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La Toile du Dragon


Red Hood
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Avant-propos.

 

Je mets en grandes parenthèses les Chroniques de BelleFond, car depuis un bon moment j'avais dans l'idée d'adapter en récit tout un pan de mon expérience de rôliste. Il y a quelques années, j'ai joué l'une des meilleures campagnes qu'il m'ait été donné de voir : La Toile du Dragon. Cette dernière prend place dans l'univers de Shadowrun, et est un canon non-officiel, rédigé par un certain ShadowCat (je lui rends hommage, il le mérite). Et l'idée c'était de développer tout ça du point de vue de mon personnage de l'époque. En ajoutant en sus des parties tout le background et les réflexions qui gravitent autour de la trame principale.

 

Pour résumé l'univers de Shadowrun, il faut imaginer un futur anachronique au notre, où la chronologie diffère à partir des années 90. Un événement majeur a lieu en 2011, avec le réveil de la magie. S'accompagnant de l'apparition de créatures issus du folklore fantastique ou voir carrément de mutations humaines. Ainsi les elfes, orks, nains, pixies et autres dragons font maintenant partie du décor. A cela s'ajoute une évolution technologique démentielle, engendrée par les guerres de corporations, toujours plus puissantes. Se révélant presque aussi puissantes que des États. C'est un univers dense et complexe dont on peut retrouver la chronologie événementielle ici : http://shadowrun.fr/wiki/Historique

 

Ça, c'était pour le fond.

Dans la forme, je souhaite utiliser un style bien plus académique que ce que j'ai pu faire pour LGME. Ce dernier était un bac à sale fabuleux, mais en contre-partie souffrait d'un manque cruel de fluidité. Ou même de profondeur. Là, je souhaite présenter quelque chose de construit, où la narration offrira suffisamment d'éléments d'information pour déchiffrer le background.

 

En espérant que cela vous plaise.

On débute maintenant.

 

 

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La Toile du Dragon

 

Chapitre 1

Le Testament

 

¤¤¤

 

 

1

 

 

Idriss fait la gueule ces derniers temps. Depuis dix jours. Il me reproche de ne pas l'avoir consulté. Que j'étais pas obligé. J'aurais pu faire sans. Voir même carrément tout arrêter. Il me dit que ces derniers temps il réfléchit à l'avenir et que dans les conditions actuelles il n'arrive pas à se projeter. Il a eu des mots assez durs. Blessants. Il oublie qu'après tout, c'est lui qui m'a mit le pied à l'étrier. Il me donne l'impression d'un gosse qui découvre que les mignons petits chiots finissent un jour par devenir des immenses clébards qui puent.

 

J'ai rétorqué. Évidemment. Après tout on parle de mon boulot là. De ma vie. C'est moi qui décide. Point barre. Il n'avait qu'a pas se faire d'illusions après tout. La candeur ça va bien deux minutes. Notre réalité, c'est la vie d'adulte. Mais bon, dans le fond, je sais qu'il n'a pas forcément tord. Je mène une existence dangereuse. Et le pire c'est qu'il n'a même pas conscience du quart de la merde que je remue à chaque fois. Si il savait, il s'enfuirait. Je ne peux pas tout lui dire. Malgré mes grands airs, j'ai besoin de lui. C'est vraiment un bon gars.

 

Le fruit du mélodrame ? Oui. Désolé, je m'égare. Pour tout dire... il s'agit de mes yeux. Aux iris violets. Et cette nouvelle particularité n'est pas due à des lentilles fantaisies. Mon dernier taf a bien payé, et j'en ai profité pour mettre au rebut une partie de mon être. Je vois maintenant la vie à travers une interface cybernétique répondant au nom de DyEys 400. Une paire d'yeux cybernétique pour être exact. Le dernier cri. J'ai longtemps hésité avec le modèle d'Evo, mais j'ai craqué pour la dernière prod de NeoNET. L'amplification visuelle est supérieure. Aucun doute. C'est ça qui m'a décidé. Naturellement j'ai passé toutes les simulations avant de faire mon choix. Mais je savais que ça ne plairait pas à Idriss car jusqu'à maintenant, mes améliorations n'étaient axés que sur de la biotechnologie. Mais là... j'entrais dans un monde très différent.

 

