrez compte, il sera probablement trop tard.

     Il est toujours trop tard, la première fois.

 

 

 

Chapitre premier

 

 

 

 

      - Tapette !

      Tristan Gruget s’éloigna à grands pas, roulant des mécaniques. Il venait encore de mettre la pâtée à l’autre lopette, l’intello, le rat de bibliothèque ; son souffre-douleur attitré. La petite foule se dispersa rapidement, rejoignant rapidement l’entrée de la Faculté de Droit.

      - Val ! Putain, Val ! Ca va ?

      Valentin Roman accepta volontiers l’aide de son amie, et se releva en se massant la cuisse. La dernière béquille était passée plus fort que prévu.

      - Aïe… Ouais, ça va, Gwen. Pas la peine de jurer comme un charretier. Je vais bien.

      - Un quoi ?

      La jeune femme brune secoua la tête et reprit, son petit nez froncé à l’instar de ses sourcils :

      - Bref. Je persiste à dire que je devrais aller dire deux mots à ce Gruget. Puisque toi, t’es résigné à rester martyrisé !

      Val soupira.

      - Gwen. Je t’ai déjà dit que c’était pas la peine. Ce type est tellement cave qu’il ne rechignerait pas à te taper dessus pour te faire taire.

      - Et alors ? Tu crois que je sais pas me défendre ?

      - Putain, jura le jeune homme en secouant sa tête à son tour. C’est pas ça. En quoi j’y gagnerais ? Hein ? Je me suis fais sauver par une nana ? Sans vouloir être macho, il risque de trouver ça franchement marrant. Tellement que son « tapette » quotidien risque de devenir encore plus vrai dans son cerveau atrophié. Je préfère encore me faire frapper, merci.

      - Si je te connaissais pas aussi bien, Val, j’te foutrais une raclée moi-même. Combien de fois… ?

      - Combien de fois avons-nous déjà eu cette discussion, Gwen ? la coupa Valentin. Tu connais mon avis, je connais le tien. Est-ce que ça change quelque chose ? Tant que je n’aurais pas ce qu’il faut pour tenir tête à l’autre connard, je préfère m’en tenir à ma version : j’attends. Je finirais bien par être débarrassé de lui. Après tout, je ne compter pas m’éterniser dans cette Fac, ni dans cette ville. Et j’espère toujours que la patronne se rende compte que Gruget n’est qu’un abruti qui ne mérite probablement pas son bac, ni même le peu de matière grise que ses parents lui ont généreusement offert.

      Valentin se pencha et récupéra sa sacoche, avant de marcher en direction de l’établissement scolaire. Gwen resta à ses côtés.

      - Ca fait quand même deux ans que ça dure, Val !

      - Et alors ? Il cogne comme un manche.

      - Merde, Valentin. T’es vraiment…

      Ils étaient arrivés à l’entrée de la Faculté de Droit. Val s’arrêta un instant et adressa un regard blasé à son amie.

      - J’ai pas envie d’en parler. Et je n’ai pas envie non plus d’arriver en retard. Alors bonne journée, et à toute à l’heure.

      - C’est toi le chef, Val, répondit Gwen en tournant les talons, se dirigeant vers l’amphithéâtre numéro un.

      Val la salua d’un geste de la main et grimpa les escaliers qui lui faisaient face pour rejoindre sa salle de cours. Un peu tardivement, il répondit :

      - Même si je n’ai jamais vraiment compris pourquoi… 

 

 

      Valentin Roman nota les derniers mots du professeur de Droit sur son carnet et laissa son regard vagabonder par la fenêtre. Et dire qu’il allait avoir vingt ans dans quelques semaines. Le temps passait si vite, pourtant il se sentait toujours aussi faible que quand il était encore au lycée. Plus petit que la moyenne avec son mètre presque soixante six, et léger du haut de ses cinquante cinq kilos, il n’avait jamais brillé dans les jeux de force.  Moins fort, moins endurant que la plupart des garçons de son âge, il s’était vite tourné vers les livres, où les héros étaient souvent grands et forts. Ca lui permettait de s’échapper un peu de son quotidien.

      Forcément, il était doué à l’école. Un garçon qui n’a d’autres activités physiques que la marche à pied et les mouvements qu’il exécute après ses films de kung-fu et autre karaté n’a pas beaucoup d’autre choix que de briller dans ses études. Malgré le fait qu’il ne portait plus de lunettes depuis sa première année de lycée, et que ses notes n’étaient plus aussi brillantes qu’avant, on avait continué à lui coller la même étiquette. Et aujourd’hui, en Septembre 2009, on la lui collait toujours, à sa troisième année de Fac. Et Tristan avait tout fait empirer.

      - Monsieur Roman, le cours est terminé.

      La voix de son professeur fit sortir le jeune homme de ses pensées. En effet, les élèves de sa classe de troisième année avaient déjà fichu le camp, trop heureux d’en finir avec les cours. Val consulta sa montre. Il était cinq heures. Déjà.

      - Oui. Désolé monsieur. J’y vais.

      - A demain.

      Valentin hocha la tête et sortit de l’amphithéâtre, sa sacoche sous le bras. D’un pas léger, il se dirigea vers le portail d’entrée et prit le chemin de sa maison. Il était parti pour une demi heure de marche à travers Draguignan, petite ville de 38000 habitants du centre Var, au dessus de la Côte d’Azur.  Gwen terminait plus tôt le mercredi, aussi elle ne pouvait pas le ramener.

      Il longea le Parc Haussmann et bifurqua à gauche au rond point de la Jarre, avant d’arriver aux abords du grand bâtiment de la Poste. Là, alors qu’il traversait le passage clouté, un klaxon le fit sursauter.

      - Hé, Valentin ! Tu montes ?

      Val tourna la tête vers la voiture qu’il avait fait s’arrêter au passage piéton. C’était Cédric Altier, son voisin. Ils avaient le même âge, allaient à la même Fac mais n’étaient jamais tombés dans la même classe, et ce depuis le primaire. Physiquement, ils étaient complètement contraire : aussi grand et élancé que Val était petit, Cédric s’habillait à la dernière mode tandis que son voisin faisait des efforts pour bien présenter. Val portait un pantalon marron et une chemise noire sans manche, ainsi que des chaussures de ville de bonne facture en cuir noir, et avait les cheveux courts ; Cédric arborait un jean serré, un T-shirt rayé multicolore, une paire de Converse et ses cheveux paille étaient dressé en crête sur son crâne, à grand renfort de gel.

      Les deux garçons n’étaient pas vraiment amis, juste de vieilles connaissances, mais cela suffit à Valentin pour ouvrir la portière côté passager et s’installer sur le siège en cuir de la Golf noire de Cédric.

      - Salut, mec, fit Cédric en lui tendant la main, son accent provençal résonnant dans l’habitacle.

      Valentin la serra de bon cœur et boucla sa ceinture ; Cédric profita de sa priorité et tourna à droite.

      - Alors, comment se passe cette rentrée ? demanda le voisin de Valentin en rectifiant la position de ses lunettes de marque sur l’arête de son nez.

      - Bah, comme d’habitude. Je suis encore parti pour une année de boulot, sans avoir pour autant la moindre idée de ce qui m’attend après.

      Cédric passa la troisième et doubla un cycliste, puis tourna à gauche en grillant allègrement la priorité.

      - Ah ? fit il en levant son majeur à l’intention de l’automobiliste qui klaxonnait à son encontre. Toujours indécis ?

      - Ben ouais… Déjà que je suis allé à cette Fac par défaut…

      - Ouais. Tu finiras bien par avoir le déclic.

      - Sûrement.

      Cinq minutes de conversation du même acabit plus tard, Cédric s’engea dans l’étroite Impasse des Rosiers et s’arrêta devant le portail de sa maison. Au yeux de Val, « Manoir » était un terme plus judicieux, si l’on considérait les trois étages de pierre blanche, le toit en ardoise rouille, la piscine qu’il savait cachée derrière le mur d’enceinte est et la cour presque aussi grande que le jardin.

      - Bon. Merci pour la ballade, Cédric. Je te revaudrais ça.

      - T’inquiètes. Et… t’oublies pas que je te dois toujours un coup à boire ?

      - T’inquiètes, sourit faiblement Val. J’y penserais. J’ai toujours eu envie de savoir à quoi ressemblait l’intérieur de ton… château.

      Sur ces mots, il sortit, claqua la portière et adressa un dernier salut à son voisin, avant de reprendre son chemin.

      Le Manoir des Altier était bâti au milieu d’un petit champ, et dix mètres de végétation séparait le mur d’enceinte de la bâtisse de la haie délimitant la propriété de la famille Roman. La maison de Val n’était certes pas un manoir, mais il ne trouvait aucune raison de se sentir jaloux : il avait le rez-de-chaussée pour lui tout seul, ses parents et sa sœur logeant au premier. De plus, les Roman bénéficiaient d’un jardin de bonne taille dans lequel trônaient une piscine gonflable et un hangar.

      Val passa le portail et se dirigea vers le jardin. Comme il s’en doutait, sa mère s’occupait des rosiers, tandis que son père et sa sœur se trempaient. Il leur fit un coucou et se dirigea vers son antre.

      Grimpant prestement les trois marches qui le séparaient de la véranda, il sortit sa clé et l’introduisit dans la serrure. Deux tours vers la gauche, un coup de poignet et trois pas plus tard, il entra et referma la porte vitrée derrière lui.

      Val jeta ses clés sur la commode à sa gauche, sa sacoche sur le divan qui faisait face à la télévision, et alla ouvrir le frigo dans le coin gauche, juste à côté de la porte de sa chambre. S’apprêtant à ouvrir une canette d’Orangina, il suspendit son geste et passa dans sa chambre, puis dans la salle de bain.

      Par la fenêtre de celle-ci, il apercevait le mur et le toit du Manoir. Il repensa à la proposition de Cédric. Un coup à boire ? Pourquoi pas. C’était bien la moindre des choses.

      Val retourna dans le salon, remit la canette à sa place et sortit son téléphone portable. Avait il au moins le numéro de Cédric ? Même pas. Et merde. Il ne lui restait plus qu’à aller le voir en personne.

      C’était fort, quand même, quand il y repensait tout en repassant le portail. Il connaissait Cédric depuis tout gosse, mais n’avait jamais pris le temps de mieux le connaître. Ils vivaient à dix mètres l’un de l’autre, mais n’avait jamais rien échangé de plus que des « saluts ! » et des gestes de la main. Il y avait eu une exception, mais Val la classait à part.

      Il appuya donc deux courtes fois à la sonnette des Altier, et patienta. Les rideaux d’une fenêtre du deuxième se levèrent un court instant, puis retombèrent. Un battement de cils plus tard, une voix grave demandait :

      - Oui, c’est à quel… ?

      - Laisse ! s’écria une voix dans le fond. C’est pour moi !

      Cédric ouvrit la porte du Manoir et traversa la cour en trottinant. De loin, Val pouvait voir le sourire qui lui traversait le visage.

      - Ouais ?

      - On va le boire, ce coup ?

 

 

 

 

 

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Suite et fin du premier chapitre.

 

 

*****

 

 

 

 

 

      Contrairement à ce que pensait Valentin, Cédric ne l’invita pas dans sa maison, mais préféra l’emmener dans un des nombreux cafés de la ville, sur la boulevard Clemenceau, et n’y allèrent pas de suite, mais aux alentours de neuf heures et demie. Cédric avait prétexté un motif que Val avait à peine relevé ; qu’ils sortent était déjà suffisant.

      Cédric gara donc sa Golf sur l’Allée Azemar, et ils s’installèrent au premier café venu. 

      - A nous, sourit le jeune homme en levant son demi.

      - A nous… reprit Val en faisant s’entrechoquer leurs chopes. Faudra quand même que tu me dises pourquoi tu tenais tant à ça.

      - A ton avis ? Je vais pas te rappeler ce qui s’est passé l’année dernière… Et puis même, on est voisin depuis si longtemps et on a jamais pris le temps de faire connaissance. Je trouvais ça con.

      - Ouais. C’est exactement ce que je pensais. Mais j’ai jamais été doué dans les contacts humains… Regarde, je cherche déjà des excuses !

      - Hé, pas la peine de t’excuser. On est comme on est.

      - Ouais, pour le meilleur et le pire…

      - C’est ça, acquiesça Cédric en buvant une rasade de bière. Et sinon, les filles ? Je crois pas t’avoir vu de copine…

      Val poussa un grognement et marqua une pose, portant sa choppe à ses lèvres. LE sujet qui fâche.

      - Ben… Ca fait un certain temps que je suis solo…

      - Comme quoi ? Un, deux ans ?

      Val éclata de rire, faisant se retourner brièvement le reste des consommateurs, puis se reprit.

      - Plutôt dix neuf, vingt, précisa-t-il à l’attention d’un Cédric interloqué.

      Le voisin de Val haussa les sourcils, une expression de surprise peinte sur son visage.

      - Attends, tu veux dire que…

      - Ouais, bon, coupa Val. C’est pas mon sujet préféré.

      - Mais…

      - Quand je te disais que j’étais pas doué dans les contacts humains… 

      Cédric porta la chope à ses lèvres et but de longues gorgées, comme pour faire passer cette information qu’il semblait avoir du mal à digérer.

      - Hé ben ! Y a vraiment des mystères dans la nature. Et je sais de quoi je parle, crois moi.

      Val plissa les yeux.

       - Hein ? Tu veux dire quoi, là ?

       - Bah, ça me parait évident. Enfin, regarde toi : t’es pas Brad Pitt, c’est sûr, mais t’es quand même loin d’être moche. Et pour ce que j’en sais, t’es pas con non plus. 

      - Les contacts humains…

      - Ouais, ouais, c’est ce qu’on dit. Je savais que ça existait, des bêtes comme toi, mais j’en avais jamais vu avant.

      Val était vexé, comme à chaque fois qu’un de ses amis abordait le sujet, mais il ne parvenait pas à en vouloir  Cédric. Comment blâmer celui qui dit la vérité ?

      Il tenta une échappatoire.

      - J’imagine que de ton côté, ça marche…

      - Bof, j’ai largué la dernière avant les vacances. Elle me bouffait la vie, toujours sur mon dos. J’avais pas un moment à moi, c’était toujours nous, nous, nous. Saoulant. Faudra que je fasse gaffe, la prochaine fois. Mais j’en ai repéré une pas mal, y a pas longtemps…

      De lui-même, il changea brusquement de sujet. 

      - Dis, fit il en se penchant comme un conspirateur, tu pense pas que tout le monde devrait avoir droit à un minimum d’intimité ? C’est vrai, on a tous un jardin secret, des trucs qu’on n’avouerait même pas sous la torture. Je pense qu’on devrait tous respecter ce droit.

      - Absolument d ‘accord. Quelqu’un qui veut tout savoir ne respecte pas l’autre. Il faut laisser du temps… T’as bien fait de la jeter.

      Cédric hocha la tête.

      - Ouais. Elle m’a pas laissé assez de temps. J’imagine même pas… Enfin bon, faudra voir à te trouver une copine, mon grand.

      Et merde. Le bougre avait de la suite dans les idées. Val envisagea un instant de trouver un prétexte pour s’en aller, fuir cette situation qui le mettait mal à l’aise. C’est ce qu’il faisait toujours en général. Reculer, mais pas pour mieux sauter, non. Reculer pour reculer, simplement. Ca faisait partie de son caractère, ce foutu caractère de merde qu’il haïssait tant.

      Cédric, devinant probablement sa gêne, lâcha un sourire et reprit :

      - Enfin… On est comme on est. Fais moi confiance, ça finira par te tomber dessus.

      - J’espère que ça fera pas trop mal.

      Cédric pouffa.

      - T’inquiètes, assura-t-il. Plus c’est long, plus c’est bon.

      - C’est une façon de voir les choses… Et à part la Fac, t’a d’autres passions dans la vie ?

      - Joli revirement de sujet, môssieur ! Enfin, ouais, j’ai d’autres « passions » répondit Cédric en mimant les guillemets avec un large sourire. Je me passerais bien de la Fac, mais puisqu’il faut en passer par là… Mon père me garde une place au chaud dans sa boîte, mais il veut que j’aie au minimum une licence. « Pas d’incompétents, dans quelque domaine que ce soit », il dit.

      - Pas de bol… Enfin toi, t’as une perspective d’avenir.

      - J’peux sûrement m’arranger pour te pistonner chez mon père…

      - Ah ? Et y fais quoi, ton père ?

      Bonne question. Parce que pour avoir une baraque comme ça, fallait aligner les sous. Val s’était toujours posé la question.

      - C’t’assez compliqué, commença le fils Altier. Il dirige un cabinet de conseillers juridiques, etc.… Un beau bordel, mais un bordel qui rapporte. Si ça t’intéresse, je potasserais le sujet et on en reparlera.

      - Ouais… Et…

      Une longue plainte déchira la nuit, coupant net le début de la phrase de Valentin. Ce dernier sursauta. Cédric, lui, se leva d’un bond et se précipita vers la porte.

      - Hé ! Qu’est ce que tu…

      Trop tard. Cédric avait déjà disparu. Val hésita un instant. Etait-ce prudent ? Fallait il le suivre ? A la limite de se mettre une bonne tarte, il se força à quitter son siège et, laissant un billet de dix sur la table, sortit à la suite de son voisin.

      Il aperçut celui-ci vingt mètres plus haut, en train de forcer une porte. A presque dix heures du soir, les rues n’étaient pas encore tout à fait vides, et des gens commençaient à affluer. Val sprinta et interpella Cédric.

      - Attend, fit il en arrivant à son niveau. Tu vas pas y aller seul, quand même ? On ne sait même pas ce qui se passe.

      L’autre sourit et, d’un geste de la tête, l’invita à la le suivre à l’intérieur. Un autre cri résonna alors, figeant Val sur place. Il provenait bien de l’immeuble dans lequel ils allaient pénétrer. Qu’y avait il à l’intérieur ?

      - Val ? Ca va ?

      - Hein ? Ouais, on y va. 

      On y va. La porte s’était gentiment ouverte, comme par magie. Val s’en contrefoutait, trop occupé à suivre Cédric dans l’escalier en spirale qui menait au premier, à grimper les marches quatre à quatre. Par pur réflexe, il garda la main serrée sur son téléphone portable, prêt à appeler la police à tout moment. Mais était-ce le 16 ou le 18 ? Il espérait s’en souvenir le moment venu.

      Ils déboulèrent au premier. La porte était entrouverte, laissant s’échapper une timide lueur qui éclaira la cage d’escalier plongée dans l’obscurité. On n’entendait plus rien. Cédric poussa un peu plus le battant vers l’intérieur, du bout du pied.

      Il hocha la tête à l’intention de Val, puis ils entrèrent tout deux, côte à côte.

      Val n’était pas très rassuré. C’était la première fois qu’il entrait ainsi chez quelqu’un, et dans de telles circonstances. Qui plus est, le calme qui régnait dans le vestibule était… surnaturel. Seuls les bruits du dehors, de la ville endormie et de ses habitants noctambules, venait troubler le silence de l’appartement.

      Dans d’autres circonstances, Val n’aurait pas fait attention à la lumière chiche et faiblarde qui s’échappait des néons au plafond. Mais en l’occurrence, elle renforçait presque l’ambiance pesante du moment.

      Comment disait Gwen, déjà ? Ah oui… « Y a de la tension dans l’air… C’est presque palpable. ». Nul doute que cela lui aurait échappé. Mais, malheureusement, c’était lui et non pas elle qui y était. Et lui, il avait les foies ; les lèvres scellées par la peur qui lui nouait l’estomac.

