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Chroniques de BelleFond [Nouvelle Post-Apo-Crado] (NC -16)


Red Hood
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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

¤¤¤

 

Introalakon

 

 

District centre-est du Chaos Urbain de BelleFond. Eté. Début de l'après-midi.

 

Les corps tannés des gamins ondoient dans la réverbération aveuglante du jour éclatant.

 

Football.

 

Le bitume est craquelé et presque jaune. Une épaisse poussière âcre le submerge et celle-ci se soulève pesamment au rythme des remous-piétons de la partie endiablée, du sport spore, esquissant des arabesques crasseuses de sable et de pluches le long des ruisseaux de sueur qui trempent les petites poitrines en feu.

 

Souvent nus sont les avortons, filles comme garçons; chatounes et zigounettes gigotent à l'unisson. Parfois, aux pieds, équipés de baskets éventrées. Cédéfoututricheuralakon. Des poteaux en panneaux routiers sur lesquels on t'annonce qu'en ville la vitesse est limitée à 50km/h. Et c'est sans doute pour ça qu'aujourd'hui, on voit de veilles américaines avaler les giratoires le compteur à fond vers la droite, en prenant les terre-pleins pour des tremplins.

 

Les gens sont fixés et tout rouges après.

 

Généralement, dure et granuleuse est la corne qui embrasse le sol du parking, parcouru de long en large par une troupe chaotique de quatre-vingt petons solides et sacrément énervés. Il y a quand même quelques t-shirts, dans le lot. 

 

- « Mai cé pa du jeu kan t'on tir sur l'foutu ticheurte! »

 

- « Alor t'en porte pa! »

 

- « Cé clair putin. »

 

- « Ya pa foto. »

 

Devant la vitrine du magasin, la boutique en face du stade improvisé avec tous les bébés macaques qui s'égosillent comme des gorilles en rut, perchés sur les grilles rouillées qui encerclent le terrain, deux ou trois bikers prennent un bain de soleil, spectateurs involontaires du pandemonium en couche-culotte. Ils affichent des mines patibulaires mais peinturlurées. Baroques. Comme de vieilles tantes de cabaret. S'enfilent des bières. Rotent. Causent pas. 

 

- « T'a vu le chapo du gran pédé? Genr ouesterne. »

 

L'échoppe, c'est un Sex-Shop. 

 

- « Putin ouai cé t'interdi d'entré. »

 

- « Conar va! »

 

Là dedans, ils vendent de tout, mais surtout de rien. Les poupées gonflables du tenancier font un tabac et lui se fabrique des couilles en or sur mesure. C'est le dernier qui fait dans le matos âgé de dix piges. Il est de la vieille école. Même des couples lui en achètent. Le neuf, le gynoïde, c'est sympa, mais c'est beaucoup trop compliqué quand ça tombe en panne car bientôt, il faudra détenir un diplôme d'ingénieur, pour tirer son coup dans une putain artificielle.

Le lieu fait peine à voir, comme ça mais si vous vous sentez pousser des couilles pour braquer la maison et ramasser la belle mise de plastique, autant vous dire qu'ils vont vite se dégonfler, vos précieux bijoux de familles et pas exactement comme une poupée.

Une nana à l'iroquois vert raté pénètre l'atmosphère jusque là figée de ce bord, s'allume une tige puante, observe gravement les gamins qui jouent de l'autre côté de la rue, avant de s'engouffrer dans le petit merdier qui pue le foutre, l'encens et la javel. Une des tantes ouvre sa gueule pour ricaner grassement. Iroquois leur fait un doigt puis disparait, derrière les portants bourrés de mensuels porno aux affreux tons vintage. La punk a des seins comme des melons, derrière son corset léopard.

 

- « Tu plante dé çiso ça pèt'. Splach splach boum boom. Dé gro bou d'fo nichon partou partou. »

 

- « Foutu pute va. J'vai t'lenculé mignon. »

 

- « Veu dire koi t'lenculé? »

 

*Bam !*

 

Voilà un chiard qui vient de recevoir le ballon en pleine poire parcequ'il a trop maté la gonzesse et désormais, c'est son orbite qui va ressembler à un beau fruit rond tout pourri.

 

On ne sait pas très bien qui joue avec qui. On ne sait pas très bien si tous ces morveux connaissent les règles originelles du football. On passe très facilement de trois pauvres moutards dans l'arène à quarante gosses qui couvrent le moindre recoin du bordel. Y'a une cacophonie de casseroles martelées à la louche en fer, noise hallucinée bien navrante pour les tympans. Y'a un ghetto-blaster qui éructe de la musique classique bâtarde.

On tombe beaucoup. Les plus petits sont salement amochés mais même avec trois dents de lait dans les choux, les babines luisantes d'hémoglobine, même avec la cheville tordue, même avec quatre dixièmes de perdus à chaque oeil, on persiste et on signe, on marbre l'asphalte brulant du pourpre de ses genoux vierges de mercurochrome, jusqu'à ce que le damné coup de sifflet final retentisse. 

Les plus grands, eux, sont du style vicieux. Ils aiment flinguer les organes génitaux de la taille d'une noisette, ou tirer comme des malades en direction des fessiers osseux. 

 

- « Même pa mal j'vai t'foutre mon pié dan la tronche prochin cou. »

 

Et, quand on se vautre, c'est un tsunami de cancrelats acnéiques qui s'abat sans pitié sur vos écorchures tel un cyclone de moineaux braillards et affamés, attirés par la vision du ver orphelin qui se débat mollement, pathétiquement englué dans une flaque de sang chaude et poisseuse.

Et, comme à la messe, on se couvre de bisous et de pains. Tendresse au parpaing.