Il est peut-être nécessaire d'expliquer la différence entre bio et cyber. Je m'excuse d'ailleurs d’utiliser des abréviations mais ça facilitera la compréhension. Donc, pour faire simple, il faut se dire que le cyber est une technologie extrêmement intrusive et bon marché. Tout ou presque a été développé dans ce domaine depuis les dernières décennies. C'est classique. Le datajack est certainement l'amélioration cyber la plus répandue. Une connectique réseau directement implanté dans le cerveau. Plus besoin d'interface, vous êtes dans la machine, dans la matrice. Mais le problème, c'est qu'il faut bien que ces améliorations trouvent leurs places dans votre corps, et c'est là que le bas-blesse, car la plupart du temps, quand vous voudrez du cyber, il faudra larguer un morceau de votre bidoche. Une part biologique de vous-même. Inutile de dire que les mamans ne sont que rarement friandes de voir leurs rejetons échanger ce à quoi elles ont donnés naissance contre un un bout de métal ou de polymère synthétique. Et ça peut pousser assez loin ces conneries. Ces dernières années ont vu l'émergence des premiers cyborgs intégraux. Mis à part le cerveau, tout le reste est robotisé. Heureusement ce genre d'extrême reste extrêmement rare. En tout cas, si beaucoup optent pour le cyber, c'est surtout pour des questions de coûts. Avec quelques économies, il est toujours possible de trouver des séries normales ou voir carrément des bonnes occaz pour trois fois rien. Évidemment, si on tape dans le haut du panier, ça coûtera toujours une blinde, mais bon c'est la loi du marché. Et de l'autre coté du miroir, on a le bio. Les améliorations des nantis. Où même les petites enzymes censées vous donner un teint halé toute l'année, sans la moindre séance d'UV, sera au tarif d'un petit bolide de course. Le bio connait ses heures de gloire de nos jours. Il ne se remarque pas (à moins que vous ne soyez un putain de magos...) et vous colle à la peau. Vous pouvez obtenir presque les mêmes effets qu'avec n'importe quelle amélioration cyber, sans passer pour une boite de conserve ambulante. J'exagère, mais l'idée est là. Il existe tout un tas de tonifications ou renforcements injectables ou avec de très légères opérations, qui vous permettront de sauter deux étages comme si vous aviez remplacé vos guiboles par deux pattes de sauterelles cyber (déja vu, véridique). Mais bon, au final on en revient toujours au nerf de la guerre : l'argent. Et le bio c'est horriblement cher. J'ai travaillé comme une forcenée pour m'offrir ce luxe. Booster synaptique, accroissement de réaction, renforcement musculaire, et touti canti. Je m'étais fait un objectif de ne jamais toucher au cyber. J'étais fière de mon corps... mais voila, la science n'a pas encore réussie à améliorer nos mirettes. Pas de gadgets bio. J'ai donc travaillé avec les lentilles pendant quelques temps. Mais on m'a rapidement fait comprendre l'avantage que me procurerait une bonne paire d'yeux cyber. Alors voila, c'est chose faite. Mais tant qu'à faire, j'ai choisi le top du top. Une série béta. L'opération s'est déroulé sans accrocs, et je profite maintenant pleinement de la RA où que j'aille. Si vous saviez comme ça change la vie.

 

Mais j'y pense, vous allez surement vous demander pourquoi je m'inflige cette évolution ? J'ai déjà dit que c'était pour mon boulot, mais je n'en ai pas défini la nature : Je suis une shadowrunneuse.

 

- Désolé. Je ne voulais pas te vexer.

- Je croyais que t'aimais cette couleur pourtant ? C'est la même que pour mes cheveux.

- Non, non... c'est pas ça... ça m'a surpris, c'est tout. Ça fait beaucoup à encaisser, c'est tout.

 

Idriss m'a emmené au resto ce soir. Surement pour se faire pardonner. Comme à chaque fois. Il aurait raison sur toute la ligne qu'il finirait quand même par s'avouer fautif. J'ai parfois du mal à savoir si c'est un manque d'assurance ou tout simplement qu'il est tout simplement dingue de moi. Je préfère largement la seconde hypothèse.

 

L'endroit est chic, comme à chaque fois. Idriss gagne bien sa vie. Copropriétaire et commercial d'une petite corpo de locations de véhicule. Il est assez grand. Châtain clair, coupés court. Une petite barbe de trois jours, toujours soignée. C'est un beau gosse. J'ai pas à me plaindre. Et bon, je le connais depuis longtemps. Presque dix ans maintenant. Amis du lycée. Toujours eu le béguin pour lui, et la réciproque était vraie. On a pas vraiment suivit les mêmes études, et je l'ai perdu de vue pendant quelques temps. Quand j'ai rejoins Seattle, c'était sur son impulsion. Je savais qu'il s'y était installé pour le travail, et j'avais espéré son aide pour mon nouveau départ. A cette époque rien n'allait pour moi et son aide fut précieuse. Dans le faits, ce fut même mon premier employeur.

 

Et c'est donc perdue dans ces pensées que j'essaye de mettre un terme à ce petit esclandre avec Idriss. Je lui pardonne. De bon coeur. J'ai promis que je n'échangerais plus une seule partie de mon anatomie. Ca l'a fait rire. Un bon début. Le serveur nous a ensuite apporté les entrées et la journée a débutée sous les meilleures auspices. Enfin... par pour tout le monde à vrai dire.

 

Ce midi, on ne pouvait pas dire que le restaurant affichait complet. Pourtant un dimanche, en pleine période estivale. Le Gravity Bar, établissement réputé pour son carnet de réservation chargé. Mais pas en ce soir d'élection présidentielle sur la côte Est. Tout le monde était rivé sur les écrans et autres interfaces, certainement pas en train de déjeuner. Quelle insouciance ma pauvre fille, vraiment. Ou alors un dédain prononcé  pour la politique. Plutôt ça en fait. J'avais d'ailleurs désactivé la RA. Je voulais un simple moment de détente avec mon homme. Lui de même évidemment. La nouvelle de la victoire de Dunkelzahn nous était venue de ce charmant serveur elfe, qui malgré le standing, n'avait pu s'empêcher de nous mettre dans la confidence. Un immense sourire parcourait son visage. A ne pas s'y tromper, ce soir il irait certainement fêter la victoire du Dragon. A titre personnel, je m'étais bien abstenue de me diriger vers les urnes. Aucun des candidats ne m'intéressait à vrai dire. D'un coté on avait le local Kenneth Brackhaven, un connard de la première heure. Conservateur et raciste comme pas deux. Ses liens avec l'Humanis étaient connus de tous. Et de l'autre un grand ver. Parangon d'humanisme. Du moins sur le papier. Mon expérience personnelle me laisse un goût amer quant on parle des dragons.

 

Quoiqu'il en soit la suite des événements dépassa allégrement mon manque de considération pour la politique, et le résultat des élections. Car ce fut un cri de stupeur venant tout droit du même serveur qui enclencha la suite de l'histoire : Une heure à peine après l'annonce de sa victoire, Big D, le nouveau président élu des UCAS, Grand Dragon, mourait dans l'explosion de sa voiture.