      Dans quoi s’était il encore fourré, hein ?

      La réponse était tout sauf satisfaisante.

      Ils traversèrent le vestibule sur la pointe des pieds, et parvinrent enfin à la première salle. C’était le salon. La télévision était éteinte, le canapé comme les chaises vides. Mais un repas encore chaud attendait patiemment sur la table, à peine commencé. La fenêtre, ouverte, donnait sur la rue, ses rideaux flottant doucement dans l’air du soir.

      - Et merde !

      Cédric se précipita dans le salon, et se pencha derrière le canapé. Valentin remarqua alors des taches sombres sur le cuir du meuble. Puis, son regard tomba sur un pied indubitablement féminin qui dépassait de derrière le canapé. Cédric, calme mais pâle, se tenait au dessus, le regard braqué vers le corps.

      - C’est… ? Bordel de mer… !

      Val se mit la main devant la bouche, sentant monter la nausée, et chercha la cuisine du regard. Miraculeusement, la première porte qu’il poussa en s’y précipitant révélait une cuvette qui lui parut soudain très appropriée. Choqué, écoeuré, il rendit son dîner dans les toilettes d’une dame qu’il n’avait jamais connu.

      Elle était morte, étendue dans son salon, ses yeux révulsés et vitreux tournés vers le plafond, comme si elle avait espéré une dernière fois voir le ciel avant de s’en aller. En vain. On lui avait tranché la gorge, et visiblement percé le cœur, répandant ainsi autour d’elle une auréole sanguine macabre, souillant son peignoir de soie. Son visage émacié et ridé de femme dans la force de l’age conservait une expression béate, stupéfaite, qui avait achevé de choquer Valentin.

      Quand le jeune homme revint près de son voisin, celui-ci refermait sèchement le clapet de son portable. Le commissariat se trouvant à quelques rues de là en contrebas, ils entendirent siffler les sirènes de polices en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.

      - Trop tard, murmura alors Cédric en secouant la tête.

      - Qu… Quoi ?

      - On arrive toujours trop tard. Ca va toi ?

     - A ton avis ? Ca te dérange pas qu’on attende plutôt dehors ?

    Cédric hocha la tête et ils sortirent sur le perron. Des bruits de pas résonnèrent et plusieurs personnes apparurent, habillées à la va-vite ou encore simplement en caleçon ou pyjama. Les voisins, probablement.

     - Qu’est ce que si se passe ? Vous êtes entré comment ? Madame Lacombe-Marie ?

     Les questions fusaient, et Cédric tentait de répondre. Mais un vieil homme le poussa et pénétra dans l’appartement. Un cri et une course éperdue plus tard, il était de retour, aussi pâle que les deux garçons.

      - Sainte Marie mère de Dieu… !

      Il se signa et se plaqua contre le mur.

      Alors, la police arriva. 

 

 

___________________________________________________________________________________________________________

 

Edit: A propos de rien, le deuxième chapitre est bien entamé... pour ceux que ça intéresse, bien sûr ;D

       Aurais je droit à un petit commentaire avant de partir en vacances? Juste pour savoir si je dois continuer, ce serait sympa merci.

Edit 2: Remarque^^ Pour le moment il ne se passe pas grand chose, donc je me doute qu'il n'y a pas grand chose à commenter. Enfin bon, on verra après le second chap'...

 

 

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  Bon voilà, c'est pas de gaité de coeur mais je vais commettre l'irréparable... Un triple post >_<. J'ignore si la règle des 24h est en vigueur ici, mais ça fait plus de 24 que j'ai envoyé mon dernier post donc...

  Voici le deuxième chapitre. Peut être y aura-t-il plus matière à commenter, c'est à vous de juger. Quoi qu'il en soit, bonne lecture.

 

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Chapitre 2

 

 

 

 

 

      - … Et tu n’as rien vu ?

      Val secoua la tête, répétant une énième fois ce qu’il avait déjà dit à l’inspecteur.

      - Rien, à part… Cette pauvre femme. La fenêtre était ouverte mais… s’il avait sauté, on l’aurait forcément vu.

      - D’accord, fit l’agent de police en grattant sa déposition sur le papier approprié. Laisse nous ton numéro, et on te rappellera si jamais on a de nouveau besoin de toi.

     Val laissa son fixe et son portable, et sortit du petit bureau. Le commissariat était en effervescence, les hommes en tenue comme en civil passant sans arrêt d’une pièce à une autre, interpellant bruyamment leurs collègues. Le jeune homme traversa le couloir et quitta se petit monde qui commençait sérieusement à l’indisposer. Après ce qu’il avait vu… Il avait besoin de repos. Peut être parviendrait il à trouver le sommeil. Peut être pas. Madame Lacombe-Marie revenait à chaque fois qu’il fermait trop longtemps les yeux, elle sa gorge tranchée, sa poitrine martyrisée.

      Il avait besoin de se changer les idées.

      Arrivé dans la rue, il tomba sur Cédric et son père, un grand échalas blond à la barbe bien taillée qui dégageait comme une aura de force tranquille. Il ne l’avait jamais croisé qu’en de rares occasions, et aurait préféré le rencontrer dans de circonstances moins tragiques.

      - Bonsoir, jeune homme, fit Jean Altier en lui serrant la main. J’ai prévenu tes parents avant de venir. Ils sont très inquiets.

      - Oh, je vais bien, dans l’ensemble. Je pense… qu’il me faudra juste un peu de temps…

      - Je comprends.

      - T’inquiète pas, Valentin, fit Cédric en lui donnant une bourrade amicale peu convaincante. On s’en sortira.

      - Bon, trancha son père en se dirigeant d’un pas alerte vers sa voiture. Monte, je te ramène.

      - Merci, monsieur.

 

      Le trajet se fit dans le silence le plus complet. Val se contenta de regarder défiler les rues et les maisons, s’efforçant d’effacer ces effroyables images de sa tête. En vain.

      - Nous y voilà, fit Altier en arrêtant sa voiture.

      - Ah… Merci.

      Val ouvrit la portière, mais Cédric le retint un instant.

      - Et… si jamais t’as besoin de parler. Tu sais où sonner.

      - Ouais, je sais.

      - Essaye de passer une bonne nuit.

      Le jeune homme hocha la tête et sortit, avant de refermer délicatement la portière de la Mercedes derrière lui. D’un pas traînant, il rentra chez lui.

       Passer une bonne nuit ? Plus facile à dire qu’à faire. Sans compter qu’il devait se lever tôt le lendemain. Au moins, cette fois ci, il pourrait expliquer à Gwen les raisons de son retard. Elle ne pourrait rien dire.

      La lumière était allumée dans son appartement. Sans doute ses parents qui l’attendaient de pied ferme. En effet dès, qu’il eut passé la porte, sa mère lui sauta dessus pour vérifier s’il n’avait rien.

      - Valentin, mon garçon ! Tout va bien ?

      - Ouais, ouais, ça va, confirma-t-il en se dégageant doucement des bras de sa mère. Je risque juste d’avoir un peu de mal à dormir, c’est tout…

      - Tu veux en parler ? fit son père, debout en face d’eux. Ca t’aidera peut être…

      - Honnêtement, j’ai des doutes. Mais, m’man… Si tu pouvais juste me filer un somnifère ou deux…

      - Oh… Oui, ne bouge pas !

      Elle fila à l’étage. Ce faisant, son père se rapprocha, une lueur interrogative dans le regard. Il voulait en savoir plus.

      - P’pa, fit Val en levant les mains. Je n’ai vraiment pas envie d’en parler, je t’assure. Il y aura probablement tous les détails à la télé demain…

      - Je vois. Bon. Avale ton cachet et va te coucher. Je crois que c’est encore la meilleure solution.

      - Ouais.

     Sa mère revint un instant plus tard, un verre d’eau à la main. Valentin s’en empara, jeta un coup d’œil au cachet qui commençait lentement à se dissoudre au fond, puis renversa la tête et avala le comprimé cul sec.

      - Merci. Bon, je vais me coucher… Mais, et Isa ?

      - Ta sœur est trop occupée avec sa musique et son ordinateur pour se rendre compte que le téléphone sonne (son père sourit d’un air roublard). Je pense que je vais la laisser dans le brouillard jusqu’à ce que les infos en parlent.

      Val sourit à son tour. Isabelle, sa cadette de cinq ans, allait sur sa seizième année. Elle gravitait dans son univers d’adolescente sans se soucier de trop du monde extérieur. Sa famille se situait plus dans ses amis que dans ses parents. Oui, ça ne lui ferait pas de mal que la réalité frappe à sa porte et change la donne. Dans un sursaut de cynisme, Val se dit que ça finirait sûrement par lui rappeler qu’elle avait un frère. 

      Saluant ses parents d’un geste vague de la main, il entra dans sa chambre et ferma derrière lui. Il les entendit éteindre la lumière, remonter à l’étage et marcher doucement jusqu’à leur chambre. Puis, le silence tomba dans sa chambre, seulement troublé par les battements de son cœur. Dans son crâne, les pensées tourbillonnaient alors qu’il entreprenait laborieusement d’ôter ses vêtements.

      Plusieurs choses le turlupinaient.

      Il déboutonna sa chemise et la jeta sur son siège de bureau. Le meurtrier n’était pas sortit par le bas, car Cédric et lui étaient arrivés par là. Il n’était pas passé par la fenêtre, personne dans la rue n’avait vu quoi que ce soit sauter de l’étage. Passer par le toit n’aurait strictement servi à rien, étant donné que les policiers avaient quadrillé le bâtiment de haut en bas. La seule option restante fit frémir Valentin. Le meurtrier avait du rester caché dans l’appartement alors que les garçons y pénétraient. Peut être était il sortit discrètement ensuite. Peut être pas.

      Valentin frémit une nouvelle fois en se sortant de son pantalon. Cette pauvre femme. La gorge tranchée et la poitrine déchirée. Quel genre de malade pouvait bien faire ça à un autre être humain ?

      Le jeune homme éteint la lumière et se jeta sur son lit. Il y avait un dernier truc. Si Cédric avait appelé la police, comment se faisait il que ce soit son père qui se soit le premier présenté sur les lieux ? D’ailleurs, la police semblait bien le connaître. Il avait décliné son identité et montré ses papiers, et l’inspecteur en charge de l’enquête l’avait autorisé à pénétrer dans l’appartement avec l’équipe. Remarque, quoi de plus normal pour un expert juridique ? Peut être travaillait il dans les affaires criminelles ?

      Le somnifère ne fit, bien évidemment, pas effet tout de suite, et Valentin se laissa tourmenter par des pensées sombres et des visions de cauchemar jusqu’à ce qu’un sommeil lourd et bienfaiteur vienne le prendre.

 

 

 

 

*****

 

 

 

      Minuit passé. Deux hommes se tenaient au dessus de la tâche de sang qui encrassait le tapis de feu madame Lacombe-Marie.

      - Sans rire… fit le plus grand en ajustant le col de son veston. Pourquoi est ce qu’on doit toujours se pointer à des heures pareilles ?

      - A ton avis ? répondit son compagnon, les yeux clos et les mains jointes devant le visage. Imagine la tronche des flics s’ils nous voyaient comme ça…

      - Mwaif. C’est pas faux.

      - Oui, hein ? Alors maintenant tais toi un peu. J’ai besoin d’un minimum de concentration.

      Le grand costaud laissa son acolyte à ses occupations et tourna dans l’appartement. Quelques détails subtils révélèrent à son œil exercé ce qu’il avait besoin de savoir sur son ancienne occupante. Cette femme était de la famille.

      - Chiotte… jura soudain son compagnon en quittant sa position. C’est un homme.

      - Pardon ?

      - Un être humain, reprit il en détachant soigneusement ses mots. C’est un homme qui a fait ça.

      - … Ca se complique. A quand remonte le dernier cas, déjà ?

      - Hé bien, répondit l’homme en réfléchissant à peine, à plus d’une dizaine d’années. Toute une famille de La Clappe y était passée…

      - Ouais, mais c’est pas pareil. Cette dame, elle était comme toi.

      L’autre s’avança sous l’unique lumière du salon, son air grave renforçant l’aspect sérieux de son costume trois pièces noir.

      - Comme moi, dis tu ? fit il fronçant les sourcils. Montre.

      Le grand ne se fit pas prier et lui montra ses découvertes.

      - D’accord. Ca se complique vraiment. Ce type n’est certainement pas venu là par hasard… Et, de sûr, il était lui aussi « comme moi ».

      - Qu’est ce qui te fait dire ça ?

      - La porte, mon grand. Elle portait deux signatures. J’ai vite examiné la serrure. On l’a verrouillée, puis ouverte de la même façon.

      - D’accord pour le tueur, il verrouille la porte. Mais il n’est pas sortit par là quand les gosses sont montés. Alors qui ?

      - Les gosses. Tu as leur nom ?

      - Ouais.

      Le grand homme fouilla dans la poche intérieure de son veston et en sortit un agenda électronique, le PDA qu’il traînait partout. Deux coups de stylet plus tard, il annonça :

      - Cédric Altier et Valentin Roman… D’accord.

      - Ouais, je vois, grogna l’homme au costume. Bon, c’est déjà ça de résolu. Maintenant, allons faire un tour à la morgue. J’ai sondé tout l’appartement, mais je vais quand même vérifier le corps. On aura également un peu plus d’éléments concernant le mode opératoire…

      - On est obligés ?

      - Le patron nous incendiera si on ne suit pas les ordres. Et ne pense même pas à me laisser y aller seul. On ne se sépare sous aucun prétexte.

      - Ouais, je connais les règles, merci, fit le grand en reniflant dédaigneusement.  Encore heureux qu’on ai pas à coucher dans le même lit.   

      - Comme tu dis. On y va ?

      Précédé par son compagnon, l’homme au costume sortit de l’appartement. Une fois au dehors, il ferma la porte et se concentra un court instant. Il murmura des paroles inintelligibles et claqua des doigts. La lumière sous la porte s’éteignit et sa serrure joua toute seule, liant le battant au chambranle. Avec un sourire satisfait, l’homme s’engagea dans les escaliers.

 

 

 

*****

 

 

 

      Comme prévu, Valentin se leva juste assez en retard pour prendre un petit déjeuner furtif et laissa tomber le rasage. C’est avec un début de barbe qu’il entra dans la Ford de Gwen, stationnée devant le portail. Son amie l’accueillit avec un regard acéré.

      - Tu te négliges, attaqua-t-elle d’entrée tout an faisant repartir le véhicule 

      - Bonjour, essaya tout de même Valentin. Bien dormi ?

      Nouveau regard inquisiteur.

      - Mieux que toi, apparemment. C’est quoi ces cernes sous tes yeux ?

      Val trouva un prétexte fallacieux pour éluder la question. Il n’avait pas vraiment envie de parler de ça de bon matin. C’était un coup à lui faire rendre son petit déjeuner. Gwen faisait des efforts pour que sa petite voiture soit propre, il n’allait tout de même pas vomir sur la banquette ou le tableau de bord, si ?

      Malheureusement, ils partageaient plusieurs cours dans la journée, et il ne put échapper à quelques regards suspicieux lancés par-dessus l’épaule.  Elle le laissa miraculeusement tranquille pendant la pause de midi, et il ne la revit pas de l’après midi. Elle avait sans doute mieux à faire que le surveiller. Tant mieux.

      La journée se passa sans anicroche notable. Valentin aurait presque cru à une journée normale si l’autre abruti de Tristan Gruget n’avait pas pointé le bout de son nez à la sortie des cours.

      Signalant sa présence à Valentin d’un coup d’épaule, le jeune homme se fendit d’un sourire carnassier. A sa droite, Val sentit Gwen se raidir. Il la calma d’une pression sur l’avant bras.

      - Hey hey… Regardez qui va là !

      - Salut. La forme ?

      La question parut prendre Tristan au dépourvu. Val essaya de contourner la massa de l’abruti. La voiture était à une dizaine de mètres. Mais l’autre l’attrapa par le bras.

     - Oh, pas si vite. On va discuter un peu. On a parlé de toi aux infos.

     - Super. Et alors ?

     - Alors, couillon, je veux des détails. T’as été témoin d’un meurtre, quand même. Ca fait quoi de voir une vielle peau étendue dans son propre sang.

      - T’es ignoble, mec.

      - Allez, raconte. Je te lâcherais pas tant que j’aurais pas eu toute l’histoire.

      Gwen regardait alternativement son ami et la brute. Elle avait l’air partagée entre entendre ce qu’avait à dire Valentin et tenter de l’aider.

      Mais Val prit la décision tout seul. Ce qui s’était passé la veille avait ravivé de vieilles rancoeurs, et des pensées ténébreuses l’avaient suivies tout au long de la journée. Il s’était contenu, mais Tristan était sur le point de le faire exploser. Aussi, il prit les devants.

      - Qu’est ce qui te fait croire que j’ai envie d’en parler ? Maintenant lâche moi.

      Le ton employé suggérait que cela n’avait rien d’une proposition aimable. Le sourire carnassier de Gruget s’élargit, comme s’il avait entendu la meilleure blague du siècle.

      - Tu peux répéter ?

      - Bon, maintenant dégage.

      Val laissa de vieux réflexes ressurgir. Sa main droite lâcha son sac, attrapa le poignet de Tristan et, d’une pression sèche, il lui fit lâcher prise. Puis, bloquant son poignet au moyen d’une clé, il appuya de la main gauche sur le coude que lui offrait son adversaire. Il pressa juste assez fort pour l’articulation craque, puis relâcha sa prise et fit signe à Gwen de s’en aller.

      Il s’empressèrent de rejoindre la voiture de la jeune femme, qui démarra en trombe.

     - Joli. T’as appris ça où ?

     - J’ai vu deux trois trucs sur le net… En tout cas, il aura mal au moins une bonne journée.

     Val se retourna et scruta la rue à travers la verrière arrière. Il distingua une demi douzaine de journalistes qui se massaient à l’entrée de la Fac.

      - Ouf. C’était moins une.

      - Va falloir qu’on ait une petite discussion, Val.

      - Ouais…

      Le jeune homme n’écoutait qu’à moitié. Il venait d’apercevoir Cédric, adossé au mur du parking, juste à côté d’un Tristan fulminant. Pourquoi n’était il pas intervenu ? Pourquoi Tristan n’avait pas posé ses questions débiles à Cédric plutôt qu’à lui ?

       L’espace d’un instant, il lui sembla que leurs regards se croisèrent. Et Valentin cru distinguer un sourire satisfait sur le visage de son voisin.

 

 

 

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EDIT: Pompompom... Chapitre 3 entamé. Sûrement fini d'ici la fin de la semaine prochaine, voire plus tôt. A bientôt.

  EDIT 2: Bientôt fini, ça arrive avant vendredi.

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   Chapitre 3 en ligne. Dernier chapitre avant 3 semaines au moins, étant donné que je m'éxile pour les vacances^^ Prochain chapitre quand je rentrerais, c'est à dire sûrement à la mi aout... Autant dire que j'aurais le temps d'y réfléchir!

   Bonne lecture, hein!  ;)

 

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Chapitre 3

 

 

 

 

      La police n’avait pas rappelé. Ca ne dérangeait pas vraiment Val, qui préférait oublier cette histoire le plus vite possible. Il avait déjà eu fort à faire avec Gwen et ses questions, ainsi qu’Isabelle qui avait failli recracher sa soupe à midi. Les journalistes avaient réussi à arracher à Val une brève interview aux abords de la Fac, et il était inévitablement passé aux infos locales à midi et vingt heures.

      Il dormait toujours aussi mal. Isabelle avait paru finalement comprendre le pourquoi des grands cernes qui lui soulignaient les yeux. Son regard s’était figé sur son frère durant de longues secondes, et elle avait fini par lâcher un « Alors c’est ça… » abasourdi. Elle s’était éclipsée après le repas, rejoignant sûrement ses amies sur le net pour discuter de cet évènement incroyable. Son bon à rien de frère passait à la télé ! Pour une histoire de meurtre, en plus ! Incroyable, vraiment.

      Samedi soir. Val avait le week-end pour se détendre, et il commençait plus tard le lundi matin. Peut être irait il marcher un peu. Ou peut être resterait il tout simplement chez lui, à surfer sur le net.

      Il projetait de passer sa soirée devant la télé quand trois coups frappés à sa porte le firent sursauter. Intrigué plus qu’apeuré, il se leva, rectifia le caleçon qui lui tenait lieu de pyjama, et écarta un rideau pour regarder au travers de la porte vitrée.

      Cédric lui fit un signe de la main, un grand sourire sur le visage. Surpris, Val ouvrit.

      - Salut, mec !

      - Heu, salut… Je peux savoir ce qui t’amène à cette heure ?

      - J’ai des nouvelles de l’enquête. Je suppose qu’ils ne t’ont pas appelés ?

      Valentin tiqua. Pourquoi Cédric avait il des informations et pas lui ? Il s’écarta et invita son voisin à entrer d’un geste de la tête.

      - Met toi à l’aise, et raconte moi tout ça.

      Cédric se plaça tout naturellement sur le canapé, laissant son regard parcourir l’ensemble du salon. Valentin s’assit en face de lui, les bras croisés sur le dossier de sa chaise.

      - Joli petit coin.

      - Ouais, on fait ce qu’on peut.

      Cédric sourit, puis reprit le fil principal de la conversation.

      - Donc ils, ne t’ont pas appelé ?

      - Certes non. Mais toi oui ?

      Nouveau sourire, conspirateur, cette fois ci.

      - Non plus. Mais mon père à des relations… On a pu avoir quelque chose. C’est pas très ragoûtant.

      - Comment ça ?

      - La victime n’a pas juste été égorgée et blessée au torse. Le légiste a vite découvert la vérité.

      Visiblement Cédric regardait trop de polars… Ce suspense qu’il créait avec ses pauses théâtrales était malvenu, surtout dans de telles circonstances.

      - Allez accouche. J’suis crevé, et j’aimerais bien dormir.

      - On lui a arraché le cœur.

      Val ouvrit la bouche, la referma, choqué. Putain. Un meurtre, c’est suffisant. Le type devait déjà pas être bien dans sa tête. Voilà que c’était un foutu psychopathe par-dessus le marché.

      - Bordel de merde, Cédric. Et comment tu veux que je dorme, maintenant ? T’aurais pas pu attendre demain ?

      Il se leva et alla prendre une bière dans le frigo.

      - Et qu’en dit la police ? Ils ont des indices, ou quoi que ce soit qui puisse les faire remonter jusqu’au taré qui a fait ça ?

      - Ils n’en savent pas plus pour le moment. Il n’y avait pas d’empreintes sur le corps. Ah, et à propos du cœur, cette information n’a pas été divulguée à la presse. Histoire d’éviter la panique et la paranoïa, ou un truc dans ce goût.

      Val avala une gorgée de bière, puis deux. Il n’en revenait toujours pas. Pourquoi avait il fallu que ça tombe sur lui ? Comme s’il n’avait déjà pas assez de pensées pour le tourmenter…

      Cédric reprit alors la parole, sur un ton étrange, à mi chemin entre le sérieux et l’ironie.

      - Tu crois au surnaturel ? demanda-t-il.

      - Hein ?

      - Quand on voit des trucs comme ça, on peut se poser des questions. Pourquoi lui a-t-il prit le cœur ? Ou est il passé ?

      Val acquiesça, mal à l’aise.

      - J’avoue que c’est troublant, mais il y a forcément une explication rationnelle. Comme toujours.

      - Comme toujours, fit Cédric en hochant la tête. Même si ce n’est pas toujours celle qu’on croit.

      Val fronça les sourcils.

      - Qu’est ce que tu veux dire ?

      Cédric se leva.

      - On en reparlera. Je crois bien qu’il se passera de nouveaux trucs bizarres d’ici peu. Bonne nuit.

      - C’est toi qui es bizarre, grogna Valentin quand Cédric eut refermé la porte.

      Bordel ! Il aurait vraiment pu s’abstenir de lui raconter ça. Il but une nouvelle gorgée de bière et alluma le poste. Il tomba sur une série policière. Zappa. Un vieux film comique avec Eddy Murphy. Parfait. Il alla tourner deux fois la clé dans sa serrure et vint se rasseoir.

      Il allait enfin pouvoir se changer les idées.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Une haute silhouette noire se découpait sur le paysage nocturne de la campagne, seulement éclairée par la lueur lunaire. Elle se déplaçait lentement, mais sûrement, s’éloignant pas à pas de l’agglomération dracénoise en suivant la départementale. Lotissement et immeubles avaient cédé le pas à un panorama très rural et, n’eut été les lumières de la ville dans son dos, elle se serait vraiment cru perdue au beau milieu de la campagne provençale.

      Mais, en vérité, toutes ces mièvres considérations lui importaient peu. La sombre silhouette arrivait à destination, et heureusement. Son pesant bagage commençait à l‘incommoder. « Emmerder » serait plus exact.

      A une centaine de mètres en contrebas, se dessinant sous la lumière de la pleine lune, les contours d’une ferme rustique obstruaient son horizon. Elle pressa le pas, sa glacière lui battant le flanc avec acharnement. Ce soir, elle allait enfin avoir des réponses. Coupant à travers champ, elle se dirigea vers les formes sombres qui se dressaient devant la bâtisse. Les branches de trois arbres se découpaient dans cette faible clarté nocturne ; un chêne, un micocoulier et un if, qui encerclaient depuis des dizaines d’années le dolmen.

      Le dolmen. Trois dalles de pierre usée par le temps soutenant toujours la dalle supérieure, lourde d’une vingtaine de tonnes. Un vieux monument funéraire, qu’on avait détourné de sa fonction première des années et des années plus tôt.

      La silhouette arriva enfin sur les lieux. Tous ses sens en éveil, elle repéra vite les deux agents en poste près des pierres dressées. Le premier était adossé à l’if, le regard tourné vers la maison. Le second se détachait clairement au clair de lune, assis sur la table de pierre. Ce fut d’ailleurs lui qui bougea le premier, détectant sa présence.

      - Eh ! On a de la visite.

      - ‘Chier. J’allais m’endormir.

      - Eh, l’ami, l’interpella le premier agent. On peut savoir ce que vous faites ici à cette heure ?

      Un court instant passa. Puis, il reprit, à l’intention de son collègue :

      - Jacky, bouge toi ! L’aura de ce type n’est pas normale.

      La silhouette s’arrêta, posa sa glacière, et leva les mains. Au même moment, « Jacky » sortait de l’ombre, l’acier froid de son pistolet pointé dans la direction de l’importun.

      - Pas un pas de… Hurgh…

      L’agent lâcha son arme, porta ses mains à sa gorge et tomba à genoux. Du haut du dolmen, l’autre s’était mis à gesticuler et à incanter. La silhouette ne sa fatigua pas, l’envoyant dans les branches du chêne d’un simple mouvement de la main. Propulsé dans les airs par le sortilège, l’agent heurta violemment le tronc de l’arbre et retomba sur le sol, assommé. Pendant ce temps, son comparse s’était évanoui. Tout s’était joué en une poignée de secondes.

      - On va pouvoir commencer… fit la silhouette en reprenant son fardeau.

      D’un murmure accompagné d’un geste dédaigneux du doigt, elle fit glisser « Arnaud » hors de son chemin et alla poser sa glacière sous le dolmen.

      Sans se presser, elle l’ouvrit. Un cœur bien frais l’y attendait, en compagnie d’une poche de sang de bonne taille.

      Enfin. Des réponses. On dit que la nuit porte conseil. Ca allait très vite se vérifier.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Dimanche midi. Repas familial oblige, Val était attablé avec ses parents et sa sœur, au premier étage de la maison qu’ils partageaient. La télévision, allumée, assurait un bruit de fond et les tenait occupés à parler de l’actualité.

      - Justice, annonça le présentateur. L’enquête concernant le meurtre sauvage d’une retraitée à Draguignan, dans le centre Var, piétine toujours. La police n’a toujours pas trouvé d’éléments conséquents, mais assure faire son possible.

      S’en suivit une déclaration de l’inspecteur de police chargé de l’enquête. Val aurait voulu changer de chaîne, mais c’était peine perdue. Isabelle avait la main sur la télécommande et les yeux rivés sur l’écran. Qui plus est, elle se trouvait à l’autre bout de la table.

      - C’est dingue, cette histoire quand même… Draguignan devient vraiment…

      - Chhhhhh, lui intima son père en montrant la télévision.

      Le présentateur était passé à un autre sujet. L’attention de Valentin se focalisa de nouveau sur le poste, à contrecoeur. 

      - … jours à Draguignan, une affaire tout aussi étrange a secoué ce matin les résidents d’une propriété en dehors de l’agglomération. La Pierre de la Fée, un dolmen datant du Néolithique, a été souillée et « profanée » la nuit dernière. D’étranges signes tracés à l’aide de sang animal, rappelant fortement des pratiques sataniques, maculent les grandes pierres dressées de haut en bas. Ces signes ont ce matin terrorisé les propriétaires du terrain ou siège le dolmen, qui ont aussitôt alerté les autorités. L’enquête a débuté ce matin, et devrait se poursuivre encore quelques jours, bien qu’on n’ait aucune idée sur l’identité de l’auteur de ces signes.

      - Par ma foi, fit le père de Valentin. C’est la semaine des atrocités !

      - Ouais, on dirait bien…

      Qu’avait dit Cédric, déjà ? Qu’il risquait de se passer d’autres choses étranges sous peu ? Val chassa ses pensées d’un revers mental de la main. C’était une coïncidence, rien de plus. Une foutue coïncidence. Si ça se trouve, son voisin avait lui-même orchestré cette mise en scène…

      Non. Je suis con ou quoi ? Il n’irait jamais faire ça.

      Alors qu’il allait retourner à sa salade de pommes de terre, Val s’arrêta sur un détail. Quelque chose qui, s’il l’avait vu quelques jours, quelques semaines plus tôt, ne l’aurait jamais intrigué. La caméra montrait un plan large du dolmen, autour duquel s’affairait policier en uniformes et résidents, sans compter les badauds qui traînaient là. Il vit tout d’abord quelque chose d’assez classique : un enquêteur en civil penché sur les lieux du « crime ». Mais celui-ci se releva, repassa sous les bandes de sécurité et alla parler à une personne qui se tenait un peu en retrait, à l’ombre de la maison en arrière plan.

      Cette personne, Val l’aurait reconnu entre mille, même de si loin.

      A l’écran, juste avant que le reportage ne prenne fin, Jean Altier acquiesçait doucement à ce que l’enquêteur lui confiait.

 

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Je me suis lancé dans ton histoire, la description 'Fantasy moderne' m'inspirait bien, et j'ai bien fait ^^

Histoire très bien orchestrée, chaque personnage a sa place, chaque évènement son importance. Et le style d'écriture qui t'es propre, est fluide et très agréable à lire. J'attend déjà la suite pour savoir de quoi il en retourne !

La magie est joliment introduite dans notre univers contemporain.

Le dolmen existe vraiment dans ta région je présume (moi quicroyait que ça n'existait qu'en bretagne ces bêtes là :P) ?

 

Bon ben il ne te reste plus qu'à continuer, j'espère que t'es vacnaces te seront inspiratrices et productives en chapitres ! ^^

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  • 4 weeks later...

Trois semaines, quatres chapitres de Naruto et des heures innombrables de glandages plus tard...

   Chérie, j'suis rentrééééééé!  ;D

   Hé ben^^ J'en ai des choses a rattraper, moi! Commençons par le commencement, déjà, ce sera pas mal. Merci pour ton comm', Jean Gunter, ça fait toujours plaisir. Et ne t'inquiètes pas, j'ai déjà de nombreuses idées pour la suite, il me reste plus qu'à les coucher sur une page Word... On verra ce que ça donne.

  Concernant le dolmen, il existe bel et bien (incroyable, nan? Moi aussi j'en revenais pas quand j'ai débarqué là-bas^^). Tu tapes "pierre de la fée" sur Google et tu trouves le machin direct.

   Vila vila, encore merci, et pour le chapitre 4, ben j'espère le rédiger avant la fin de la semaine. Sur ce, à plus  ;)

 

    Edit: Sitôt dit, sitôt fait! Plus tôt que prévu, même. Allez, bonne lecture, chap' 4 online!

 

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Chapitre 4

 

 

 

 

 

      Val finit le repas à toute vitesse, laissant sa famille en plan dès la dernière bouchée de pomme engloutie. Il bondit de sa chaise tel un félin et courut vers les escaliers qui descendaient dans son « antre ».

      - Hé, fiston ! Y a pas le feu ! lui lança son père depuis la table.

      - Heu… J’ai oublié que j’avais un truc assez important à faire ! Faut que je me grouille !

      Ca devrait passer. Valentin, l’éternel étourdi.

      - D’accord. Mais brosse toi les dents, hein…

      Bordel. J’ai vingt et un ans ou merde ?

      Le jeune homme se précipita dans les escaliers, fonça se brosser les dents –mauvaise conscience oblige – et sauta dans ses chaussures.

      Ca devenait troublant. D’abord Cédric qui lui débitait des absurdités sur le surnaturel et tout le tintouin… Et puis son père qui semblait de près ou de loin impliqué dans plusieurs affaires étranges, dont un certain meurtre…

      Coïncidence ou pas, il en aurait le cœur net !

      Val sortit en trombe de son antre et ferma derrière lui. Veillant aux fenêtres, il s’assura que ni ses parents ni sa sœur ne l’épiaient. Il n’y avait personne. Parfait. Trottinant doucement, il remonta l’impasse et sonna chez les Altier.

      - Faudrait vraiment que je pense à prendre son numéro, grogna-t-il en patientant.

      L’interphone grésilla, et la même voix que la dernière fois lui demanda :

      - Oui ?

      - Heu… Je voudrais voir Cédric, s’il vous plait.

      - Le garçon est sortit. Je peux prendre un message pour lui ?

      Merde. Attends…

      - Heu, nan, merci. Dites moi juste où il est allé ?

      - Il a dit qu’il allait prendre un verre… Boulevard Clemenceau, je présume.

      - Merci.

      - Au revoir, Monsieur.

      Et, dans un nouveau grésillement, l’interphone redevint silencieux.

      Boulevard Clemenceau, hein ? Juste l’endroit où ça c’est passé… Qu’est ce que Cédric pouvait avoir derrière la tête ? Quoi qu’il en soit, il était parti pour une petite trotte. Il habitait à deux kilomètres du centre… Rien de tel qu’une bonne marche pour se remettre en forme, non ?

     Prenant le peu de courage dont il disposait à deux mains, il se dirigea vers la sortie de l’impasse.

 

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      - Inutile de vous dire que la situation n’est pas idéale.

      L’homme en costume trois pièces noir hocha la tête, desserrant machinalement le nœud de sa cravate. Son grand comparse resta de marbre.

      Leur interlocuteur, assis derrière son bureau, eut un geste d’impuissance.

      - Désolé, patron, fit le grand. Mais sur ce coup là, on a trouvé meilleur que nous.

      - Meilleur ? Il vous a balayé d’un revers de la main, fit l’homme en mimant le geste. J’ai l’impression que vous vous reposez un peu trop sur vos lauriers, tous les deux. Et dire que vous êtes mes meilleurs éléments. Qu’est ce que tu en penses, Hervé ?

      L’homme en costume se dandina, mal à l’aise. Il n’aimait pas se faire remonter les bretelles par le patron. Personne n’aimait ça, d’ailleurs.

      - Je vous assure, monsieur, que nous étions vigilants. Simplement, on ne s’attendait pas à… ça.

      - Pardon ? Après le meurtre de Lacombe-Marie, il n’y avait qu’une seule possibilité. Pensiez vous que je vous avais placés là pour faire du tourisme ?

      - Non, mais… commença Hervé.

      - Bon, le coupa le patron sans ménagement. Tu es un type brillant, Hervé. C’est ce que je répète à longueur de journée dès que l’Autorité Centrale me demande des comptes. A ton avis, quel usage peut on faire du sang et du coeur d’une Gardienne ?

      Hervé garda le silence. De son côté, Jacky lui glissa un regard compatissant. Il semblait dire : « pas cool, mec ».

      - Non pas que j’apprécie vous passer un savon, continua le patron en les foudroyant tout de même du regard, mais nous avons une menace de niveau supérieur sur les bras. Et je compte sur vous.

      Les deux compères échangèrent un nouveau regard. C’était reparti.

      - On sait ce que la viei… Madame Lacombe-Marie gardait, au juste ? toussota Jacky.     

      - Oui, répondit le patron en le tendant une paire de dossiers. Jetez un œil.

      Ils jetèrent un œil. Jacky releva la tête en premier. Il n’aimait pas se farcir tous les détails. Hervé était là pour ça, après tout. Celui-ci releva donc la tête un instant plus tard – le temps d’avoir lu les informations complémentaires au dossier.

      - Ca s’annonce… commença-t-il.

      - Plutôt coton, acheva son corpulent partenaire.

      - Ravi que vous soyez d’accord avec moi. Et avec l’ A.C, par-dessus le marché. Il va sans dire que tout le service est mobilisé, mais comme vous êtes ce qui ce fait de mieux – dans la région, du moins -, je vous charge des responsabilités et de l’autorité nécessaire à l’accomplissement de votre travail.

      Hervé et Jacky se regardèrent, puis se tournèrent vers le patron.

      - On a carte blanche, vous voulez dire ? demanda Jacky, un sourcil haussé en signe de scepticisme.

      - Vous orientez les hommes, récoltez leurs informations, donnez les ordres, menez la chasse, et, énuméra le patron en levant un doigt à chacune de leurs prérogatives, ne rendez de compte qu’à la plus haute autorité du département. C'est-à-dire, moi.

      - Parfait, chef, commença Hervé, vous pouvez…

      - Compter sur nous, finit Jacky. Au revoir, monsieur.

      Et ils sortirent du bureau, leur dossier sous le bras.

      Faisant pivoter son fauteuil vers la fenêtre, Jean Altier leva les yeux au ciel.

      - Je déteste quand ils font ça.

      Piochant dans la boite en bois posée sur son bureau, il porta un épais cigare à ses lèvres. Plissées d’inquiétude, celles-ci accueillerent bien volontiers ce familier réconfort.

      Claquant des doigts, le patron alluma son Havane à l’aide des flammes qui naquirent au bout de ses ongles. Tirant une longue bouffée de fumée, il se renversa dans son fauteuil et pensa à ce qu’il allait dire à l’A.C quand ils apprendraient à qui il avait confié l’affaire.

      Ca s’annonçait coton.

 

 

 

 

*****

 

 

      A peine étonné, Val retrouva Cédric à l’endroit même où ils avaient partagé un verre le mercredi précédent. Il aperçut sa crête blonde par-dessus les têtes des autres consommateurs, et s’apprêta à entrer dans le bar quand il vit avec qui il était assis.