 

Nous étions le 2 août 2057 et ce n'était vraiment pas une bonne soirée pour tout le monde.

 

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Yo Red hood,

 

Sympa l'introduction, tu m'as fait entré dans la peau de ton héroïne tout en douceur. Un style maîtrisé, comme toujours. Juste, je ne suis pas trop fan des abréviations... Mais elles sont rares et c'est mon avis perso.

 

Et également une mise en bouche d'un univers assez particulier, qui me fait penser à du Ghost in the Shell fantastique ^^. Je ne connaissais pas Shadowrun mais je préfère demeurer dans l'ignorance et te laisser nous faire découvrir ce monde via tes personnages.

 

Le président Dragon est mort, un attentat qui déclenchera l'intrigue.

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Merci pour le commentaire Jimbox ;)

 

Bien vu pour l'influence Ghost in the Shell. J'ai moi-même toujours fait un parallèle entre les deux univers. Car même si la magie est un élément principal, l'accent mis sur les améliorations technologiques est probablement le plus important des deux.

 

'fin, bref, voila la suite.

 

 

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2

 

 

Même en n'ayant aucune forme d'intérêt pour la politique, et un désamour pour le genre draconique, je suis forcé d'avouer que la nouvelle m'a aussi atteinte. J'ai débord cru à une grosse blague. De mauvais goût. Mais le voile du déni n'a pas fait long feu. Officiellement aucun piratage matriciel de masse pour faire circuler une fausse annonce, mais uniquement un fait bien réel. Bien tangible. Je passerais sur la frénésie des premiers instants. Comme chacun s'en doute, la première nuit et les jours qui ont suivit furent particulièrement agités. Déclenchant un flot de haine tel qu'on en avait pas vu depuis la fameuse Nuit de la Rage il y a de cela presque dix-huit ans. Mais est-ce que c'est si étonnant ? Pas vraiment. C'est une réalité bien ancrée dans les esprits : La méta-humanité est le plus grand débat de notre ère. Au delà même de l'apparition de la magie, de la cybernétisation des êtres ou encore de la main mise toujours plus grande des corporations sur notre monde. L'Éveil -avec un grand E- n'a pas que fourni des aptitudes magiques à une partie de la population, il l'a surtout singulièrement modifiée. Avec cet événement, officiellement survenu le 24 décembre 2011 avec le réveil du Grand Dragon Rumiyo, on commençait à recenser un nombre croissant de nouveau-né présentant des différences biologiques marquées, comme des oreilles en pointes, ou des morphologies modifiées. Les premiers elfes (mon cul!) et nains voyaient le jour. Par la suite, en 2021, de façon beaucoup plus marquante, une partie de la population muta spontanément : Les orks et les trolls rejoignaient la belle famille de la méta-humanité. Les créatures des contes et légendes devenaient une part intégrante de notre société. Une société qui ne voulait pas d'eux.

 

Fini la haine du youpin, du négro, du bougnoule ou du niakoué. Bienvenue aux bouffeurs de pissenlits, au trogs, aux norms, aux razs et autres phacos. L'homme a toujours eu de l'imagination quand il s'agit de rabaisser son prochain. Les haines raciales, même si elles demeurent pour certaines, ont fait place à la peur du méta-humain. Les trolls et les orks sont des sauvages grands et costauds, les elfes sont des connards guindés, les nains sont des vicelards, les hommes sont des arriérés rétrogrades. J'en passe et des plus belles. Ces mentalités régissent les rapports sociétaux depuis l'Éveil, et Dunkelzahn représentait à lui seul une avancée notable dans l'amélioration des ces derniers. Il avait fondé la quasi intégralité de sa campagne sur ces questions, et il est inutile de dire que sa ligne de conduite était à l'apaisement.

 

Je suis une humaine. Et j'ai eu la chance de naitre dans un état plutôt ouvert sur ces questions : les UECA, pour Union des États Canadiens et Américains. Mais est-ce que pour selon je suis une partisane pur et dur de l'intégration égalitaire des méta-humains ? Non. J'ai appris, de par ma propre expérience à nuancer mon propos. Idéalement, oui, j'aimerais que les méta-humains marchent tous de concerts, et œuvrent ensemble à un avenir prospère. Mais c'est malheureusement loin d'être aussi simple. Je ne vous bassinerais pas avec mes préférences politiques. Je ne suis pas là pour juger les choix des autres. Chacun est libre de penser ce qu'il veut, grand bien lui fasse. La seule et unique exigence que j'attends, c'est que tous assument leur actes. Si dix clampins de l'humanis tabassent à mort un pauvre clodo ork qui aura eut le malheur de croiser leur route, faudra pas qu'ils s'étonnent de se faire larder la couenne le lendemain par un vingtaine de bikers de l'underground. De la même manière qu'un activiste de Terra-First devra s'attendre à finir sa vie, coulé sous douze mètres de béton armé parce qu'il aura chercher à faire chier le mauvais cadre corpo. Comme vous pouvez le voir, le problème ne se résume pas à votre dentition ou à la forme de vos oreilles. Ce n'est pas l'homo-sapiens contre toutes ses variantes. Les orks et les trolls n'aiment pas les humains et les elfes, les humains leur rendent la réciproque, les nains aiment tout le monde et les elfes n'aiment personne. Je résume la pensée générale. Certains clameront aux préjugés, mais la vérité n'est pas bien loin pour selon. A force de nous planter ce genre d'idées dans la tête, ça finit forcément par germer.