      Manque de bol, Gwendoline était assise face à l’entrée. Elle le repéra en un clin d’œil.

    - Hé, Val ! l’apostropha-t-elle. Ca va ?

    Merde, impossible de s’en aller en la saluant juste de la main. Il avait mal à la tête rien qu’en imaginant les questions qu’elle lui poserait sur son attitude. Résigné et plutôt surpris, il alla à la rencontre de ses amis.

      Il tira une chaise à lui et s’assit après avoir fait la bise à la jeune femme.

      - Salut, Gwen. La forme.

      - Plutôt, oui… Tiens, Valentin, je te présente…

      Val et Cédric échangèrent une poignée de main.

      - Alors, Val, on traîne en ville ?

      - Cédric. En bonne compagnie, à ce que je vois.

      Gwen les dévisagea un instant.

      - Vous vous connaissez ? s’étonna-t-elle, les yeux plissés. Je veux dire, à part l’histoire de mercredi…

      - J’ai du oublier de te dire que c’était mon voisin, lâcha innocemment Val.

      - Sans rire ! Petit enfoiré, va ! Ca fait des années que vous vous connaissez, et jamais t’as pensé à me le présenter ?

      Val sourit, regardant alternativement Cédric et Gwen avant de dire :

      - Ouais… T’as pas l’air d’avoir eu besoin de mon aide.

      - C’est malin ! siffla-t-elle en lui frappant gentiment l’épaule.

      Autant pour sa discussion avec Cédric. Ne voyant aucune raison de rester, Val lança :

      - Bon, j’ai des choses à f…

      - Excusez moi, les garçons, faut que j’aille au petit coin, fit soudain Gwen en se levant. Je reviens !

      Bon. La chance lui souriait peut être, pour une fois. Tandis que la jeune femme disparaissait derrière la porte des sanitaires, Val se pencha en avant.

      - Cédric, faut qu’on parle.

      - Ah ? Et de quoi ?

      - De ce que tu m’as dis hier soir. Tu sais, à propos de trucs bizarres qui se passeraient bientôt…

      - Ah, oui, sourit le fils Altier. Tu as vu le dolmen à la télé.

      - Ouais. Et ton père y était aussi. Drôle de coïncidence, nan ? Comme le fait qu’il ait été le premier à débarquer sur les lieux du meurtre, et qu’il ait été le premier informé de la… disparition du cœur de cette pauvre femme.

      Val parlait tout doucement, évitant d’attirer l’attention des autres consommateurs. Par bonheur, ceux-ci n’avaient pas les mêmes scrupules, et le brouhaha de leurs conversations inondait littéralement l’espace du bar.

      - Et tu voudrais des explications, devina Cédric sans se départir de son sourire.

      - Tout juste.

      - Parfait. Alors rendez vous à deux heures du mat’ devant chez moi.

      - Deux heures ?! On est vraiment obligé de sortir à une heure pareille ? Je te rappelle qu’on a tous cours le lendemain.

      - Ca ne prendra pas longtemps. Oh ! Elle revient.

      Gwen se rassit à sa place un instant plus tard. Val tenta de retrouver l’apparence décontractée qu’il arborait en pénétrant dans le bar, et se leva.

      - Bon, les tourtereaux. Moi, je décolle, j’avais quelques petites choses à faire. A plus.

      - Tchao, Val.

      Et il sortit, non sans couler un regard à son voisin. Qu’est ce que c’était encore que ce bin’s, hein ? Une rencontre à deux heures du matin… Soit Cédric était complètement déjanté, soit ça cachait vraiment quelque chose. Sans déconner… Remarque, le sommeil le fuyait depuis quelques jours. Ce n’est pas comme si il avait perdu une nuit.

      Et Gwen, dans tout ça… Sortait elle avec Cédric ? Val ne pouvait qu’être content pour elle. Ca faisait un moment qu’elle cherchait l’âme sœur, sans succès. Cédric avait l’air d’être un type bien.

      Un type bizarre, avec un père louche et des manies très curieuses. Mais un type bien quand même.

      Remontant le boulevard, il obliqua à droite en face de l’office du tourisme et se retrouva bientôt nez à nez avec le Maison des Sports et de la Jeunesse. Plus fréquemment appelée M.S.J ou « Maison des Jeunes » par les habitués. Il se trouvait devant le passage piéton, au bas des escaliers qui menaient à l’entrée des sportifs.

      L’endroit était bondé. Une compétition fin septembre ? Ca n’étonnait guère Val, qui voyait défiler jeunes et vieux karatékas sur les marches. Une petite compèt’ mettait toujours d’humeur en début de saison.

      Dans la foule, il repéra une bonne demi douzaine de visages connus. L’un d’eux croisa son regard.

      - Val ? Eh, Val ! Val ?

      Il avait déjà suffisamment d’emmerdes comme ça. Pas la peine de repenser à ça

      Faisant demi-tour, il fuit l’endroit aussi vite que possible.   

 

 

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A deux heures du matin, je présume que ce cher Cédric sera occupé avec cette chère Gwen jusque là :3

 

Sinon je ne me lasse pas de ton histoire, et attend une fois de plus la suite avec appétit.

 

ps: petit bug avec le correcteur orthographique de word : "Et puis son père qui semblait de près ou de loin impliqué de plusieurs affaires étranges, ont un certain meurtre… " --> je dirais plutôt à un certain meurtre ^^

Très bien écrit sinon, t'inquiètes.

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Woooops! Merci, c'est corrigé : "dont un certain meurtre"... Alala, quand on tape trop vite 9_9

  Edit: m***e, une deuxième faute dans la même phrase^^ : "impliqué dans plusieurs affaires" et pas "de plusieurs affaires"... Ralala, je vous jure. A vouloir trop bien faire, on y laisse des plumes^^ 

  Quand à ce que Cédric va faire de sa nuit... Il n'a rien voulu me dire, le petit cachotier^^ Les paris restent ouverts...

  Bien bien bien... Chapitre 5 en préparation! Normalement avant la fin de la semaine, voire plus tôt (faut dire que j'ai pas grand chose d'autre à faire... vive les vacances^^).

 

  Edit 2: Pompompom, chapitre 5 bien avancé. Prévu pour ce week end

  Edit 3: Y'aura du retard, malheurseusement... Mais je ne suis qu'un (jeune) homme, pas une machine à écrire, après tout :D. Je vais faire en sorte de pas trop traîner, hein!... Allez hop, chap 5 online^^  ;)

 

 

_______________________________________________________________________________________________________

 

 

Chapitre 5

 

 

 

      Val grogna.

      Le bip bip de son réveil matin le tira d’un demi sommeil comateux avant de s’évanouir dans le silence de la nuit. Jetant un coup d’œil sur le cadran ; le jeune homme grogna de plus belle.

      Deux heurs du mat’. Cédric et ses idées tordues, je te jure…

      Enfin bon. Il voulait en savoir plus. Alors il fallait se bouger.

      Sans faire trop de bruit, il se leva et passa un pantalon et un T-shirt, passa dans le salon et, pestant contre ses foutues godasses qui se faisaient un plaisir de demeurer introuvables, passa des tongs.

      Puis, sur la pointe des pieds, il sortit de la maison et donna un tour de clefs. Evitant de marcher sur les graviers dont le crissement éveillerait à coup sûr l’attention de ses parents, il longea la bâtisse et sauta souplement par-dessus le portillon.

      Il haussa un sourcil en apercevant la Golf noire de Cédric, nonchalamment arrêtée devant le portail du « Manoir ».

      Il n’y avait aucune lumière dans l’impasse. Le seul éclairage était celui de la lune et de la zone industrielle un peu plus loin. Autant dire que ce soir là, avec son ciel tâché de nuages épars, l’obscurité régnait en maître sur la banlieue. Pourtant, Cédric alluma ses phares au moment même où Val apparaissait au beau milieu de la chaussée.

      Ebloui, il mit une main en barrage devant ses yeux et avança jusqu’à la voiture. La portière gauche, s’ouvrit, et Val s’engouffra dans le véhicule.      

      - Pile à l’heure, l’accueillit jovialement son voisin, l’accent provençal en bandoulière.

      - Ouais. Mais, tes parents, ils disent rien ? fit Val en désignant la voiture.

      - Murs insonorisés, double vitrage et volets en bois épais de cinq centimètres, répliqua Cédric.

      - Pratique pour les virées nocturnes.

      - Et pour plein d’autres choses, aussi. Bon, on y va ?

      - C’est toi qu’a le volant, grogna Val en s’étirant. Et d’ailleurs, où est ce qu’on va ?

      Cédric sourit et démarra doucement. Le moteur gronda tandis qu’ils s’élançaient sur l’impasse. 

      - Trouver des réponses à tes questions.

      Chouette. Mais ça ne lui disait toujours pas où ils allaient.

 

      Cédric remonta en direction de la ville, passa devant Leader Price et le Stade Léo Lagrange, pour finalement aller garer sa voiture sur la place Piquemal, juste à côté du Parc Haussmann. 

      - Quoi, fit Val, tu m’emmènes à la Fac en pleine nuit ?

      - Non, répondit l’autre en coupant le contact. Allez sors, je te montre.

      Ils s’extirpèrent donc de la Golf et, Cédric, au lieu de se diriger vers la Fac comme Val l’avait cru, prit la direction inverse.

      Bien entendu, la rue était déserte à cette heure de la nuit. Les grillons donnaient de la voix dans le parc, et la lueur blafarde de réverbères éclairait les trottoirs.

      On se croirait dans un vrai film policier, nota intérieurement Valentin. Encore un peu et j’aurais les boules…

      Les deux garçons longèrent le parc en silence, traversèrent la rue et se retrouvèrent aux abords du parking de la Jarre.

      - Heu… fit Val. Juste au cas où, je tiens à te rappeler que l’endroit n’est pas très sûr…

      Enfin, c’est ce qui se disait. Il paraissait que des bandes traînaient dans la partie souterraine du parking et s’en prenaient à ceux qui avaient l’imprudence de rentrer sur leur territoire.

      - Mais non. T’inquiètes pas.

      Que je ne m’inquiète pas. Bon. Pas de problème. Val haussa les épaules et suivit son voisin. Si ça tournait mal, ils pourraient toujours partir en courant.

     Ils approchèrent donc du parking, d’où une musique rythmée s’échappait avec insistance. De faibles néons projetaient leurs feux blanchâtres sur deux voitures et une dizaine d’individus qui parlaient à haute voix, avec un accent caractéristique.

      - Génial, grogna Val comme pour lui-même. Une bande.

      - Pas de panique, fit Cédric, sûr de lui. Ils ne sont pas du bon côté.

      Du « bon » côté ? Et qu’y avait il dans la partie du parking souterrain où l’emmenait Cédric ? Val ne voyait vraiment pas comment on répondrait à ses questions en l’emmenant dans un parking. Enfin bon, maintenant qu’il y était…

      Les deux véhicules et leurs propriétaires se situaient à droite de l’escalier qui menait au niveau supérieur du parking, en face du Collège Férié. Cédric traîna discrètement Valentin à gauche de l’escalier, les faisant louvoyer entre les ombres et les colonnes de bétons.

      Il s’arrêta soudain, derrière l’une de ces colonnes. Elle portait le numéro d’emplacement 53.

      - J’imagine que tu te souviens, chuchota Cédric, parvenant à peine à percer le vacarme de la bande, d’une agression qui a eu lieu ici même il y a un peu plus de trois ans déjà. Une jeune femme seule, attaquée dans le parking à la nuit tombée.

      - Ouais… Les journaux s’étaient pas tellement attardés dessus, se souvint Val, mais ça me revient. Et quel rapport avec ton père ?

      - Ouais, une seconde, hein.

      - Bordel de… Qu’est ce que tu fous ?

      Le grand blond dégingandé avait agrippé le revêtement plastique de la colonne et s’échinait à tirer dessus tout en restant caché. Heureusement, la musique couvrait ses bruits. Bientôt, un pan entier de revêtement se détacha du pilier de béton, à environ un mètre du sol. Cédric fit signe à son voisin de se pencher, désignant quelque chose du doigt sur le béton mis à nu.

      Val s’exécuta, et fronça les sourcils. Quatre longues et larges marques prenaient naissance à l’angle du pilier et s’étendaient sur une bonne dizaine de centimètres, parfaitement parallèles entre elles. Il releva violemment la tête.

      - Qu’est ce que… ?

      - Hé ! fit une voix.

      Cédric jura et remit vite le revêtement à sa place. Un type arborant une casquette et un survêtement avait surgi de derrière l’escalier, et regardait dans leur direction.

      - Hé, les mecs ! V’nez voir, y a du people ! interpella-t-il ses collègues à l’autre bout du parking.

      - Qu’est ce qu’on fait ? demanda inutilement Val, qui connaissait déjà la réponse.

      - A ton avis ?

      Sans attendre l’arrivée des renforts de la bande, ils s’élancèrent vers la sortie, passant à côté de la racaille éberluée qui les regarda passer, la bouche entrouverte sur une expression muette d’incompréhension.

      - Hé, rev’nez par là, la con d’ta race ! Tapettes ! lança-t-il à leur dos qui disparaissaient déjà dans la pénombre.

      Ils coururent sans s’arrêter jusqu’à la Golf, se jetèrent dedans et reprirent leur souffle. Nerveusement, Val éclata de rire, bientôt rejoint par Cédric qui fit démarrer sa voiture.

      - Sacrée course, pas vrai ? dit il en bouclant sa ceinture. Bon, on continue.

      Val s’arrêta de rire.

      - On quoi ? Et si tu m’expliquais déjà ces traces ?

      - Un peu de patience.

      De la patience ? Bordel, Val trouvait déjà ça pas mal de le suivre dans ce parking, alors qu’allait falloir de plus ? Résigné à en savoir le plus possible, il se tut et laissa son voisin conduire en paix.

      Les choses prenaient une tournure des plus étranges. Cédric jouait au type mystérieux, mais il fallait avouer qu’il y avait quelque chose de dérangeant dans tous ces faits. Son père était censé être un expert judiciaire, et pourtant il était intervenu à deux reprises dans des affaires sur lesquelles il n’aurait jamais s’intéresser : meurtre atroce et une dégradation de monument. Quel lien y avait il entre les deux ? Et que signifiaient ces traces, ces… griffures, sur le pilier du parking ? Valentin ne savait plus que penser. Il s’était aventuré dans des eaux trop troubles pour lui.

 

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Gabriel était libre.

      Enfin libre. Il avait attendu tellement de temps, enfermé dans un néant vide de couleurs, de sons, de sens. Dans une cage dont il ne pouvait s’échapper.

      Et pourtant, aujourd’hui, il était libre.

      Il flottait loin, loin au dessus de la ville et de ses lumières artificielles. Elle était beaucoup plus étendue que dans son souvenir, et il avait beaucoup de mal à la reconnaître. C’était à peine si le versant du Malmont, désormais couvert d’habitations toutes plus laides les unes que les autres, éveillait en lui le moindre souvenir.

      Tant de choses avaient changé. Mais pas lui. Et eux non plus.

      Il les sentait toujours, ses frères, ses sœurs. Sa perception englobait la ville entière, et il les sentait plus nombreux que jamais. Pourtant, elle n’était pas à leurs pieds.

      Il faudrait vite y remédier. Mais Gabriel se doutait que ce serait moins facile qu’autrefois.

      Les choses avaient changé, beaucoup changé, et cela aussi il le sentait clairement. Ce n’était pas seulement l’air, empuanti par ces véhicules bruyants. Ce n’était pas seulement l’eau, polluée. Ce n’était pas seulement la terre, sèche et infertile, malmenée par les hommes et leur technologie.  Le monde, dans son entier, dans tout ce qu’il avait de bon et de mauvais, avait changé. Et Gabriel ne pouvait plus que s’y adapter.

      Il dériva lentement dans les cieux, retournant vers sa prison. Il sentait qu’un de ses frères l’y attendait. Il revint donc à sa geôle, sa prison tant haïe.

      C’était un homme, un jeune homme dans la force de l’âge. Parfait, c’était tout ce dont il avait besoin. Ils étaient plus faciles à posséder.

      Rassemblant ses forces trop longtemps restées en sommeil, il se jeta sur son frère et entreprit de s’installer en lui.

      Un long cri de surprise et de douleur déchira la nuit. Ce fut le premier d’une longue série.

 

 

      Joachim se releva, la tête pulsant d’une douleur sourde. Il se regarda les bras, les mains, les jambes, examina ses vêtements. Tâta son visage et ses cheveux.

      Non. Il n’était pas Joachim. Il ne l’avait jamais été.

      Je suis Joachim ! hurlait une petite voix dans sa tête.

      Son corps se raidit comme il appelait à lui le pouvoir. Il leva les bras, les enveloppa d’énergie brute et sombre.

      - Non. Tu es Joachim.

      Détendant les bras, il libéra son pouvoir devant lui. La langue d’énergie traversa la bande grise (une route, lui apprit la petite voix intérieure de Joachim) et percuta le tronc d’un arbre. Rongé jusqu’au dernier copeau, le bois céda et l’arbre s’affaissa en travers de la… chaussée dans un concert de craquements.

      - Non, répéta-t-il. Je suis Gabriel.

     Un crissement retentit, long et strident. Gabriel tourna son nouveau corps vers l’origine de ce bruit, et vit deux ronds de lumière foncer sur l’arbre.

      C’est une voiture, fit Joachim. Une belle voiture, en plus. Une Golf…

      Ca ne signifiait rien pour Gabriel. Tout ce qu’il savait et voulait savoir, c’est comment s’en servir. Joachim lui fournit inconsciemment tous les détails.

      La voiture pila et son conducteur donna un coup de volant. Finalement, le véhicule termina sa course au milieu de la route, arrêté à un mètre de l’arbre.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

 

      - Merde !

      Cédric et Val virent l’arbre s’écrouler en même temps. Cédric enfonça le frein, puis tira rapidement le frein à main et donna un coup de volant à gauche. La voiture dérapa et glissa sur une vingtaine de mètres, avant de s’arrêter, presque parallèle au tronc.

      - C’est quoi ce merdier ? jura Val, salement secoué.

      Cédric ne répondit pas. Son regard était rivé sur un point devant lui. Val le suivit.

      Un homme de forte carrure, aux cheveux longs et au bouc bien taillé, engoncé dans des vêtements noirs de marque, se tenait sous les feux des phares.

      - C’est pas bon du tout, grogna Cédric avant de jurer en provençal.

      Putain. Val se demanda dans quoi il avait bien pu mettre les pieds. Décidément, les ennuis semblaient suivre Cédric à la trace.

      Celui-ci enleva le frein à main et passa la première.

      - Accroches toi.

      Et merde. 

 

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  Bonsoir, m'sieurs dames...

  Ce petit message pour vous informer que la chapitre 6 a été entamé, et sera mis en ligne... heu, avant jeudi prochain, j'espère  ;D

  Bref...! Si vous avez des commentaires, positifs ou surtout négatifs, n'hésitez pas. Je veux savoir ce qui ne va pas, ce qui pourrait être amélioré, ce qu'il faut à tout prix changer... Ca m'aide à progresser.

  Bien sûr si c'est le contexte de l'histoire ou encore son sujet qui vous déplait, je ne peux rien pour vous, cela va de soit :D

  Ceci étant dit, passons à la suite: bonsoir et à la prochaine!

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Enorme défaut dans tes textes : il n'y a pas assez de dragons !

Non je déconne :P

C'est bien écrit, pas d'effet de style inutule alourdissant la lecture, et le rythme est captivant.

 

Une petite faute de frappe que j'ai détecté : "par-dessus de le portillon."

 

Sinon, j'ai hâte de voir ce que ette rencontre fortuite au beau milieu de la nuit va donner =)

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  • 3 weeks later...

* Tousse, tousse *

  Y'aurait pas un peu de poussière par ici? Nan?

  Bon. Quoi qu'il en soit, merci d'avoir noté ces erreurs (corrigées), et concernant les dragons... Hum, on ne sait jamais :D

  Comment? J'ai du retard? Ouais, et même beaucoup de retard... Désolé. Je n'avais pas fini mon chapitre avant la fermeture du forum, et je ne l'ai toujours pas fini depuis (qui a dit fainéant?)! Mais je vais m'y remettre, hein, no soucis.

  Ce ne sera certes pas pour tout de suite, sauf miracle, mais ça devrait sortir courant de la semaine prochaine, pour ceux que ça intéresse.

  Sur ce... Bonne soirée messieurs dames. 

 

  Edit: Allez hop, je l'ai fini, ce chapitre 6. Je ne suis pas totalement satisfait, mais si besoin est je ferais des retouches... Enfin bref, la voilà  :D

 

_______________________________________________________________________________

 

 

Chapitre 6

 

 

 

 

      Tout s’enchaîna très vite.

       Cédric démarra en trombe, droit devant.

       - Qu’est ce que tu fous, il est…

       Val n’eut pas le temps de terminer sa phrase. La Golf tressauta en quittant la chaussée et fonça droit sur le type. Scotché à son siège par l’embardée, Val assista alors à quelque chose qui allait changer sa vie.

      Au dernier moment, l’homme en noir leva une main et, comme contenue par une force invisible, la voiture changea brusquement de direction.

      Il y eut comme un instant de flottement, soudain. Le temps sembla se ralentir et, à travers le pare brise et la vitre de la portière, l’homme les dévisagea pendant ce qui sembla être une éternité pour Val. Les deux pupilles d’un bleu sombre se fixèrent sur lui, et le jeune homme se sentit… comme dépouillé. Il avait l’impression d’être disséqué, mis à nu par un simple regard.

      Puis, le temps reprit son cours en même temps que la Golf de Cédric. Le véhicule manqua sa proie d’un bon mètre et remonta brusquement sur la chaussée. Cédric jeta un regard dans le rétro, et accéléra, direction Draguignan.

      L’imitant, Val se retourna pour regarder à travers la vitre arrière. L’homme avait déplacé sa grande carcasse au milieu de la route, et levé les bras à l’horizontale, de part et d’autre de son torse. A la lueur de feux arrière de la voiture, Val regarda, effaré, l’arbre écrasé sur la route s’élever lentement dans les airs, et se stabiliser au dessus de l’homme.

      - Cédriiiiic…

      - J’ai vu !

      La voiture fit une nouvelle embardée, et Val se retrouva de nouveau collé à son siège. A combien allaient ils ? Le tableau de bord indiquait 80km/h.

      - Qu’est ce que c’est que ce bordel ?!

      - C’est pas le moment !

      Val jeta un nouveau regard en arrière. La silhouette sombre du type disparaissait au loin. Mais…

      Où était passé l’arbre ?

      Dans un grand fracas, la grande forme sombre du végétal s’écrasa sur la route, à un cheveu de la voiture. Quelques branches fouettèrent violemment la vitre, mais le véhicule s’éloignait déjà à toute vitesse.

      Ils repassèrent devant l’hôpital, grillèrent successivement deux feux rouges, puis se retrouvèrent bientôt en centre ville, où Cédric réduisit sa vitesse en conséquence. 

      - Pas trop secoué ? fit le fils Altier. Ca ne s’est pas exactement passé comme prévu…

      La remarque lâchée sur un ton anodin fit sortir Val de sa torpeur. Sa grogne reprenant le dessus, il lâcha :

      - Oh, tu veux parler de l’arbre qui tombe au milieu de la route ? A moins que ce ne soit la partie où on nous le jette sur la tête ? J’avoue que je m’attendais à tout, sauf à ça. Et où est ce qu’on va maintenant, hein ?

      Cédric sourit.

      - On rentre. Il y a deux trois trucs dont on doit discuter.

      - Sans blague !

      Le sourire s’élargit, fendant en deux le visage du grand blond.

      - Alors ? Tu crois au surnaturel, maintenant ?

      - Oh, la ferme, grogna Val en se renfonçant dans son siège, les bras croisés.

      Il avait encore du mal à réaliser ce qui s’était passé. La seule certitude qu’il avait, c’était que Cédric semblait en savoir long sur le sujet. Du moins, il en donnait l’impression. Quoi qu’il en était, Val avait hâte d’entendre les « deux trois trucs » que son voisin avait à lui dire. Toute cette histoire allait le rendre insomniaque, ou totalement fou.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Gabriel regarda partir la voiture avec ses nouveaux yeux.

      Quel dommage que, emprisonné dans cette enveloppe charnelle, il n’avait plus la possibilité de s’envoler. Il se serait volontiers lancé à la poursuite des deux garçons pour les faire regretter d’avoir même pensé à le blesser. Mais, comme il était privé de ses ailes immatérielles et qu’il ne savait pas de quoi son corps était capable, il s’en était abstenu.

      Avec un peu de chance, ils n’avaient pas bien distingué son visage. De toute façon, il pourrait toujours changer de corps si la situation l’exigeait. Et leurs visages à eux étaient gravés dans sa mémoire.

      Les traquer l’amuserait sûrement beaucoup. L’être humain était si semblable à du gibier, affolé et terrifié, que s’en devenait tout bonnement divin de lui donner la chasse. Sentir la peur de ses proies et s’en repaître autant que de leur chair, voilà qui avait longtemps manqué à Gabriel.

      Cependant… Quelque chose l’intriguait. Etait il d’usage que l’on cherche à écraser les responsables d’accident ? Probablement pas. 

      Joachim lui apprit qu’il n’était en effet plus d’usage de passer à tabac les responsables de méfaits. D’ailleurs, même la peine de mort avait finie par être abolie. Dommage.

      Pourquoi ces jeunes crétins avaient ils voulus lui rouler dessus, dans ce cas ? Il ne lui fallut pas longtemps pour trouver une réponse satisfaisante. Ils étaient déjà sur ces traces.

      Gabriel se sentit légèrement insulté en repensant à l’âge des garçons. On aurait au mois pu lui envoyer des chasseurs dignes de ce nom.

      Oh, ça ne tardera pas, le rassura intérieurement Joachim. Ces deux rigolos n’avaient rien de vrais chasseurs. Il était sans doute tombé par hasard sur des novices. Mais la véritable partie de chasse n’avait pas encore commencé.

      Tant mieux, songea Gabriel. Ca lui laissait sûrement un peu de temps.

      Ses yeux parcourant la campagne environnante, il s’arrêta sur les points lumineux de la ville. Un sourire étira lentement ses lèvres.

      - Allons faire un tour, susurra-t-il comme pour lui même. J’ai quelques décennies à rattraper.

      Attirées par le vacarme, de nombreuses silhouettes s’affichaient derrière leurs rideaux, en cherchant l’origine. Gabriel avisa un sentier et disparu dans les ombres entre deux propriétés.

      Libre !

 

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Quand Cédric tira le frein à main, dans la cour du Manoir, Valentin n’avait toujours pas rouvert la bouche. Il ne disait toujours rien quand il ouvrit la portière et sortit en titubant du véhicule, le visage fermé.

      Haussant un sourcil, Cédric sortit à son tour.

      - Val…

      Le jeune homme leva une main.

      - Non… Non, chuchota-t-il, puis, se reprenant. Non, ça ne peut pas être possible. Je vais aller me coucher, et quand je me réveillerai demain, je me rendrais compte que tout cela n’est qu’un rêve… Juste un rêve.

      - Oh, va dormir. Mais je te garanti que rien n’aura changé.

      Valentin lui jeta un regard effrayé.

      - Ca ne peut pas être vrai. Ca n’est pas… réel.

      - Et tu n’as encore rien vu.

      Il se détourna, commença à marcher en direction du portail. Se mit à courir, détala jusque chez lui, plus loin dans l’impasse. Il était convaincu que rien de tout cela n’était réel. En toute logique, il devait rêver. Le meurtre, le dolmen, les griffures au parking, le type étrange et l’arbre projeté dans leur direction… Il rêvait. Un songe long et pénible, un cauchemar. Il n’avait jamais eu qu’une seule solution pour se sortir des cauchemars : s’allonger et fermer les yeux. Et c’est ce qu’il allait faire. Trouver son lit, s’y allonger et fermer les yeux. Quand il se réveillerait, tout serait normal. Il serait de nouveau Valentin Roman, le rat de bibliothèque, le faible, l’intello. Mais ce serait mieux que rien.

 

 

      Cédric regarda Val détaler sans demander son reste, haussa les épaules et referma le portail d’un clic sur la télécommande qui lui faisait office de porte clef. Il s’était plus ou moins attendu à ce genre de réaction. Il réglerait tout ça très prochainement.

      Dans l’immédiat, autre chose le préoccupait. Qui était ce type à l’aura ténébreuse et perturbante ? Si près du dolmen, dans de pareilles circonstances, il avait de bonnes raisons d’être inquiet. Hum… Comment expliquer ça à son père ? Il ne se faisait pas d’illusions, il savait exactement comment travaillait son géniteur, et quelles méthodes il utilisait. Grâce aux traces de pneus et aux bruits de moteur que les riverains avaient sans doute entendus, il serait aisé de remonter jusqu’à une voiture comme sa Golf… Jean Altier aurait immanquablement des soupçons.

      Cédric poussa un soupir, et opta finalement pour une version trafiquée de la vérité. Il rentrait de chez sa copine quand il était tombé sur ce cinglé. Par chance, celle-ci habitait justement en dehors de Draguignan, juste dans la bonne direction. Et, si Jean voulait pousser plus loin –sait on jamais-, Cédric avait effectivement passé une partie de la nuit chez elle… Il avait donc un alibi assez solide, et qu’il avait eu le temps de travailler.

      - Moui, ça devrait aller, jugea-t-il à voix haute avant d’entrer dans le Manoir. 

      Par réflexe, il jeta un coup d’œil à sa montre, histoire de savoir à quelle heure il allait réveiller ses parents…

      Trois heures moins le quart, hein ? Décidément, il n’aurait pas beaucoup dormi cette nuit.   

 

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Ouaw, je viens juste de finir ta fic et c'est vraiment bien! je t'assure, ça accroche bien, on vit vraiment l'histoire et le scénario me met l'eau à la bouche! J'ai hâte de savoir ce qui se passe réellement et ce qui va se passer!

J'aime beaucoup Val, le héros, je pense que c'est le genre type de perso qui va évoluer comme un dingue^^ je trouve ça plutôt cool;) En tout cas bonne continuation, et post nous vite la suite!

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Yop! Merci pour vos comm' ça a le don de me booster  :D

  Merci également de noter toutes les fautes qui m'échappent (faut toujours qu'y ai un truc qui foire, je vais finir par quitter Word pour une bonne vieille feuille de papier... Quoique, vu mon écriture  :P)

  Voilà, enfin j'aimerais signaler que j'ai tout juste commencé le septième chapitre, donc encore un peu de patience, ça ne devrait pas tarder (sauf manque de motivation et/ou d'inspiration^^).

  Merci encore et à bientôt!

 

  Edit: Nous y voilà. Chapitre 7 en ligne. Bonne lecture.

 

 

___________________________________________________________________________________

 

 

 

Chapitre 7

 

 

 

      - Il a quoi ?

      Réveillés en pleine nuit par le patron, Hervé et Jacky étaient arrivé en trombe au bureau dès six heures, alors qu’ils auraient du continuer leurs recherches.

      Quelle ne fut pas leur surprise en avisant, debout derrière le fauteuil de Jean Altier, le fils de celui-ci. Sur quoi, on leur annonça que le gamin avait prétendument localisé leur cible.

      Jacky avait un air sceptique. Hervé n’en revenait pas.

      - Je crois que je suis tombé sur votre proie, répéta Cédric Altier à la place de son père.

      - Hum, fit Hervé. Pas de conclusion hâtive, hein ? Pourquoi le crois tu ?

      - Je rentrais de chez une… amie, et ma route me faisait passer à côté du dolmen, cette nuit, quand un arbre écrasé en plein milieu de la route m’a fait m’arrêter. Un type était là, au milieu du champ. Il dégageait une aura sombre assez éloquente. J’ai essayé de le renverser, mais il a détourné la voiture et j’ai pris la fuite. Oh, il a aussi utilisé un sort pour me lancer l’arbre dessus. D’ailleurs, si vous vous dépêchez, vous pourrez peut être sentir sa signature sur les lieux.

      Un « bip » strident résonna dans l’enceinte du bureau. Jacky leva un doigt en guise d’excuse et sortit son PDA de son blouson. Quelques clicks plus tard, il leva la tête avec une grimace à l’intention de son coéquipier.

      - Les gars sont sur place, Hervé. Et ils ont bien l’impression que c’était Gabriel. La signature ne trompe pas.

      Hervé se retourna vers le patron, l’air contrit. En réalité, une flopée d’injures s’échappait de ses pensées.

      - Bien, dit il avec un signe de tête en direction du patron. Je crois qu’il ne nous reste plus qu’à aller voir ça…

      - Attendez, les stoppa Altier. Cédric…

      Le patron tendit une feuille blanche et un crayon à son fils. Celui-ci hocha la tête et ferma les yeux, la feuille posée à plat sur le bureau et le crayon dans une main. Hervé sentit l’afflux de pouvoir, très léger, envahir le garçon. Soudain, les yeux fermés, celui-ci se mit à faire bouger sa main à toute vitesse sur la feuille de papier. Le crayon émit un grattement qui troubla le silence régnant dans le bureau.

      Hervé haussa un sourcil. Il savait que certains étaient capables de reproduire avec exactitude un souvenir sous forme d’illusion, ou de dessins. C’était une capacité très recherchée chez les chasseurs, mais assez rare. Décidément, la famille Altier avait des gènes de qualité…

      - Voilà, lâcha enfin Cédric avec une moue en ouvrant les yeux. C’est son hôte.

      Jacky s’empara de la feuille et regarda le dessin avant de le donner à son comparse. Hervé haussa à nouveau un sourcil en constatant la qualité de l’œuvre ? C’aurait pu être une photographie en noir et blanc. L’homme qui abritait leur proie était grand, assez corpulent. Cheveux longs et sombres, barbiche sombre, visage carré, nez droit, pommettes hautes.

      - Joli coup de crayon… murmura Hervé en repassant le dessin à Jacky. On va comparer ça avec nos bases de données.

      - Oh, j’allais oublier, lança Cédric en se rappelant un détail. Je ne sais pas si c’est important, mais il a les yeux bleus.

      - C’est noté.

      Les deux partenaires échangèrent un regard, hochèrent la tête et se tournèrent une dernière fois vers les Altier.

      - Bien, cette fois ci nous y allons. Au revoir, monsieur. Et merci à toi, Cédric.

      Sur ces mots, ils se retirèrent du bureau.

 

 

      - Gabriel ? dit lentement Cédric. Qui est Gabriel ?

      Jean Altier regarda son fils par-dessus son épaule. Le gamin ne laissait aucun détail lui échapper. Bien.

      - Tu n’as pas besoin d’en savoir plus pour le moment, Cédric, répondit il avec sérieux. Tu es déjà beaucoup trop impliqué à mon goût.

      - Je sais, papa. Mais…

    - Dois je te rappeler qu’il a vu ton visage ? Il ne t’oubliera pas de sitôt, et qui sait de quoi il est capable…

      - Justement. J’ai pas le droit de savoir ce qui risque de me tomber dessus ? Que je sois préparé, au moins…

      Altier eu un rictus nerveux. Il fit pivoter son fauteuil pour faire face à sa descendance.

      - Préparé ? Ecoutes moi bien, fils, tu ne seras jamais préparé face à une menace de ce niveau. Cette histoire nécessite déjà toutes les forces dont je dispose, et il y a de nombreux risques. Si encore tu étais un chasseur expérimenté, mais là… Je suis désolé, mais je ne peux pas te dire grand-chose. A cause de l’A.C et à cause de ta mère. Tous les deux me tueraient si je leur disais que j’ai mêlé mon garçon à l’opération. Alors fais moi plaisir et reste sagement en dehors de ça. Ce que tu peux faire de mieux, c’est m’appeler si jamais tu croises de nouveau l’hôte, possédé ou non.

      Il ficha son regard dans celui de son fils.

      - Compris ?

      - … Compris.

      Cédric réfléchissait à toute vitesse. Lui se sentait très concerné par toute cette histoire. C’est lui qui avait trouvé la Gardienne dont le sang avait été utilisé pour libérer « Gabriel ». Lui encore qui avait localisé par hasard l’hôte de l’esprit. Et maintenant, après avoir fait un dessin pour les hommes de son père, il ne pouvait se résoudre à laisser tomber. C’était dangereux, certes, mais c’était également une occasion en or de faire ses preuves. Et puis, tant que son père ne le mêlait pas intentionnellement à l’opération… On ne pourrait rien lui reprocher.

      - Bien. Rentre, maintenant. Je sais que tu as cours ce matin.

      Cédric hocha la tête et se dirigea vers la porte. Il sortit, et quand il fut sur le point de la refermer, son père lança, avec une ironie teintée de sérieux :

      - Et, Cédric… Je te connais très bien. Si ça peut te dissuader de faire des bêtises, Gabriel est un Nocturne Supérieur de rang 5.

      Le jeune homme laissa passer un temps, le visage impassible, puis referma la porte. En s’éloignant, cependant, sa bouche se tordit en une grimace.

      - Un NS5… grommela-t-il en sortant du bâtiment. Ca existe encore, des saloperies pareilles ?

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Toc, toc, toc !

      - Hmmmmm, grogna Val, réveillé par les coups frappés à sa porte.

      C’était déjà l’heure de se lever ? Ce n’est pas qu’il avait vraiment envie, mais bon… Il n’avait jamais manqué un cours de son plein gré, tout au long de sa scolarisation. Tous ne pouvaient pas en dire autant.

      Toc, toc, toc !

      Trois coups plus appuyés.

      - Valentin ! Il faudrait que tu te lèves, maintenant !

      Qui… ? Isabelle ? Pourquoi se donnait elle la peine de le réveiller. D’ordinaire elle n’accordait aucune attention aux horaires de son frère.

      - J’arrive, fit il (toc, toc, toc !). Puis, plus fort : J’arrive !

      Il se leva d’un bloc, secoua la tête et marcha jusqu’à la porte, qu’il ouvrit en grand. Isabelle avait encore la main en l’air, prête à frapper trois nouveaux coups bien sentis sur le battant.

      - Hé bien, tu as mis le temps, ironisa-t-elle avec un petit sourire narquois. Habille toi, les parents veulent que tu prennes au moins le dîner.

      - Le… Pardon ?

      Il se rendit compte que les lumières étaient allumées et que sa sœur était habillée et maquillée. D’un volte-face, il bondit jusqu’à sa commode et avisa le réveil.

      19h30, Lun, indiquait le cadran de l’appareil. Au dessus, on pouvait lire : 01/10/09.

      - Bordel !

      - Ca, tu peux le dire, rit Isabelle, qui l’avait suivit. Tu n’aurais pas un peu forcé sur les comprimés… ?