 

Ado, je n'avais qu'une seule idée en tête : Rejoindre l'armée. Garçon manqué, je pouvais me targuer de n'avoir peur de rien et posséder plus de courage qu'il n'en faut. Après quelques digressions familiales, j'ai fini par tenter ma chance une fois mes dix-huit années révolues. Deux années d'entrainement intensifs plus tard et la sentence est tombée : mes performances physiques me mettaient dans les choux. Recalée comme une malpropre. Pourtant trente ans plus tôt j'aurais largement explosé les minimums requis. La faute incombait aux méta-humains. Qui en quelques dizaines d'années, de part leurs performances inatteignables pour le commun des mortels avaient rendus les sélections totalement biaisées. Mon cas avait d'ailleurs suscité la curiosité du sergent recruteur, qui se demandait pourquoi une "humaine" se donnait la peine d'en chier pour faire un boulot ingrat réservé à des trogs. La bonne blague. C'était avec ce genre de connerie qu'on formait des armées de méta-humains, véritable chair à canon, à servir leurs maitres humains, de plus en plus ramollis du bulbe. Et plus le temps avance, plus cet écart se creuse. Las de pas trouver de travail décent, les orks et les trolls se bousculent dans les rangs des institutions militaires. Ces dernières bien contentes d'avoir des machines de guerre à disposition pour faire le sale boulot. Ils ne se rendent même pas compte qu'on les prends pour des cons, trop heureux de pouvoir entrer dans le moule de la société. Et les norms comme moi ? Pas question qu'on s'abaisse à se salir les mains. Pas étonnant après ça que des groupes comme l'humanis voient le jour. Je mettrais ma main à couper que tous les pauvres gars ayant leur carte de membre ont été martyrisé par un ork ou un troll plus costaud qu'eux dans leur tendre jeunesse. Trop castrés à l'époque pour pouvoir répondre par les poings, aujourd'hui ils s'offrent leur vengeance en utilisant le système à leur compte. Navrant.

 

Big D s'est présenté comme une alternative à ce foutoir. Sa campagne fut habile. Humains et méta-humains. Son discours les a tous touchés. Et je dois bien avouer qu'il n'avait pas ce coté rigide que peuvent présenter ceux de son espèce. Les dragons sont à part. Tous s'accordent sur le fait qu'ils sont à l'écart de la méta-humanité malgré le fait que leur influence sur la société qui régit nos vies est colossale. Chacun des rares grands dragons qui peuplent ce monde est maitre dans son domaine. Officiellement comme officieusement, on peut considérer que les dix personnes les plus riches et les plus influentes sur Terre appartiennent au genre draconique. Chef d'état, dirigeant d'entreprise, magnat financier, haut-conseiller, et touti canti. Chaque fois qu'un ver pose sa patte quelque part, il n'y a bien qu'un autre ver pour s'opposer à lui dans le Grand Jeu. Et lorsque Nadja Daviar, la porte-parole du défunt président est apparue à la tridéo pour lire le testament du Dragon, le monde entier à pu effleurer du doigt la surface du dôme obscur régissant notre monde.

 

Moi, Dunkelzahn, sain de corps et d’esprit, atteste que ce document établit mes dernières volontés et mon testament.

 

[...]

 

Concernant l’exécution de mes souhaits

 

J’ai trouvé le moyen d’accumuler des quantités considérables d’objets durant ma vie, la plupart du temps contre ma volonté. Je suppose qu’il s’agit d’une caractéristique emblématique des dragons : acquérir et accumuler des symboles physiques de nos si longs passés et mémoires. Au fond, nous sommes des créatures sentimentales ; je n’ai jamais rencontré un dragon capable de jeter le moindre objet en sa possession, même celui qui a le moins de valeur à ses yeux.

 

Afin de veiller à la tâche herculéenne qu’est l’administration de mon ridiculement vaste patrimoine et pour assurer que mes souhaits sont respectés, j’autorise mon exécutrice testamentaire, Nadja Daviar, à utiliser les sommes nécessaires issues des revenus de mon patrimoine pour créer le Fondation Draco. Cette Fondation possèdera un conseil d’administration, constitué de Melle Daviar et de six autres membres nommés par elle. Les administrateurs veilleront à la gestion de la Fondation et à l’exécution de mes dernières volontés telles que décrites dans ce testament.

 

Je pense qu’il est nécessaire que je reconnaisse à quel point je romps avec les traditions de mon espèce en arrangeant la distribution de mes possessions en fonction de mes propres instructions. Je dirai simplement que c’est une idée hautement délicate que j’ai empruntée à l’espèce humaine avec pour seule intention d’éviter les traditionnels évènements destructeurs qui surviennent quasi systématiquement après la mort de l’un des nôtres. Je mets en garde ici même ceux de mes frères dragons qui envisageraient de contester ce document, car cela aurait des conséquences dommageables sur notre réputation dans cet âge d’Eveil.

 

J’ai compilé et mis à jour ce document depuis plusieurs années, afin de m’assurer que ce testament représente avec précision… et bien, mes dernières volontés. (Ma compréhension est que la plupart des humains utilisent leur testament comme un instrument d’encouragement et de revanche, et il semble que cela soit une excellente idée.) S’il s’avère que je me suis fourvoyé, veuillez considérer mes efforts avec charité, et gardez à l’esprit que ma vision porte à très long terme. En plus de désigner les bénéficiaires des nombreuses choses que j’ai accumulées et qui serviront de meilleurs intérêts dans d’autres mains, j’ai exprimé des souhaits qui, je l’espère, encourageront le développement de quelques unes des caractéristiques que je préfère chez les métahumains.

 

J’ai toujours souhaité aider la métahumanité dans sa quête de connaissances, mais un ami m’a rappelé que je ne devais pas leur refuser ainsi la joie de la découverte. C’est pourquoi j’ai engagé des ressources pour encourager les plus nobles entreprises de l’intellect humain. J’ai découvert au cours de ma longue vie que la vérité est souvent une question d’opinions, et qu’il est possible que de nombreuses vérités soient entre les mains de nombreuses personnes en même temps, sans qu’aucune de ces vérités ne soit meilleure que les autres. Mon souhait est de faire progresser la cause de la vérité à travers le monde autant que je peux faire avancer la connaissance. Le concept selon lequel tous les êtres sont égaux aux yeux de l’Univers, quelque soit leur apparence ou leur origine, quelques soient leurs croyances, est en contradiction avec des millénaire d’histoire humaine où l’esclavage, la torture et le meurtre étaient le quotidien de ceux qui ne se conformaient pas aux volontés des gouvernants. Le plus étonnant est que des nations fondées sur des principes aussi radicaux aient réussi à survivre et à prospérer jusqu’à nos jours. C’est la raison pour laquelle j’ai destiné certaines ressources au soutien du rêve révolutionnaire qui professe une vision du monde où la justice doit régner pour tous.

 

A Nadja Daviar, mon interprète de confiance et assistante, gardienne de mes espoirs et de mes rêves pour le futur, qui a parlé pour moi à des millions d’individus de par le monde, je laisse mon immense patrimoine, hormis les objets cités dans ce testament. Je nomme Nadja Daviar exécutrice testamentaire de mon patrimoine et Présidente de la Fondation Draco, charge qui lui permettra de former un conseil d’administration veillant à l’exécution de ce testament en accord avec mes souhaits.

 

[...]

 

L'intégralité du testament est disponible à l'adresse suivante : http://shadowrun.fr/article/le-testament-de-dunkelzahn

 

Et j'étais loin d'imaginer à ce moment là l'impact qu'il aurait sur moi.

 

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Chapitre 2

Ne traite jamais avec un dragon

 

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1

 

 

Les choses vont et viennent à c'qu'on dit. Et un mois passa en suivant l'adage. Dans un monde aussi contemporain que le notre, seule l'actualité prime. Elle régule notre vie. Et comme la nature, elle a sainte horreur du vide. Ainsi, et malgré toute l'importance que peut revêtir la mort d'un président de l'UECA -soit-il en prime un grand dragon-, le flux de l'information d'un monde toujours plus pressé finit par reprendre le dessus. Dans les grandes lignes toutefois, j'ai pu comprendre qu'un train s'était mis en marche. Conformément aux souhaits de ce bon vieux Dunki, une fondation, bien nommée Draco, vit le jour dans le but officiel de veiller à la bonne tenue des vœux testamentaires. Ainsi dés l'ouverture de la première enceinte de la fondation à Seattle, le jour J, on pouvait observer l'arrivée d'une délégation du Seader-Krupp avec toute la démesure pompeuse ayant attrait à leur estimé patron. Lofwyr n'a pas attendu bien longtemps pour venir réclamer ce fameux Joyaux de Mémoire. A n'en point douter l'artefact le plus précieux de tout cet étalage de richesse. A propos, tant qu'on en est à citer des expressions, savez-vous seulement d'où vient celle qui dit qu'il ne faut jamais traiter avec un ver ? De ce bon vieux reptile allemand aux écailles dorées. Ou plutôt des pauvres bougres ayant servis de pions dans son plan tentaculaire. C'est le plus grand fils de pute que notre monde n'ai jamais porté. Une épine dans le pied de tout ce qu'il existe de bon sur notre planète. La voila, la principale raison de ma méfiance envers le genre draconique. Cet enculé a entre autres ruiné ma vie, et le pire, c'est qu'il n'en sait probablement rien. Et même si c'était le cas, il n'en aurait strictement rien à foutre. Une petite fourmi parmi tant d'autres. Ainsi va la vie j'imagine.

 

A coté de cela, une commission d'enquête fut aussi ouverte par le parlement pour enquêter sur les raisons de la mort du président. Confiée évidemment à la plus haute autorité judiciaire du pays : la Cour Suprême. Avec à sa tête un certain Richard Scott. Le poste de président quant à lui revint à Kyle Haeffner, co-listier du dragon. Un humain surtout connu pour être copain comme cochon avec le dirigeant d'Ares, Damien Knight. Inutile de vous faire un dessin j'imagine ? Gros, sous, théorie du complot et mon cul sur la commode. Parfois j'aimerais vraiment qu'un cataclysme purifie tout ce merdier. Un peu à l'image d'un déluge divin. Mais mon petit doigt me dit que les rats trouveront encore un moyen de survivre et de recommencer leur manège. Et bis repetita.

 

C'était donc le 2 septembre 2057, un peu moins d'un mois après la mort de Dunkelzahn, que je recevais un message sur mon commlink jetable. J'utilise toujours un metalink à usage unique quand il s'agit du boulot. Pour éviter tout traçage matriciel. Ces merdes coutent une centaine de nuyens, et sont piratable facilement. Mais en général on se fout bien que quelqu'un vienne y fourrer son nez, pour la simple et bonne raison qu'aucun SIN n'y est rattaché. Avec l'ajout d'un petit code de langage et hop on passe inaperçu. L'anonymat est une denrée rare. Autant la chérir et l'entretenir au maximum.

RDV au Club Penumbra ce soir à 22h pétantes. Demande M. Tanaka. IK.