      Son regard vert glissa ostensiblement vers le tube de somnifères qui trônait près du réveil, à la place d’honneur. Il était vide aux trois quarts.

      - Oh, la ferme… répliqua Valentin, complètement perdu. Bon… Dis leur que j’arrive…

      Il se gratta la tête, tentant de remettre de l’ordre dans ses idées, tandis qu’Isabelle repassait la porte.

      - Tu sais… commença-t-elle.

      - Ouais ?

      - Cette histoire de meurtre à vraiment l’air de te rendre minable… Tu devrais voir un psy, conclut elle avec un sourire bienveillant.

      Elle retira sa tête juste à temps pour éviter le coussin que lui envoya son frère.

      Val se rassit sur son lit et se prit la tête entre les mains.

      Faire le point.

      Sa tête lui faisait un mal de chien. Il se leva, s’étira et entreprit de se vêtir convenablement. Cela ne prit pas longtemps, vu qu’il avait dormi en jean. Il passa un T-shirt quelconque, chaussa ses pantoufles et jeta un coup d’œil dans le miroir pour avoir une vue d’ensemble.

      Je tire vraiment une sale gueule.

      Puis, son regard fut soudain attiré par le reflet d’un objet, sous son lit. Il se baissa, balada sa main et saisit le truc, qu’il ramena à son visage.

      Une bouteille de vodka. Vide.

      Voilà pour le mal de tête. Alcool fort et somnifère, un cocktail bien sympathique. Il avait de la chance de s’en sortir avec une simple gueule de bois. Il supportait assez mal l’alcool, et se contentait de petites doses comme remontant. Il regarda encore la bouteille vide, qu’il se rappela avoir acheté quelques jours plus tôt.

      - Hé ben, mon vieux, grogna-t-il en se redressant, joli score !

      Une chance qu’Isabelle n’ait pas vu la bouteille, ni senti son haleine qui devait être digne d’un crocodile.

      Il passa au salon, lâcha la bouteille vide dans la poubelle, puis se rinça la bouche au robinet de la salle de bain, avant de se rincer également le visage. Une fois débarbouillé, il fixa son reflet dans le miroir en face de lui.

      Ce qu’il vit ne lui plut pas outre mesure et il se détourna avec un reniflement de dégoût. Restait l’épreuve du dîner. Bah, de toute évidence, sa famille ignorait qu’il était sorti hier soir, et il avait l’excuse du meurtre, et donc des somnifères…

      Le meurtre. Sorti hier soir. La soudaine lumière que ces pensées créèrent lui éclaira l’esprit, chassant la brume que l’alcool et les médicaments avaient installée dans sa tête. Les souvenirs le heurtèrent avec violence.

      Malheureusement –ou par chance, il ne savait pas trop, il devrait remettre son introspection à plus tard.

      Prenant son courage à deux mains, et tentant de ne pas prêter attention au forgeron qui martelait ses tempes, il grimpa au premier. Une accueillante odeur de chili con carne et de riz lui mit l’eau à la bouche. Son estomac lui rappelait à point nommé qu’il n’avait rien ingurgité depuis la veille au soir.

      Il se traîna donc jusqu’à la salle à manger, porté par l’odeur alléchante et les gargouillements de son ventre.

      Comme de bien entendu, la télévision était allumée, et les informations régionales défilaient en boucle sur l’écran. Val n’y jeta qu’un bref coup d’œil, priant pour qu’on ne parle pas d’arbre arraché et précipité au milieu de la route.

      - Ah, le voilà ! Alors mon grand, comment va ?

      Valentin se figea. Il n’avait plus entendu cette voix depuis bien longtemps. Il pivota en direction de la table.

      - Oncle Michel. Salut.

      Sans dire un mot de plus, il s’assit et commença à manger.

      - Alors, continua Michel Roman, comment ça se passe en ce moment ? On dirait que tu n’as pas la forme.

      - Je me débrouille.

      Evidemment, il avait fallu que ses parents invitent Michel juste quand Val avait dormi toute la journée. Ca sentait le coup monté. D’ordinaire, il s’arrangeait toujours pour être absent quand son oncle venait à la maison. Mais on ne lui avait pas laissé le choix, cette fois ci… Le tonton n’avait pas changé. Toujours le même physique athlétique, toujours la même coupe de cheveux et les mêmes yeux verts égrillards. A peine s’il avait de petites rides au coin des lèvres.

      Val continua à manger en silence, aussi vite que possible. Michel changea intelligemment de sujet et passa à Isabelle et sa rentrée au lycée. Un quart d’heure plus tard, Valentin se leva.

      - Je vais me coucher.

      - D’accord, fiston, acquiesça son père. Et essaye de te réveiller demain… Au fait.

      Thierry Roman se leva à son tour, et fit un aller retour entre une table basse et son fils. Il lui tendit un paquet de polycopiés.

      - Des amis à toi sont passés ce soir, et ils t’ont laissés ça. C’est gentil de leur part.

      Val survola les cours de la journée.

      - Ouais. Bon, j’y vais. Au revoir, oncle Michel.

      - Qu’est ce que tu comptes faire, cette année ? le retint ce dernier.

      - Comme l’année dernière : rien.

      - Bon… Tu sais que tu peux…

      - C’est non, trancha le jeune homme.

      - D’accord. Si jamais tu changes d’avis…

      Michel haussa les épaules en signe d’impuissance, et lui adressa un salut de la main. Valentin le lui rendit distraitement et redescendit « chez lui ». 

      Sur le chemin de son lit, il feuilleta le petit paquet de feuilles que ses « amis » lui avaient photocopiées. Après un instant, il sourit en reconnaissant l’écriture ronde et soignée de Gwen. Il y avait encore des gens qui pensaient à lui.

      Il jeta le tas de polycopiés avant de se jeter lui-même sur son matelas. Ce faisant, un bruissement de papier qui s’envole le fit se retourner sur le dos avec un grognement. Un petit carré de papier s’était échappé du tas et avait voleté jusqu’au pied du lit.

      Val se pencha sur le côté, ramassa le papier et lut ce qu’il y avait d’écrit.

      « Bien dormi ? J’espère que tu as profité de ces seize heures de sommeil. J’ai photocopié tout ce que j’ai cris aujourd’hui, en espérant que ça te suffira. A demain »

      Signé Gwen. Il y avait une petite flèche qui pointait vers la droite en bas du message. Il retourna le papier.

      Une écriture sèche et appliquée. Indéniablement masculine.

      «  Je suis sûr que tu auras la pèche dès demain. Ne me fais pas mentir. »

      Signé Cédric.

      Val roula le papier en boule et le jeta devant lui au petit bonheur la chance, puis se laissa retomber sur son oreiller.

      Mais il va me lâcher, oui ou merde ? 

 

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   B'jour b'jour...

   Ce petit message pour informer mes lecteurs que le chapitre 8 risque d'être retardé. He oui, avec mon entrée prochaine en Fac de Droit (youpi...^^), je sens venir une nouvelle année de travail... Yataaa, comme dirait l'autre! Sans compter qu'en ce moment, j'écris un peu trois choses en même temps. Pas évident donc d'en privilégier une sans délaisser les autres, ce qui ralentit donc mon "rythme de parution"  ;D

   Mais bon. Je n'abandonne pas G.I.S, loin de là^^. Et je continue de fréquenter cet excellent fofo.

   On verra ce que l'avenir me réserve. Quoi qu'il en soit, à bientôt pour le chapitre 8. 

 

  PS: Et pour couronner le tout, mon PC a décidé de me gratifier de charmants redémarrages sauvages accompagnés de plantages divers et de floppées d'écran bleus. Je n'exclus donc pas le risque d'un plantage définitif, en attendant un PC tout neuf^^. Ah, les joies de l'informatiques...

 

  Edit : Bon, chapitre 8 entamé. Je ne peux pas promettre de le publier avant la fin de la semaine, mais sait-on jamais... ^_^

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  • 4 weeks later...

Gné! Ca faisait un bout de temps, nan? Mais bon, il a fini par arriver, ce chapitre 8(j'entends déjà les "ah ben m**de alors, il s'est pas préssé^^). Voilà, une bonne chose de faîte... Mais, ça veut dire que maintenant il faut que je bosse sur le 9?! Nyaaaaaaah.

  Ah oui : Bonne lecture ;)

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Chapitre 8

 

 

 

 

      Mardi matin, Valentin fut à la Faculté avec dix minutes d’avance. Aux aguets, il réussit à coincer son chargé de TD et à se faire violence pour lui expliquer les raisons de son absence au TD de la veille. Il avait conscience que ses arguments étaient plutôt discutable, mais le mot « meurtre » semblait être une sorte de passe partout. L’homme acquiesça gentiment et lui demanda de faire en sorte que cela ne se reproduise pas trop souvent.

      - Je ferais mon possible, répondit Val en le laissant rejoindre son cours.

      Bien. Ca, c’était fait. Maintenant…

      - Val !

      Il fit volte face. Gwen arrivait en trottinant.

      - Alors, on fait l’école buissonnière ? dit elle en lui faisant la bise.

      - Carrément. Et puis c’est pas si mal de se faire photocopier les cours…

      - C’était exceptionnel, remarqua-t-elle en levant un doigt manucuré. Faudrait pas que ça te donne de mauvaises habitudes.

      - Oh, ne t’inquiètes pas… Cédric n’est pas avec toi ?

      - Nan. Pourquoi ?

      - Heu, rien, esquiva Val. Je me demandais, c’est tout…

      Elle fronça les sourcils et lui frappa gentiment l’épaule.

      - Hé, on est pas mariés, hein !

      - Je pourrais toujours servir de damoiseau d’honneur…

      Nouveau coup sur l’épaule, puis ils se rendirent dans l’amphithéâtre. Val salua les habitués, puis esquiva un coup d’épaule de la part de Tristan Gruget.

      - La forme, Trist ? lança-t-il à la cantonade.

      - …

      La brute lui lança un regard plein de mépris et rejoignit sa place, au fond de l’amphi. Gwen lui jeta un regard dégoûté, puis se tourna vers son ami.

      - Hé ben, ça a l’air de t’avoir requinqué, cette journée de sommeil. Tu devrais dormir plus souvent.

      - Qu’est ce que tu crois que je fais en cours ? plaisanta Valentin.

      Ils s’installèrent sur la gauche de la salle, au milieu de la petite cinquantaine d’étudiants de troisième année. Programme des trois heures suivantes : Droit pénal. Val grogna intérieurement, si ça n’avait pas été une de ses matières préférées, il aurait eu tôt fait de dodeliner de la tête. Sa migraine médicamento-alcoolique était tenace… C’était comme si un abruti lui vrillait les tempes au marteau piqueur. Mais bon, il survivrait.

      Il s’étonnait lui-même de sa résistance. Il s’était attendu à vomir tripes et boyaux pendant plusieurs heures, à rester au lit trois jours, au moins. Mais non, il était debout et s’apprêtait à noircir des pages de sombres algorithmes juridiques. C’était tout de même mieux… ou presque.

      Le professeur arriva sur ces entrefaites et s’installa derrière son large bureau, avant de s’éclaircir la voix. Cédric le suivit de peu et s’assit à côté de Gwen. Ils échangèrent un baiser et le jeune homme adressa un salut et un sourire en coin à son voisin.

      Aussitôt, le professeur commença son long monologue. Valentin se pencha sur son bloc de feuilles, un stylo à la main.

      La matinée allait être longue.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Gabriel s’orienta dans la ville grâce aux souvenirs de son hôte. Il s’émerveillait à chaque pas de ce qu’était devenu sa chère cité. Il avait sans nul doute passé trop de temps enfermé en dehors du temps.

      Quelle drôle d’époque. Les chevaux et calèches avaient été remplacé par des… voitures, monstres de fer de tailles et formes variées, qui crachaient sans discontinuer cet affreux gaz. De curieux pylônes surmontés de globes plus ou moins translucides éclairaient la ville la nuit, et s’éteignaient tout seuls le jour venu. Il s’agissait d’électricité, lui expliqua Joachim du plus profond de son âme, et de lampadaires.

      Au niveau vestimentaire, c’était loin de ce qu’il avait connu. A quelques siècles, précisément.  Les femmes comment les jeunes filles exhibaient de plus en plus leur corps ; les vêtements étaient plus légers. Ce qui aurait réussi à faire jurer un prêtre de son époque, mais Gabriel considérait cela avec un sourire appréciateur. Mais, ci certains s’habillaient avec un semblant de « classe » comme on disait désormais (et d’ailleurs, Joachim veillait à rester « classe » en toute situation, Gabriel était content de l’avoir choisi pour hôte), d’autres manifestaient un mauvais goût affligeant. Plusieurs fois, Gabriel retroussa ses lèvres en un rictus moqueur, ou renifla pour marquer son dégoût. Les gens s’offusquaient, bien sûr, mais en croisant son regard bleu pénétrant (merci Joachim), ils préféraient s’éloigner en maugréant.

      Drôle d’époque. Si la situation du peuple s’était grandement améliorée – aujourd’hui, presque tout le monde savait lire et écrire, on tombait toujours sur quelques pauvres hères malmenés par la vie, le bras tendu attendant l’aumône.

      Mais certaines choses ne changeaient pas. Joachim en était la preuve vivante, au même titre que les frères qui emplissaient ses souvenirs. Ils étaient toujours là, présents et cachés à la fois. Mélangés au commun des mortels. Il en croisa plusieurs au cours de ses pérégrinations, échangeant sourires et regards de connivences, voire poignées de main avec ceux qui connaissaient bien son hôte. Ils n’avaient remarqué aucune différence, ou s’étaient bien gardés de le dire. Tant mieux.

      A cause de sa récente installation dans Joachim, Gabriel n’avait pas encore récupéré toute sa force. Le corps du jeune homme n’était pas habitué à autant d’énergie. Joachim n’était pas né avec le don, et il faudrait à Gabriel quelques jours avant de pouvoir libérer ses pouvoirs sans abîmer irrémédiablement ce fragile métabolisme. Il avait déjà pris un gros risque en utilisant son don dès la première nuit. Cependant, un initié pourrait deviner le changement qui s’opérait en Joachim. C’est pourquoi Gabriel veillait à laisser son pouvoir en sommeil. Et puis, son hôte était suffisamment puissant physiquement pour lui permettre de se défendre. Cela ne valait certes pas sa véritable enveloppe charnelle, mais, se dit il en faisant rouler ses muscles sous sa veste noire, c’était très bien pour l’instant. Quasiment aucun humain ne pouvait se mesurer à lui, quant aux frères… Gabriel ajoutait à la jeunesse et la force de Joachim sa propre expérience.

      Mais pour le moment, il n’avait pas l’intention de se battre. Il jouerait le jeu, resterait Joachim aux yeux des autres, se familiariserait avec ce monde, familier et nouveau à la fois. Puis il passerait à l’action.

      Et si on essayait, encore une fois, de l’arrêter, eh bien… il attendait ces empêcheurs de tourner en rond de pied ferme. On avait tué sa dernière Gardienne, mais il avait des comptes à régler avec l’ensemble de ses petits compagnons d’armes. S’il y avait bien une chose que Gabriel détestait par-dessus tout, c’était de se faire baiser de cette façon. Et comme il était particulièrement rancunier et vindicatif ; et que, pour couronner le tout, il n’avait jamais pu supporter ces gens, il se vengerait volontiers sur la dernière génération.

      - Maudits mages, grogna-t-il au détour d’une ruelle.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      En troisième année, les horaires étaient largement plus souples qu’en première. C’est pourquoi, arrivé la mi-journée, les élèves disposaient d’un jour et demi de libre. Val se disait qu’il pourrait en profiter pour dormir un peu. C’était avant qu’il se rappelle que Gwen partait travailler dès midi et ne finissait que tard le soir… Il était certain que Cédric allait lui sauter dessus, et il avait le fâcheux pressentiment qu’il aurait du mal à avaler ce que son voisin pourrait bien lui dire…

      Bien évidemment, ça ne manqua pas.

      - Val…

       Cédric lui avait posé une main sur l’épaule alors que Gwen s’éloignait vers sa voiture.

      - Ouais, ouais… Faut qu’on discute, c’est ça ?

      - Tout juste. T’as des sous ?

      Valentin acquiesça, et ils allèrent s’acheter un sandwich sur la Place Claude Gay, avant de faire demi tour pour prendre la voiture de Cédric.

      - Où est ce qu’on va, cette fois ? s’enquit Val en se retenant de donner un féroce coup de dents dans son panini.

      - Dans un coin tranquille.

      Val haussa les épaules. Ils auraient très bien pu discuter en ville ; il savait par expérience que la plupart des gens se fichaient bien de ce que disent les passants, et pour un peu qu’ils se montrent discrets, ils auraient facilement pu rester hors de portée des curieux.

      Cependant, après réflexion, il se dit que s’ils devaient parler de ce qu’ils avaient vu ces derniers jours (et qui était bel et bien réel, au grand dam du jeune homme), ils seraient en effet plus tranquilles dans un endroit moins fréquenté. 

      Cédric prit la route du Malmont, la colline verdoyante qui surplombait Draguignan à l’est.  L’ascension prit une bonne vingtaine de minutes, puis ils arrivèrent sur un parking désert. Cédric gara la voiture, se saisit de son sandwich, puis sortit, suivit de Val. D’un pas leste, ils se dirigèrent vers la table d’orientation.

      Le demi cercle de marbre poli, sur lequel étaient gravés points cardinaux et nom de villes qu’on pouvait trouver en suivant la direction indiquée, brillait sous les feux du soleil à son zénith. Val s’assit dessus, les pieds dans le vide, contemplant la vue imprenable qu’ils avaient de Draguignan depuis ce petit promontoire. N’en pouvant plus, il attaqua son déjeuner avec appétit.

      C’est également la bouche pleine que Cédric commença :

      - Tu te souviens de ce que je t’ais demandé la dernière fois ?

      - Quoi ? Si je croyais au surnaturel ?

      Hochement de tête.

      - Alors ?

      - Ben, fit Val en déglutissant. Avec tout ce qui s’est passé, j’avoue avoir de sérieux doutes sur ma santé mentale.

      Cédric rit de bon cœur.

      - C’est sûr que c’est assez difficile à avaler pour… quelqu’un comme toi.

      - Qu’est ce que tu veux dire ?

      Cédric ferma les yeux un instant, comme s’il réfléchissait à la réponse.

      - Bon, il n’y a personne dans un rayon de deux cent mètres. J’espère que tu es bien assis ?

      - Ca va. Mais comment… ?

      - Alors dis moi, enchaîna Cédric en regardant droit devant lui, comment tu décrirais ce que tu as vu dimanche.

      Valentin tourna la question dans tout les sens, fit de même avec sa réponse, puis lâcha, après avoir avalé une bouchée de panini :

      - Complètement dingue. Impossible, irréel. Et je devrais pouvoir continuer longtemps sur ce registre.

      - Et pourtant…

      Cédric leva une main et l’ouvrit devant Valentin. Un petit miroir rectangulaire s’y trouvait. Val jeta un regard interrogateur à son voisin, puis comme celui-ci ne disait rien, s’en empara.

      - Qu’est ce que c’est ? s’enquit il en tournant le petit objet dans tous les sens.

      - Les gens ont souvent besoin d’une petite démonstration, fit Cédric en brandissant un autre miroir. Reste là.

      Et il s’éloigna, laissant Valentin contempler son peu glorieux reflet dans le miroir. Cédric s’éloignait à grands pas, et disparut bientôt, hors de vue dans la végétation de la colline.