 

Simple et concis. Du taf a priori. Et de la part d'Idriss. Ce pauvre petit bout d'homme joue les fixers pour les filles de l'air. Selon lui, il est le seul à pouvoir me trouver les boulots les plus safes. Il ne veut pas me voir friquoter avec les raclures de seconde zone. C'est sa façon à lui de me protéger, un peu par dépit de ne pas parvenir à me faire raccrocher. Je laisse faire. Par amour, et aussi parce qu'il faut bien avouer qu'il sait y faire. Ses Johnsons sont toujours réglos, sans entourloupes, et souvent avec de belles primes à la clé. D'ailleurs c'était plutôt bizarre cette fois d'avoir un nom. Tanaka. D'habitude le client utilise le patronyme passe partout de Johnson. Un peu comme le John Doe usité pour dénommer les inconnus du système (la chance!). Il va s'en dire qu'un bon runner ira toujours fureté du coté de la matrice pour s'informer un peu sur la véritable identité de son employeur, mais la couverture du Johnson est toujours de mise. Un signe de professionnalisme en quelque sorte.

 

J'ai occupé mon temps le plus sagement du monde avant le rendez-vous du soir. Par habitude. Je sais d'expérience que rien ne traine jamais une fois un contrat accepté. Autant profiter au maximum du calme avant la tempête. Je n'ai toutefois pas vraiment pu faire l'impasse sur une inspection du matos. Histoire d'être parée à toute éventualité. Mais je connais mon affaire. Minutieuse comme pas deux. L'heure approchante, je me suis équipée du strict nécessaire : Ares Predator, tenue dresscode et lunette de soleil. Totalement inutile avec mes nouvelles mirettes mais l'habitude... on a tous nos gris-gris dans ce métier. Un coup de moto pour éviter le trafic, et j'arrivais devant la boite avec cinq minutes d'avance. Le Penumbra, c'est la sainte Mecque de la nuit à Seattle. Peut-être pas la boite la plus moderne ou originale, mais de loin la plus mythique. Tout y commence et tout y finit. Surtout quand on parle des Ombres. Situé en plein Downtown à une encablure de l'arcologie Renraku. Y a pas plus central. Et donc sécurisé. Un pigeon n'aurait pas le temps de chier que la Lone Star l'aurait déjà dégommé à vue.

 

Le club ouvre ses portes à 22h. Et même à cette heure, la file d'attente est déjà conséquente. La clientèle du Penumbra n'est clairement pas la plus craignos de Seattle. C'est globalement hétéroclite, toujours classieux. Pas vraiment de tranche d'âge, même si évidemment les jeunes sont majoritaires. On ne croise pas beaucoup de tarés peinturlurés, mais faut dire que la zik du lieu ne s'y prête pas trop. Par chance d'ailleurs, je n’ai jamais pu y entendre un seul titre de Mercurial. Soupe indigeste pour pute à frange. Quoiqu'il en soit, ce soir je n'étais pas là pour faire la fête, et c'est décidé que j'approchais de l'entrée VIP. Un troll et un ork s'occupaient de filtrer.

 

- Bonsoir, madame.

- Bonsoir. J'ai rendez-vous avec M. Tanaka.

 

L'ork consulte sa RA via sa paire de lunettes Men in Black. Et dans la foulée, active l'ouverture de la porte.

 

- Salon n°3. Bonne soirée madame.

- Merci.

 

Après un bref passage par un sas de sécurité, où en bonne fille bien élevée je dépose mon flingue à la consigne, je me dirige vers le salon n°3. La déco est pour le moins onirique. On se croirait tout bonnement sur la Lune. Coté ambiance, on sent que c'est le début de soirée. Le Dj n'est pas encore aux manettes et c'est un mix de musique d'ambient qui se diffuse dans la salle principale, où une quarantaine de personnes sont déjà présentes. Dans deux heures, la population locale aura presque décuplé. J'arrive devant le salon privatif, et sonne pour annoncer mon arrivée. Une seconde après la porte s'ouvre et je pénètre à l'intérieur.

 

L'endroit est cosy et totalement isolé du reste de l'établissement. Pas un seul son ne parvient de la piste de danse. La déco est bien senti. Moderne et chic. Et c'est dans cette ambiance feutré que j'aperçois fiché dans un fauteuil design un homme affichant une petite trentaine d'années. Caucasien (sic). Propre sur lui. Visiblement athlétique. Sans aucun signe d'augmentation visible. Cheveux bruns, coupés court. Barbe de trois jours soigneusement entretenue. De beau yeux bleus. Pour faire simple : C'est une foutue gravure de mode. Habillé avec probablement une barre de tunes. Il se lève et vient à ma rencontre pour me saluer.

 

- Lightning je présume. Asseyez-vous je vous prie.

 

Idriss a donné mon nom. Bizarre.

 

- M. Tanaka ?

- Oui. Mais appelez-moi plutôt M. Aberdeen. Sean Aberdeen. Vous prendrez quelque chose ?

- Non, merci.

- Vous êtes la première. Ce qui va me permettre de vous briefer avant que les autres n'arrivent.

- C'est un travail en groupe donc ?

- Exact. Il nécessitera forcément la présence d'une équipe renforcée et spécialisée. Pour faire simple, j'espère vous faire intégrer un groupe déjà formé de runners, en tant que soutien armé. Vous allez remplacer un membre de l'équipe.

- Quelle est la teneur de la mission ?

- J'imagine que vous avez pris connaissance du testament de notre défunt président ?

- Pas dans les détails, mais oui j’ai lu le résumé dans les grandes lignes.

- Il s'agira d'enquêter sur l’une des entrées du testament.

- Rafraichissez-moi la mémoire.

 

Le Johnson active son PAN privé pour que je puisse récupérer des données qui s’affichent immédiatement sur l’interface virtuelle de mes yeux cyber. On y retrouve un passage du testament.

 

« Au premier qui identifiera la victime sur la photo jointe, et qui amènera ces cinq bourreaux devant la justice, je laisse les codes d’accès à ma propriété de Paris. La Fondation Draco délivrera les codes après réception et vérification du rapport complet d’enquête, comprenant notamment le destin de la victime et de ses bourreaux. »

 

Ainsi qu’une photographie l’accompagnant.