      Toujours assis sur la table d’orientation, Val jeta un nouveau coup d’œil dans le miroir et releva les yeux.

      - Valentin !

      Il sursauta. La voix de Cédric était très proche. Il ne l’avait pas entendu revenir. Il se retourna.

      Personne. Il baissa les yeux.

      Personne.

      - Val, le miroir !

       Le jeune homme haussa les sourcils d’étonnement et ramassa l’outil qu’il avait posé sur le marbre froid.

      - Tire pas cette tronche ! s’esclaffa son reflet – enfin, le reflet de Cédric.

      - Comment c’est possible ?

     Val retourna le miroir, cherchant le moindre bout de technologie qui aurait pu expliquer ça. Mais, bien sûr, il ne trouva rien.

      - Diablerie, grogna-t-il.

      - Reste poli, je te prie, sourit Cédric. Je reviens.

      L’image de Cédric se brouilla, comme si un voile de brume passait devant lui, puis Val regarda de nouveau son reflet ébahi. Il s’aperçut d’ailleurs qu’il avait la bouche grande ouverte. Il la referma.

      - Pratique, non ? lança Cédric.

      - … Il doit y avoir une explication.

      - Quoi, ça ne te suffit pas ? Bon, alors ouvre bien tes yeux.

      Cédric rangea son propre petit miroir et leva la main droite, paume vers le ciel. Ses paupières se baissèrent, et de petites lumières naquirent au bout de ses doigts tendus. Sous le regard incrédule de Valentin, les lueurs se regroupèrent au centre de la paume de Cédric, et il y eu un petit éclair blanc.

      Val détourna les yeux, et quand il revint à Cédric, une sphère de flammes blanches, grosse comme le poing, flottait à un doigt de la main de celui-ci.

      - Wow, fut tout ce qui sortit de la gorge de Val.

      - Flammes magiques, expliqua Cédric avec sérieux. Attention.

      Il arma le bras et lança la sphère blanche au sol, où elle explosa dans un « pouf », répandant un nuage de poussière alentours. Un petit impact rond et noir apparut.  Cédric s’empressa de le recouvrir de terre à l’aide de quelques coups de pieds bien placés.

      - C’est bon ? Tu es convaincu, maintenant ?

      - Bordel, jura Val. Tu vas me dire que tu es…

      - Magicien ? Et comment !

      - Et dire que je te prenais pour un type tout à fait normal… Un magicien, hein ? Tu avoueras que c’est très difficile à avaler.

      En même temps, ça expliquait comment ils s’étaient retrouvés poursuivis par un arbre énorme flottant à plusieurs mètres du sol. Et sans doute cela expliquerait il le reste. Mais pourquoi Cédric lui montrait il tout ça ? Pourquoi l’entraînait il dans ces histoires ?

      Il ne réussit qu’à dire :

      - Je croyais que les magiciens n’existaient que dans les contes de fées.

      - Il va falloir se mettre au goût du jour, vieux.

      Il tendit les bras vers Draguignan, dans un geste très emphatique et classieux. Ce mec avait du faire du théâtre.

      - Bienvenue dans le monde réel.

      Val grimaça.

      - J’aurais jamais cru qu’on me dirait ça à moi, railla-t-il.

 

 

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  Merci pour ce comm'! Je ne suis moi même pas entièrement satisfait par ce chapitre, mais bon... Dur dur de se mettre dans la peau de quelqu'un à qui on révèle l'existence de choses insoupçonnées... J'ai du mal avec ça, mais bon^^ Au pire je pourrais réctifier le tir plus tard si je trouve mieux!

  Bref! Ce petit message pour vous dire que le chapitre 9 devrait être entamé sous peu, et également pour vous faire patienter, en quelque sorte. Voici donc, après maintes pérégrinations sur l'Internet, des images de mes héros.

 

    Pour commencer, voici Hervé : http://img134.imageshack.us/img134/3291/hervnt4.jpg

    Et son partenaire, Jacky: http://img503.imageshack.us/img503/6209/jackyoc3.jpg

 

    Place ensuite au pauvre petit Valentin^^: http://img503.imageshack.us/img503/470/valgh1.jpg

    Puis à son étrange magicien de voisin, Cédric: http://img134.imageshack.us/img134/143/cdricov7.jpg

    N'oublions pas cette chère Gwen: http://img134.imageshack.us/img134/7737/gwenre5.jpg

 

    Et, pour finir, voici (faute de mieux, grrr) un dessin de l'hôte de Gabriel, Joachim: http://img503.imageshack.us/img503/8514/joachimsd9.jpg

 

    Voilà! J'aimerais terminer en remerciant le site de prêt à porter sur lequel j'ai pu chiper ces quelques photos... Qui a dit qu'ils ne servaient qu'à faire du shopping?  ;D

  En espérant que ça vous plaise (et que les liens ne foirent pas :P) ; sur ce à la prochaine.

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  • 2 weeks later...

  Heu... houlà, ça fait un moment que je ne suis plus passé par là :S

  Ce chapitre 9 tarde à venir, je vous prie de m'en excuser... Je suis un peu à cours d'inspiration. Enfin, disons que j'ai les idées, mais que je galère un peu à tout mettre en place. 'm'énerve, ça  :D

  Bon, quoi qu'il en soit, je vais tâcher de m'y remettre assez vite, histoire de pas laisser des semaines de poussière s'accumuler par ici.

  Voilà, ce sera tout pour cette petite annonce. Donc, hé bien à la prochaine avec, espérons le, le chapitre 9 ^^

 

  Edit : Vous ne le croirez jamais, mais j'ai presque terminé ce fichu chapitre :D Encore quelques finitions, et ce sera prêt... Disons pour demain ou après demain dans le pire des cas.

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Bon, bon, bon... Nous y voilà. Ce chapitre 9 qui, si j'étais du genre à donner un titre à mes chapitres, se serait appelé "révélations et décisions"(ou un truc du genre :P) m'aura bien embêté... Et m'embète toujours d'ailleurs. J'ai eu 'achement de mal avec lui, je sais pas, je trouve ça pas très... crédible (en même temps, qui trouverais ce genre de truc crédible? xD). Jsuis pas très doué pour l'expression des sentiments, et j'ai un peu de mal avec mes dialogues... 'fin bon, j'ai fait de mon mieux!

  A vous de juger (c'est pas le titre d'une émission, ça? )... Dites moi ce que vous en pensez.

 

_________________________________________________________________________________________________

 

Chapitre 9

 

 

 

 

      - Et je peux savoir ce qui te pousse à me montrer… tes talents ?

      Cédric sourit.

      - J’allais y venir. Tu as coupé ma belle réplique : « tu te demandes sûrement pourquoi je te révèle tout ça »… Bref, je vais répondre à ta question par une autre question : tu te souviens de l’été dernier ?

      Ben voyons… « Souviens toi l’été dernier ». Ce mec devait vraiment avoir suivi une formation théâtrale. N’eut été le miroir, et la boule de feu, Valentin se serait crû pris au piège de la caméra cachée. Mais il acquiesça.

      - La fête de la musique. Et c’était il y a deux ans.

      Ce fût au tour de Cédric d’acquiescer. Et Val de fermer les yeux un instant pour se remémorer cette nuit du 21 juin 2007.

      Flash back, comme dirait l’autre. 

       

      S’il s’en souvenait ? Un peu qu’il s’en souvenait ! Il se rappelait très bien cette chaude soirée durant laquelle, déambulant dans les rues baignées de musique de Draguignan, il s’était finalement retrouvé dans les jardins au pied de la Tour de l’Horloge. Un groupe de hard rock, en pleine représentation, fit vibrer de ses riffs endiablés jusqu’au fond de ses entrailles. Il s’assit là où il y avait de la place – c'est-à-dire tout au fond – et profita du concert.

      Enfin, tenta de profiter du concert… En plein milieu d’un assourdissant solo, il avait vu du coin de l’œil une silhouette familière courir en direction de la vieille ville, suivie de près par quatre types louches et vraisemblablement pas d’humeur très conciliante. Agissant par pur réflexe, en dépit du bon sens qui lui criait de rester à sa place et de laisser son postérieur prendre racine jusqu’à la fin du concert, il se leva et trottina à leur suite.

      Comme il s’en doutait, c’était bien Cédric Altier qui courait en tête de l’incongru convoi. Et il semblait plutôt pressé d’échapper à ses poursuivants. Piquant un sprint, Val arriva sur la bande au moment où ses membres, quatre grands échalas habillés façon « fashion », acculaient Cédric dans une impasse.

      Brutalement, il rentra dans le plus proche alors que celui-ci se retournait pour voir qui arrivait. Son coude brandit percuta violemment les côte du type, suivit de près par le reste de sa masse, l’envoyant s’écraser sur le mur à côté de Cédric. Profitant de l’effet de surprise, il bondit sur un deuxième gars et lui envoya son pied dans l’entrejambe, directement suivit d’une manchette à la nuque.

      Fin de l’effet de surprise. Les autres n’hésitèrent pas et le plus épais des deux lui sauta dessus en ricanant, tandis que le dernier se rapprochait de Cédric.

      Faisant jouer de vieux réflexes, Val esquiva un premier coup de poing, en bloqua un deuxième, puis plongea la tête la première alors que son adversaire ouvrait sa garde pour lui administrer une gauche fracassante. Le ceinturant, Val lui flanqua un coup de boule dans le plexus, suivit d’un coup de genou là où ça faisait mal. Pour faire bonne mesure, il improvisa en relevant brusquement sa tête. Le bruit que fit la mâchoire du type en rencontrant le sommet de son crâne fût très satisfaisant.

      - Au dernier, grogna-t-il. A moins que tu préfères te casser.

      - Va te faire foutre !

      Et le grand type, qui devait être à peine plus jeune que Cédric et Valentin, lui asséna un coup de pied circulaire trop rapide. Beaucoup trop. Par chance, il encaissa le coup à l’épaule et ne fit que heurter douloureusement le mur. Se reprenant, il se baissa pour éviter le coup qui suivit, profitant de sa petite taille, puis pivota sur son pied d’appui une première fois. Comme il l’avait estimé, du fait de sa taille et de son manque d’entraînement, son pied rencontra le bras gauche de son adversaire et le fit tituber. Il pivota alors une deuxième fois sur son appui, cette fois fi en effectuant un petit saut pour se projeter à la bonne hauteur. Son coup de pied ne fut cette fois ci pas circulaire, mais se détendit comme un serpent et heurta la tête du « fashion » agressif avec une force accrue par la rotation.

      Le dernier type s’écroula enfin. L’adrénaline refluant, il se rendit vraiment compte de ce qu’il avait fait. Hochant la tête à l’adresse de Cédric, il lui conseilla de déguerpir et appliqua lui-même son conseil en détalant à grands pas. 

 

      - J’ai jamais eu autant la trouille de toute ma vie, nota il comme pour lui-même en revenant à l’instant présent. Enfin, si on enlève la semaine dernière.

      - Et moi, fit Cédric, j’ai eu comme un déclic.

      - Pardon ?

      - Je vais t’expliquer… Tu te souviens de ces traces que je t’ai montrées sur le parking ? Elles ont été faites par ce que nous, les magiciens, appelons un Nocturne. Le genre de petite saloperie – tu vois un gobelin, en plus petit ? – qu’on n’apprécie pas de croiser la nuit. Griffes acérées, solide appétit, bref… Et il y en existe plein d’autres sortes, plus ou moins dangereuse. Depuis des temps très éloignés, les magiciens protègent les hommes de ces créatures. Au départ, ils agissaient seuls, puis en groupe, et très récemment, à la fin de la guerre, ils ont été rattachés aux Ministères de l’Intérieur des différents Etats.

      - Attends deux secondes, l’interrompit Val qui n’en croyait pas ses oreilles. Tu es en train de me dire que le gouvernement sait pour les magiciens et ces… choses ?

      - Seul le Président, le premier ministre et le ministre concerné sont au courant. Mais oui, non seulement ils savent, mais ils chapeautent tout. Les magiciens ne sont plus réunis par guildes, ordres où petits groupes. Oh, la plupart ne travaillent pas directement pour l’Etat et se contente de mener une vie « normale » en aidant du mieux qu’ils peuvent. Mais nous sommes tous fédérés et inscrit dans les registres de l’Autorité Centrale du G.I.S.

      - Le jisse ?

      - Groupe d’Intervention Surnaturel… Je trouve ça un peu pompeux, mais ça définit bien le rôle des magiciens qui en font partie.

      - Okay, okay, fit Valentin en se récapitulant tout. Mais, bordel, quel rapport avec moi ? Pourquoi tu… 

      - Ca marche par binôme. Un magicien, comme moi, qui renvoie toutes les affreuses bébettes en enfer et s’occupe des mauvais sorts et autres, et un acolyte garde du corps qui s’occupe des humains récalcitrants et fait diversion. Tu me suis ?

      - Mais… pourquoi moi ?! Y’a des tas de types balaises qui courent les rues, et tu tombes sur un avorton qui ne pratique plus depuis cinq ans.

      - Je te l’ai dit, j’ai eu un déclic. Bon, je me suis un peu intéressé de plus près à toi après ça, et je suis convaincu que tu feras parfaitement l’affaire.

      Valentin se pinça la joue. Rien à faire, il ne semblait pas rêver.

      - C’est complètement délirant, lâcha-t-il.

      - Mais c’est la réalité !

      - Et si je refuse ?

      Cédric tiqua, réfléchit un instant et déclara :

       - Et bien je devrais tout raconter à mon père, qui me passera un savon bien senti, t’effacera la mémoire et te placera sous surveillance pendant quelques temps.

      - Ton père ?

      - Oui, mon père. Il se trouve qu’il dirige l’antenne départementale du G.I.S. Et il est sacrément à cheval sur les règlements.

      - Ca explique pas mal de choses… fit Val dans sa barbe, avant de demander : mais pourquoi devrait il me placer sous surveillance ?

      - J’imagine que tu te souviens de notre « rencontre » sur la route l’autre soir ?

      - L’arbre volant et le type bizarre ? Un peu, oui.

      - Bon. Sans rentrer dans les détails, ce mec est possédé et sacrément dangereux. Il n’est pas impossible qu’il cherche à nous retrouver à et nous mettre… en pièces.

      - Super ! On tombe toujours sur des psychopathes, avec toi ?

      Cédric ignora le sarcasme et poursuivit :

      - Je t’explique la situation. Soit tu décides de tout arrêter là, et on t’efface la mémoire. Auquel cas, même placé sous surveillance, notre ami pourrait trouver un moyen de mettre fin à tes jours d’une façon tout à fait horrible. Ou, dans le meilleur des cas, tu vivras pendant quelques temps avec la sensation d’être suivit et épié à longueur de journée, et tu retrouveras ta vie d’avant, morne et monotone. Soit tu acceptes mon offre, et dans ce cas non seulement tu seras mieux protégé, mieux entraîné, et plus à même de réagir en cas de danger, mais en plus je t’offre une perspective d’avenir insoupçonnée et plutôt pas mal payée. Sans compter que mon père ne me passera pas de savon pour m’être trompé sur mon choix de partenaire.

      - T’as une drôle de façon de tourner les choses… Mais c’est sûr que vu de ce côté-là, mon choix est tout désigné. Mais bon… En tant que garde du corps, il faudra que j’assure au niveau corps à corps, non ?

      - C’est justement pour ça que je t’ai choisi.

      - Bon, bon. Tu sais que j’ai arrêté le kempo il y a cinq ans. Tu sais aussi sûrement pourquoi. Alors trouve toi quelqu’un d’autre. Je n’ai aucune envie de me rappeler tout ça.

      - Val. Ca fait cinq ans, déjà. Il est temps de tourner la page. Et puis, ce n’était pas ta faute…

      - Qu’est ce que tu en sais ?

      - C’était un accident…

      - Qu’est ce que tu en sais ? s’emporta soudain Valentin, haussant brusquement le ton. Qu’est ce que tu en sais, bordel ? Il est mort parce que je ne voulais pas aller à cette compétition. Il est mort parce qu’il a insisté trop longtemps, et qu’ensuite il s’est dépêché sur la route parce que je l’avais retenu. Parce qu’à cause de moi, il a pris un virage beaucoup trop vite et s’est encastré dans un arbre ! Et tu sais ce qu’il ma dit juste avant de partir ? Les derniers mots qu’il m’a dit ? « Tu le regretteras » ! Et tu ne peux pas imaginer à quel point il avait raison !

      Il avait crié, les larmes lui montant rapidement aux yeux. Il s’essuya les yeux sur sa manche.

      - Merde ! jura-t-il. Je pensais pas que j’avais encore assez de larmes pour chialer.

      - Valentin… Crois bien que je comprends ta douleur, et elle est légitime. Mais regarde toi. Tu vis avec elle depuis cinq ans, et elle t’a ôté toute joie de vivre, toute ambition. Tu t’imagines que tu ne vaux rien, tu refuses d’aller de l’avant…

      - Oh, putain ! Je me fais psychanalyser par un magicien ! C’est trop fort !

     Et il éclata d’un rire nerveux. Ce fût au tour de Cédric de hausser la voix :

     - Merde, Val ! Grandis un peu ! Tu ne peux pas rester vautré dans ta peine toute ta vie. Tu vaux mieux que ça ! Ton frère est mort, et tu ne peux rien y changer. Te reprocher une culpabilité qui n’est même pas prouvée ne te sert plus à rien. Passe à autre chose. Construit toi un avenir ! Tu crois qu’il aurait voulu, lui, que tu finisses comme ça à cause de lui ? Que tu deviennes une loque ? Je te donne une chance qu’on n’offre pas deux fois dans une vie, une chance que très peu de personnes ont. Je te fais confiance. Et tu m’envoies chier parce que t’es pas assez grand pour surmonter ta douleur, vivre avec et devenir un homme ? T’es un foutu couillon, mon pote !

      La tirade avait laissé Val bouche bée. Il y avait tellement de vrai, là-dedans. Tellement de chose qu’on avait gentiment essayé de lui faire comprendre. Peut être avait il fallu qu’on lui remette les pendules à l’heure avec un peu plus de vigueur.

      Passer à autre chose. Ce que lui proposait Cédric, il n’avait jamais pensé que ça puisse lui arriver. Pas à lui, le pauvre type, la lopette. On lui servait ça sur un plateau d’argent, et il crachait dessus. Mauvaise attitude, mon pote. Cédric avait raison. S’il ne pouvait pas saisir cette chance là, il ne s’en sortirait jamais. Il risquait d’y laisser sa peau, et alors quoi ? Au moins il aurait fait quelque chose de sa vie, ou il aurait essayé. Et son frère, son bien aimé et regretté grand frère, aurait enfin une raison d’être fier de lui.

      C’était inespéré, à bien des égards. Une chance qu’il fallait saisir. Une chance qu’il allait saisir.

      Cédric devait avoir lu un changement sur son visage, car son regard s’était soudain fait moins dur. Il souriait.

      - On dirait que je t’ai convaincu, dit il.

      Val se redressa, et ficha un demi sourire convaincant et convaincu sur ses lèvres. Il lâcha :

      - Il était temps, nom de Dieu !

 

     

     

 

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  Ouais, enfin, je le sentais pas terrible dans l'ensemble... Mais si ça passe, ma foi^^ J'ai souvent des périodes défaitistes (ce qui tient à mon côté pessimiste), où j'ai toujours l'impression d'écrire de la m***e... ce qui fait que je suis très rarement satisfait de mon boulot.