 

30.jpg

 

Je l'avais déja vu en lisant en coup de vent. Crime raciste ou mise en scène. Va savoir.

 

- Il s’agit donc d’une enquête. L'investigation n'est pas mon domaine de prédilection, mais comme vous voulez m'engager dans le rôle de soutien armé, je n'y vois pas d'inconvénients. Enfin après, tout dépendra du salaire proposé.

- J'aimerais vous engager sur la base d'un contrat d'exclusivité, avec un salaire journalier de 2000 nuyens. Avec des primes conséquentes en fonction des informations récoltées. Et voir, je l'espère, en cas de résolution de l'enquête.

 

2000 nuyens par jour ? C'est une blague ? Déjà que le type te file son blaze. Maintenant il te propose un salaire de roi du pétrole. Y a forcément une couille. Mais merde... 2000 quoi. Par jour. Bon, te laisse pas démonter.

- Par prime, vous entendez quoi ?

- Entre 10 000 et 50 000. En fonction de la réussite.

 

Je confirme. Il se fout de ta gueule. C’est juste pas possible.

 

- Pour le groupe ?

- Par personne. J'aurais du le préciser.

 

Putain, c'est noël ma fille. Y a surement un lézard quelque part, mais tu t'en occuperas en temps voulu.

 

- Je marche.

 

 

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  • 3 weeks later...

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2

 

 

Pas de serrages de pognes. Pas de contrats écrits. La conclusion d’une négociation quant il s'agit d'un run se finit toujours par un accord oral. Ni plus, ni moins. Un minimum de traces pour un minimum d’emmerdes. Du moins sur le papier, parce qu'il y a toujours le risque que le Johnson vous fasse un petit dans le dos. Mais l’inverse est aussi possible. On ne compte plus le nombre de runners ayant compris que la petite mallette dont ils devaient assurer le transport contenait largement de quoi couvrir leur retraite dorée ainsi que les frais de disparition. Alors tout le monde accepte la règle tacite, et les moutons seront bien gardés.

 

Et puis comme si une horloge suisse s’était chargée d’organiser la soirée, c’est après seulement quelques secondes que trois méta-humains, deux elfes (un homme et une femme) accompagnés par une ork, s'annoncent puis entre dans le salon privé. Et voila grosso-merdo la première pensée qui me traverse l'esprit : Voila Jimmy Belle Gueule et ses deux amazones. Pitié, vive le cliché. Mais j'exagère peut-être un brin. Mon coté taquin sans doute. Quoique mon impression première n'était peut-être pas si éloignée de la vérité que cela. L'ork remet un sac de sport volumineux à M. Aberdeen. Ce dernier vérifie d'un coup d'oeil son contenu. Demande confirmation que tout est là. Ce à quoi Jimmy rétorque qu'effectivement, comme précisé par commlink, tout est là. Il ne détaille pas le contenu et marque alors un temps d'arrêt, un peu hésitant, avec un regard en coin m'étant clairement destiné. Je comprends rapidement qu'il se demande si je dois être mise dans la confidence.

 

- Hmmm. Ah, oui. J'en oubli les politesses. Voici Lightning.

 

Je fais ainsi connaissance avec Zackary. Un elfe caucasien, de taille moyenne (c'est à dire deux mètres) pour un gabarit relativement svelte. Belle gueule. Les cheveux mi-longs, légèrement bouclés. Rasé de près. Accoutrement sans tache. Visiblement la tête pensante de tout ce petit monde. S'exprimant sans la moindre once d'hésitation, comme doté d'une assurance naturelle. Un pur face qui -j'en mettrais ma main à couper- doit probablement posséder quelques talents magiques. Adepte ou mage, un point de détail que je réglerais plus tard.

 

La première de ses camarades, on ne peut pas vraiment la manquer. Une ork bâtie comme une armoire à glaces. Probablement une ancienne militaire ayant un peu trop fréquenté les salles de muscus à en juger par sa morphologie apte aux concours de bodybuilding. Un véritable tank sur pattes à la teinte halée. Une latino ou une méditerranéenne probablement. Des cheveux noirs, raides, tout juste assez longs pour être attachés à l'arrière du crane. Tunique de sportwear, certainement doublées par un kevlar. L'air pas vraiment commode. Il ne lui manquerait plus que la paire de ray-ban pour que le portrait soit complet. Son surnom ne me confirma pas son origine ethnique. Sally. Come-Lately. Physad. A cent contre un. Tout un programme.

 

La seconde est une elfe. De très petite taille. Ne m'arrivant que difficilement à hauteur de menton. Et pourtant je suis loin d'être une géante. La bien nommée Keltahi à la chevelure châtain, attachée en queue de cheval. Surmontée d'une casquette de guérilleros bas de gamme. L'accoutrement suivant ce modèle, on y retrouve le t-shirt blanc moulant maculé de différentes taches crasseuses, sur lequel on distingue difficilement le motif sérigraphié : Un logo parodique de la Lone Star. Je vous passerais les détails graveleux ayant remplacés la devise originelle. Le tout est complété par un vieux sweet-shirt à capuche, un treillis camouflage et une paire de rangos. Dans l'idée, imaginez une gamine à tête d'ange, engoncée dans un déguisement de punk à chien. D'une hilarité grinçante. Quant à sa place dans le groupe... j'aurais bien suggéré sidekick rigolo.

 

- Si j'ai bien compris, Krieghund vous a quitté. J'ai donc pris l'initiative de vous adjoindre quelqu'un pour le remplacer.

 

Zackary émet un léger soupir d'amusement à la réflexion du Johnson. Je ne sais pas vraiment quoi en penser. Peut-être une merde avec leur précédent collaborateur. En tout cas, jamais entendu parler d'un Krieghund. Quel surnom... Un nostalgique du Grand Reich probablement.

 

- Nous nous sommes mis d'accord, et donc Lightning vous accompagnera pour la suite de l'enquête. Je vous laisserais la briefer sur les premiers éléments dont vous m'avez parlé. Quant à moi, continuez de me faire des rapports quand vous jugerez avoir suffisamment avancé sur l'affaire.

 

En langage courant : Vous pouvez disposer. Et visiblement tout le monde parle le langage des ombres dans la pièce, puisque c'est de façon collégiale que nous nous éclipsons hors de ce charmant cloaque feutré. mais bon soyons clair, mes pensées premières ne vont pas vers le décorum ou même l'étiquette, mais sur le fait que j'intègre une équipe déjà formée. et ça ce n'était pas vraiment prévu à la base. J'ai toujours tendance à travailler sur des contrats unique, avec des collaborateurs occasionnels que je recroise d'ailleurs rarement. Là, ça chamboule un peu mes plans, mais bon pour le tarif qu'on vient de me proposer, je veux bien me faire nonne si il le faut.

 

- Hmmm, Lightning, c'est ça? On te propose d'aller discuter de tout ça ailleurs. Un cyber pas trop loin d'ici.

 

C'est Zachary. D'une voix semi-blasée, semi-charmeuse. Il doit faire ce numéro à toutes les gonzesses.

 

- J'suis en moto. Je vous suis.

 

Et j'en profite aussi pour faire un échange de commcode. Le petit détail qui tue. Ou sauve la vie. Au bout d'un moment, on ne sait plus très bien. C'est routinier. Quoiqu'il en soit, je constate rapidement que l'elfe n'a pas la même notion que moi des distances. Et que sa camarade lilliputienne roule comme une demeurée. Après presque une heure de zig-zag et de grillages de feu dans les règles de l'art, nous parvenons en bordure des barrens de Puyallup dans un rade bien connu des ombres : L'Amarillo. Un cyber branché, dans tous les sens du terme. Nid d'otakus et autres mordus d'informatique. Tout ceci respire bon la petite passe matricielle, et n'y voyez pas là un sous-entendu graveleux. Il s'agirait plus simplement de se connecter à un salon privée et sécurisé pour pouvoir palabrer sans avoir peur des oreilles indiscrètes. Bon, finalement, c'est peut-être pas des branques. Laissons leur le bénéfice du doute ma fille.

 

Commande de rigueurs passées, sans aucun alcool dans le lot, La petite équipe m'explique qu'ils travaillent avec un decker du nom d'Eldalord.  Un type réglo et méchamment bon dans son domaine. Le gus a lui aussi été intégré à l'équipe par notre Johnson commun. Un homme plein de ressources dis donc. Keltahi  s'est chargée de contacter le geek pour une rencontre matricielle. Autant ne pas perdre de temps et que tout les acteurs soient réunis. Zackary signale d'ailleurs qu'ils attendent l'arrivée d'un certain Français. Un pote à eux qui ne pouvait être présent au Penumbra à cause d'affaires personnelles. Il précise que c'est un troll, pas français pour un sou. J'arrive pas à définir si c'est une blague ou non. C'est qu'il est pas mauvais ce con.

 

Quoiqu'il en soit, et pendant qu'on sirote un délicieux café torréfié (je blague, c'est d'la daube, genre soycaf), je vois se pointer un troll plutôt massif, qui jure avec le décor, et pas vraiment à cause de sa morphologie. Le Français, car c'est bien lui, est habillé d'une magnifique chemise quadruple XL à carreaux. Une vraie dégaine de bouseux. Mais là s'arrête le coté mauvaise langue. Le troll s'avère tout sauf intimidant lorsque résonne sa voix. Il est hésitant, un peu intimidé visiblement, et c'est bête à dire j'ai l'impression qu'il ne serait pas capable de faire de mal à une mouche. Comme quoi l'habit de faire pas le moine. Je ne dénote aucune augmentation visible, pas plus que la traditionnelle habitude qu'ont les magiciens de vous scruter dans l'astrale. Si c'est un runner, c'est un novice. Keltahi coupe court aux présentations en annonçant que la connexion au serveur privée est ouverte. Et c'est donc isolés dans un box que nous nous connectons.

 

Pour définir la matrice, imaginez tout simplement une forme de monde virtuelle dans lequel vos sens sont transposés par des senseurs. A la manière d'un vivier fertile, la matrice est en constante évolution, et chaque développeur ou programmateur s'offre le luxe de personnaliser les domaines qu'il met en place. Ainsi nous arrivons dans un jardin luxuriant, où gazouille des oiseaux et chante une rivière. Dans ce décor bucolique (et foutrement réaliste) se trouve un elfe vêtu comme ceux des légendes. Robe, diadème et tout le déguisement de rigueur. Mais malgré cet accoutrement, pas question de lâcher une remarque déplacée. L'homme n'a pas le visage de quelqu'un venu rigoler. Ce n'est qu'un persona, une sorte d'avatar, mais ceci ne l'empêche nullement d'être le maitre dans ce cloaque informatique. Personnellement, je n'ai pas eu le temps de télécharger mon propre persona et je m'affiche donc sous les traits du DeFPer, l'avatar par défaut, une sorte de bonhomme océdar. Et je ne suis pas la seule. A part Keltahi, présente sous les traits d'une amazone assez kitch, tout les autres affichent la même trogne que moi.

 

L'elfe s'approche de nous, l'air grave, sans même prendre la peine de s’enquérir de mon identité.

 

- J'ai du nouveau. Ca vous dit de faire un petit tour par Chicago ?

 

 

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