   Pour l'explication de l'arrêt du kempo par Val, en fait, ça doit être le truc que j'ai trouvé le plus crédible xD. Je trouvais plutôt peu crédible la façon de Cédric d'amener les explications, et aussi la façon dont il remet Val dans le "droit chemin"... Mais bon, je sais qu'on a parfois besoin d'un grand (très grand) coup de pied au c*l pour se rendre compte de ses erreurs et passer à autre chose, donc au final... Au final, je me suis encore fais du mourron pour rien! Ben voyons, pour changer  :P

    Ah, et puis, ya aussi le flash back, dont j'ai conscience qu'il est assez choquant... Je présente le "héros" comme une lavette, un souffre douleur depuis 8 chapitre, et voilà qu'il se met à dérouiller quatres types dans une ruelle ! Mais bon, en fait, il était fait pour ça, ce flash back  :D J'essaye de donner un peu de profondeur aux persos en leur créant un passé, et même si je galère pas mal, le cas Valentin me satisfait. Avoue que ça aurait fait bizarre que d'un coup il se mette à être un pro du combat.

    Cela étant dit , je peux te confirmer que oui, les choses ne vont pas tarder à s'accélerer pour la fine équipe^^ J'espère ne pas trop traîner à sortir le prochain chapitre, mais quoi qu'il en soit, merci pour ton avis  ;)

     Bien, sur ce, à la prochaine!

 

 

  Edit: Yeow...! Ce petit édit pour signaler que j'ai écrit à peu près la moitié du chapitre 10... C'est donc pour bientôt, normalement^^

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  • 2 weeks later...

  Et hop! Voilà le Chapitre 10. Encore un petit chapitre de transition, comme le prochain, mais il faut bien mettre en place toutes les pièces du puzzle^^ Allez, bonne lecture les amis  ;)

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Chapitre 10

 

 

 

 

      Hervé Marin consulta sa montre. 13h30, pile à l’heure. Il sonna trois coups brefs, et attendit. Derrière lui, Jacky Monnati, son acolyte de toujours, affectait une attitude détendue tout en jetant des regards dans toutes les directions.

      En face d’eux, la maison, dissimulée dans les collines de pinèdes au sud de Draguignan. Ils avaient passés le portail, toujours ouvert, comme en défi aux malfaiteurs et autres cambrioleurs, et fais le tour du petit bassin pour que la voiture soit prête à repartir.

      La villa, énorme et d’un dénuement luxueux, était une véritable invite à la cambriole, comme Hervé en faisait la remarque chaque fois qu’il devait s’y rendre. Mais, comme il se savait très bien, il fallait être complètement inconscient pour s’y aventurer avec de mauvaises intentions. C’était une vieille blague qu’il partageait avec les occupants, mais cette fois, il ne se sentait pas vraiment d’humeur folasse. Le sujet était trop important pour faire manque de professionnalisme.

      - Détends toi, vieux, glissa-t-il inopinément à son compagnon. C’est juste une visite de routine.

      - Ouais, comme la dernière fois, grogna Jacky. Ca ne les a pas empêchés de nous sauter dessus quand on a voulu embarquer les suspects.

      - Oh, ça va. Tu as savaté quelques culs, j’ai entravé quelques mouvements et brûlé une ou deux trognes, et au final tout s’est bien passé. Ce n’est pas comme si ce n’était pas notre travail.

      - Ouais, ouais… Mais si cette fois je peux éviter de ramasser une beigne, ce serait pas plus mal.

      - Certes.

      Des bruits de verrous que l’on tourne brisèrent là la conversation. On finit enfin par leur ouvrir. Un grand jeune homme se tenait dans l’encadrement de la porte.

      - J’aurais dû me douter que ce serait vous…

      - Bonjour, Antoine. J’imagine que ton père est là.

      D’un geste de la tête, il les invita à entrer. Une fois à l’intérieur, il referma derrière eux. Puis, sans un mot, il se dirigea dans les entrailles de la colossale villa. Hervé et Jacky le suivirent.

      Il les mena sans détours jusqu’au bureau de son père. Aussi grande et dépouillée que la bâtisse, la pièce aux murs blancs et au sol de marbre n’était habillée que d’un mobilier purement fonctionnel : bureau en bois précieux, horloge, ordinateurs, cheminée, des photos de famille et quelques chaises pour les invités. Rien de plus. Pas de tableaux, de sculptures ou d’autres ornements. Le maître de maison avait un goût des plus particulier, et avait horreur du superflu et des démonstrations orgueilleuses de richesse. En même temps, la simple taille de la villa suffisait à mettre tout le monde d’accord : elle était une preuve amplement suffisante.

      Richard Ravinel ne daigna pas se lever de son fauteuil. Il se contenta de lever les yeux, et de faire pivoter son siège dans leur direction, s’arrachant à la contemplation silencieuse d’un écran d’ordinateur. Un sourire mutin naquit sur ses fines lèvres.

      - Marin et Monnati, lâcha-t-il en guise de salutation avant d’ajouter, comme à chaque fois : M&M. On ne m’avait pas dit que vous dirigiez les opérations.

      - Je doute que cela change quelque chose, monsieur. Mais pourtant, c’est bel et bien le cas.

      - J’imagine, sourit l’homme en se levant, avant de s’adresser à Jacky. Votre mâchoire va mieux ?

      - Certainement pas grâce à vos protégés, répliqua doucement ce dernier. Mais merci de vous en préoccuper.

      - C’est la moindre des choses, fit Ravinel en venant s’appuyer sur le rebord de son bureau, juste en face d’eux. Bien. Je suppose que vous avez avancé dans votre traque, sans quoi vous ne seriez pas ici.

      Tout de blanc vêtu, son grand corps musclé et souple figé dans une attitude de nonchalance, son visage émacié aux yeux d’un vert intense ; tout en Richard Ravinel évoquait un serpent blanc prêt à bondir sur sa proie. Il voulait savoir, et il voulait savoir tout de suite. Hervé n’était de toute façon pas en mesure de lui refuser cela.

      - Nous avons retrouvé la trace de Gabriel, acquiesça le magicien en sortant un papier plié de sa veste. Il a manqué de prudence, conformément à ce que nous avions prévu. Il ne lui faudra sans doute que peu de temps avant de s’adapter à notre époque, aussi je vous demanderais d’agir rapidement.

      Il tendit une copie du dessin de Cédric Altier à Ravinel.

      - Nous avons toutes les raisons de penser qu’il a préféré choisir un hôte plus… conforme à ses exigences. Le Groupe vous serait très reconnaissant si vous pouviez nous donner des renseignements sur cet homme.

      - Oui, c’est logique, pourquoi irait il… marmonna Ravinel en saisissant le dessin sans le regarder. Mais je ne comprends pas pourquoi vous venez me voir. Vos registres sont des plus complets, à ce qu’il me semble.

      - C’est exact, confirma Hervé. Nous les avons déjà consulté. Et il nous a semblé très opportuns de venir nous enquérir de quelques renseignements auprès de la famille de l’hôte.

      - De la…

      Son regard se durcit et se fixa enfin sur l’image que lui avait fourni l’agent du G.IS. Sa bouche se réduisit à un trait de colère et d’amertume mêlée.

      - Joachim.

      Antoine, qui était resté dans leur dos depuis le début, sursauta et lâcha un grognement. 

      - Joachim Ravinel, le fils d’un de vos cousins préférés, continua Hervé comme si on l’y avait invité. On estime qu’il a été possédé peu de temps après la libération de Gabriel.

      Richard Ravinel se redressa d’un bloc et fit le tour de son bureau, s’emparant de son téléphone. Un instant plus tard, il entra en liaison avec son interlocuteur.

      - Noah ? C’est Richard… Oui… Oui, écoutes, j’ai besoin de savoir où est ton fils… Oui… Je t’expliquerais plus tard… (Son regard perçant se tourna vers les agents qui attendaient patiemment) Tu ne l’as pas vu depuis la fin de la semaine dernière ?... Oui… Pas de nouvelles depuis… D’accord… Non, pas tout de suite. Ils sont ici. Je te rappelle juste après.

      Et il raccrocha. Sa main gauche monta à sa tempe et il se massa pensivement pendant un moment.

      - Les dates coïncident. Pourquoi a-t-il fallu que ce jeune sot aille jeter un coup d’œil au dolmen ? Et pourquoi celui-ci n’était il pas surveillé ?

      - Il l’était, rectifia Hervé. Mais Joachim se trouvait loin du dolmen quand il a été possédé. Et quand Gabriel a usé de ses pouvoirs, nos hommes ont accourus. Mais il s’était déjà envolé.

      - Je vois. Et en quoi puis-je vous être utile ?

      - C’est simple, monsieur Ravinel. Etant ce que vous êtes, il ne sera pas difficile pour vous de faire en sorte d’être au courant quand Joachim réapparaîtra, possédé ou pas. Nous ignorons encore ce que Gabriel a derrière la tête, mais quoi qu’il en soit, il reste très dangereux, aussi bien pour les humains que pour nous. Et peut être même pour vous. Si vous obtenez la moindre information sur l’endroit où il pourrait se trouver, contactez nous. Inutile de vous dire qu’il en va de la sécurité de Joachim, comme de celle du pays.

      - Oui, oui, fit Ravinel en hochant la tête. Je connais le numéro par cœur. Soyez assurés que nous coopérerons entièrement. Mais…

      Hervé et Jacky encouragèrent l’homme à continuer d’un regard interrogateur.

      - Soyez aussi certains qu’il y a de fortes chances pour que certains d’entre nous ne soient pas opposés au retour de Gabriel.

      - Nous en avons conscience, monsieur, assura Hervé. Malheureusement. Mais nous comptons également sur vous pour bien faire comprendre à tous vos frères que placer cette entité sous leur protection les placera définitivement sous le regard du Groupe. Et vous savez que monsieur Altier n’a jamais été particulièrement tolérant avec les menaces, de quelque nature qu’elles soient.

      S’autorisant un petit sourire, Hervé conclut :

       - Vous êtes l’Aîné de la région, Richard. Vous devez connaître chacun de ceux qui partagent des desseins semblables concernant Gabriel. Si vous ne pouvez pas y mettre bon ordre, personne ne le pourra.

      Autrement dit : aidez nous aussi de ce côté. Ravinel capta le message et hocha la tête.

      - Très bien, fit Hervé en s’inclinant légèrement. Sur ce, nous allons vous laisser. L’enquête continue. Merci pour votre coopération.

      Précédé d’Antoine Ravinel et suivit de Jacky, le mage rebroussa chemin jusqu’à l’entrée.

      - Au revoir et merci, lança-t-il au fils Ravinel avant de sortir. Et…

      - A la prochaine, gamin, compléta Jacky avec un petit salut de la main.

      Ils montèrent dans la voiture et Monnati prit le volant.

      - Voilà qui est fait, souffla Hervé. Et maintenant…

      - Il ne reste plus qu’à attendre, finit Jacky en s’engeant sur le chemin de terre qui menait à la nationale. Tout est en place.

 

 

 

 

*****

 

 

 

 

      Valentin courba le dos en pénétrant dans le manoir des Altiers, comme si l’immensité des lieux lui pesait littéralement sur les épaules. Le cou tendu, il poussa un petit sifflement en promenant son regard dans le hall d’entrée, qui aurait aussi bien pu servir de salle de banquet. Le vestibule était large, et se réduisait en un long couloir jalonné de portes qui filait probablement vers un salon tout aussi impressionnant. Sur la droite, Val devina une porte qui donnait sur la terrasse et la piscine. Deux escaliers disposés de part et d’autre du hall montaient en colimaçon jusqu’à l’étage.

      - Chouette baraque.

      La voix de Valentin résonna un instant dans l’espace entre les grands murs. Cédric ne répondit rien, probablement habitué à ce genre de remarque. Il était sûrement habitué à vivre dans une si grande maison. On s’habituait à tout.

      Enfin, ça restait à prouver.

      Cédric jeta un coup d’œil à sa montre. Il était deux heures.

      - Bon, mon père ne rentre pas du bureau avant cinq heures, on a peu de temps devant nous. Suis moi, on va dans ma chambre.

      Docilement, Val monta l’escalier de gauche à la suite du maître des lieux. En haut, le bruit de ses pas était étouffé dans une épaisse moquette couleur chair ; il avait bien fait de s’essuyer consciencieusement les pieds avant d’entrer.

      Cédric lui désigna du doigt la porte au bout du couloir en face d’eux, qui devait donner sur une pièce située juste au dessus du salon.

      - Là-bas, c’est la chambre de mes parents. Même moi je n’ai pas le droit d’entrer. On e peut pas la louper, mais évite quand même de te tromper de salle. Ma chambre est par là.

      Il fit volte face et entraîna val sur la gauche, dans un autre couloir. Ils passèrent devant une immense pièce ouverte qui n’avait pas l’air occupée, et une petite porte en bois noir.

      - La deuxième chambre d’ami, fit Cédric en passant devant la grande pièce, puis, devant la porte : le bureau de mon père.

      Ils montèrent un nouvel escalier en colimaçon. Là, pas de moquette, juste un parquet glissant qui recouvrait tout le sol du palier circulaire. Une porte à gauche, ouverte, laissait entrevoir une étagère chargée d’épais livre. Une porte à droite, fermée, résista à la poigne de Cédric.

      Deux ou trois jurons en provençal jaillirent avant que la porte n’accepte de pivoter sur ses gonds. Valentin le suivit dans sa chambre.

      La pièce était grande et divisée en plusieurs espaces : un pour la douche et les toilettes, un pour le lit et la commode, un pour le bureau, et un…

      - Wow… murmura Val en s’approchant du fond de la pièce, tout à gauche. C’est toi qui… ?

      - Oui.

      Il y avait là trois chevalets, qui soutenaient des toiles incroyablement belles. Qu’il s’agisse d’un paysage de Draguignan vu du Malmont à la tombée du jour, d’un portrait semblable à une photographie ou d’une toile représentant un édifice, tout était criant de réalisme, les couleurs étaient incroyablement harmonieuses. Comme, oui, comme s’il s’était trouvé devant une simple fenêtre, à contempler les modèles de ces peintures. De nombreuses autres toiles étaient posées un peu partout.

      - Mais… c’est magnifique ! Où as-tu… ?

      - Nulle part, répondit Cédric. C’est un don assez rare, mais pas mal d’autres magiciens vivants le partagent. Nous pouvons reproduire avec un souci extraordinaire du détail le moindre de nos souvenirs.

      - Nom de… souffla Val impressionné. Et tu n’as jamais pensé à faire une expo ?

      Cédric secoua la tête.

      - Ca nous est interdit, lâcha-t-il avant de réciter : « toute action, manifestation, ou objet résultant d’une activité magique doit être scrupuleusement cachée aux yeux des humains, ou détruite. » C’est le règlement.

      Il se tourna avec un air contrit vers son œuvre.

      - Mon père m’a dit que les autres n’usent de ce don que dans le cadre de leur travail – enfin, la plupart des autres ; mais je ne peux pas m’empêcher de peindre. C’est comme un besoin.

      Il ricana et alla farfouiller dans un placard.

      - Quand j’étais gosse, j’avais un carnet dans lequel je gribouillais le visage de chaque fille qui me plaisait. On peut dire que mon don était assez précoce, même si ce n’était que des esquisses au crayon. Mais… (Il extirpa une dizaine de toiles du placard) c’est une manie que j‘ai gardée. Tiens, regarde mon premier amour !

      Une magnifique jeune fille blonde lui lançait un regard bleu perçant depuis sa toile. Val s’attendait presque à la voir cligner des yeux. Il resta là, confondu par le talent de son ami et la beauté de la peinture.

      - Elle me dit vaguement quelque chose.

      - Y a des chances. Ah, ben voilà la dernière en date.

      Cédric reposa ses conquêtes dans le placard et alla prendre le portait disposé sur le premier chevalet en partant de la fenêtre.

      - Celle là, elle va sûrement te dire quelque chose.

     Val hoqueta presque de stupeur. Gwen le regardait avec son air mutin et son regard pétillant, ses cheveux flottant autour de sa tête comme une mer d’ébène ondulant.

      - Ouais, fit Val. Très réussi.

      Un bruit de pas montant de l’escalier attira soudain leur attention. Cédric replaça la toile là où il l’avait prise et alla jusqu’à la porte, Val sur les talons.

      - Francis ? Tu n’es pas au bureau avec papa ?

      Un homme à la taille fine et aux larges épaules monta sur le palier, ses cheveux grisonnant lui retombant sur le front comme un pâle rideau. De taille moyenne, il dégageait une aura de force tranquille qui se traduisait par une démarche souple de félin.

      Quand il aperçut Valentin, il marqua un arrêt, haussant un sourcil.

      - Oh, fit Cédric. Valentin, voici Francis, l’acolyte de mon père. Francis, voici Valentin.

      L’homme sursauta à la mention de son titre. Il dévisagea Val de haut en bas, l’air soudain intéressé, et lâcha :

      - C’est bien ce à quoi je pense ?

      - Ouais.

      - Bon. Et je suppose que tu veux en parler à ton père. Face à face.

      Cédric hocha la tête.

       - Pourquoi tu dis ça ?

       - Il a été appelé par… (Il hésita en jetant un coup d’œil à Val, puis haussa les épaules et reprit : ) par l’Autorité Centrale. Normalement, il ne devait monter que samedi pour la conférence, mais j’imagine qu’on veut quelques nouvelles de ce qui se passe ici bas.

      Nouvelle série de jurons provençaux.

      - Et il t’a laissé là ?

      - Il y a longtemps que ton père n’a plus vraiment besoin de mes services, rit Francis. Mais je suis encore capable de surveiller les affaires pendant son absence. Ainsi que toi et ta mère, et aussi la baraque. Je suis un peu l’homme à tout faire.

      Il rit un bon coup, sans aucune amertume.

      - Je vois, grogna Cédric. Alors on a encore une semaine pour se préparer.

      - Oui, fit Francis. Si jamais tu as besoin de mes services, tu sais où me trouver. Bonne journée.

      Val rendit machinalement son salut à l’homme qui redescendit l’escalier d’un pas léger.

      - Qu’est ce qu’il voulait dire par « ses services » ?

      - On verra ça plus tard, dit Cédric en allant chercher deux poufs dans un coin. Mets toi à l’aise, on a de quoi discuter.

      - Heu, okay. Mais de quoi… ?

      - Ben tiens ! Pour commencer on va essayer de faire en sorte que tu oublies toutes les conneries que les contes et les histoires t’ont fourrés dans le crâne. Après on fera une petite leçon d’histoire, et je pense qu’on finira par tout ce qui touche à la  théorie et la pratique. Autant dire qu’on en a pour quelques jours.

      - Chouette. On commence par quoi ? Loups-garous, gnomes, vampires…?

      Ce que Valentin considérait comme de l’humour fut visiblement pris très au sérieux par Cédric qui fit mine de réfléchir avant de lancer :

      - Les derniers loups-garous ont été exterminés en 1980, et les gnomes sont de belles petites saloperies, vicieuses à souhait. 

      Val tomba littéralement sur son pouf. Soulagé parce que Cédric n’avait pas fait mention de la dernière catégorie, il souffla :

      - Bon. Au moins, les vampires…

      - Les vampires ? C’est un autre problème. Et plutôt d’actualité. Commençons par ça, tant qu’à faire.

      Ca n’avait pas l’air d’être une blague. Valentin fronça les sourcils.

      Les vampires existaient, hein ?

      Et merde.

       

 

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