 

- « Et kan tu t'ramass é ke tou lé kon son sur ta ganache ya toujour un foutu gogol ki jou perso pour dir k'il a marké. »

 

Applaudissements. 

Tous les minots se serrent dans leurs bras tiges de fer. Se donnent des claques et se roulent des pelles.

 

- « Bouabouabouabouaboua, lache moi foutu pédé va! »

 

L'arbitre, douze ans, l'arcade sourcilière éclatée, du raisiné noirâtre qui dégouline abondamment dans ses fentes en trou de pine, décrète que le score est de 78 à 59.

 

- « Cé pa vré, putin de vendu a la kon. Matche nul dabor. »

 

- « Tu sai même pa conté, komen k'tu peu dir k'ça fé karante-di-zuit zéro l'imbécil! »

 

- « Fichu con. »

 

- « Tu va prendre ma main sur ton groin. »

 

- « Va t'fèr enculé. »

 

- « Veu dir koi enculé ? »

 

La cohue finit par se disperser aux quatre coins des rues et certains font les malins en agitant leurs petites teubs gonflées devant la vitrine du sex-shop. Iroquois sort en brandissant un fusil à pompe, et tout le monde détale aussi sec en riant aux éclats. Un des homos en cuir peut pas s'empêcher de se marrer à nouveau, et la punk lui envoie un mollard à quelques millimètres de ses bottes croco. Les autres regardent dans le vide. Sifflent maintenant une bouteille de whisky. Rotent. Causent toujours pas. La vie.

 

Le ghetto-blaster aussi se fait la malle, diluant dans le lointain inondé de lumière ses dernières notes crachouillées.

 

Dans un coin du parking, il y a une gamine blanche qui n'a pas participé à la partie de football, et qui est restée là, assise, concentrée. Pas plus de sept ans, qu'on lui donne. Elle porte un maillot de bain une pièce arc-en-ciel, ainqi qu'une casquette rouge surmontée de petits spikes vissée sur son crâne. Le motif imprimé dessus, c'est un gros poulet à l'air lubrique qui se goinfre de nuggets. Quelques mèches châtains lui encadrent ses pommettes roses. A l'ombre d'une berline toute cabossée, ses pouces s'agitent sur les boutons de sa Game-Boy.

 

- « Cé l'autist', elle ai pa drol putin celle la. Veu j'amai fair le foot. Gross débile.  »

 

- « Toujour avec la fichu gaimeboï. J'ai envi d'la piké parfoi. Mai le jeu, c'es tro compliké. »

 

- « Toujour l'mêm'. Avek les brike é tou l'bazar. Tro naze. Ça vaut pa z1 clou. »

 

Un autre môme, couvert de bleus et de contusions, légèrement plus âgé que la petite fille, est lui aussi resté sur place. Il récupère son slip maculé de cambouis au dessus d'un des pneus de la bagnole, et l'enfile en observant silencieusement la minette. Il finit par poser son cul tout près de la joueuse et lui pince un peu la peau de l'avant-bras. Aucune réaction.

 

- « Aïvi. Hé. Aïvi. Ohé. »

 

- « ... »

 

- « Ta vu komen j'ai bien joué. Ta vu komen j'ai marké plin plin de foi, Aïvi? »

 

- « ... »

 

- « T'es a kel niveau? »

 

- « Tai toi, Nil. »

 

- « Tai nul. Pourkoi tu jou pa au fout avek nou? »

 

- « Parsseke c'es hein truc de fichu kon. Voila pourkoi. »

 

- « C'es kourir toute seule l'matin qu'es un truk de fichu kon. »

 

- « Hé mèr2. Tu fai chié. Tu ma fai loupé le haï score. »

 

La petite fille éteint rageusement la console portable et lève le menton. Elle écarquille grands ses yeux, d'un beau vert trinitite aux reflets bleutés parce que derrière la grille, elle la voit.

 

Elle la voit, derrière la grille, cette immense blonde à la peau blafarde, aussi blanche qu'un linceul immaculé. Elle la voit, longiligne et raide derrière son imperméable gothique en latex, ses cheveux d'or ramassés en un chignon parfait, du noir à lèvres contrastant méchamment avec le reste de son épiderme. Elle porte des lentilles qui muent son regard humanoïde en espèce vampirique, avec au milieu de son front, un tatouage aussi noir que sa bouche : un ouroboros menaçant, dessinant un inquiétant Zéro. Et cette femme la fixe, les mains crispées au grillage, en susurrant quelque chose que la morveuse n'arrive pas à capter.

 

Dans la torpeur moite de l'été, l'apparition a de quoi rendre malade à crever.

 

La gamine est terrifiée, et ouvre grand la bouche, comme pour crier, mais aucun son ne s'extirpe de ses poumons compressés par la peur. Elle pivote le visage vers son copain et lui secoue l'épaule, en désignant de l'autre main l'icône surnaturelle.

 

- « Nil nil! Regarde nil!!! »

 

Et quand "Nil" détache son regard un peu niais et béat du joli minois "d'Aïvi" pour regarder à son tour vers la grille, il n'y a déjà plus personne.

 

¤¤¤

 

D'autres chapitres à venir. Coming soon.

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bonjour red hood,

 

je prends mon expérience pour te dire ça.

 

j'ai eu envie de lire ton histoire  mais j'ai abandonné.  et cela pour plusieurs raison.

 

pour des sequences comme cella là :

Souvent nus sont les avortons, filles comme garçons; chatounes et zigounettes gigotent à l'unisson. Parfois, aux pieds, baskets éventrées. Cédéfoututricheuralakon. Des poteaux en panneaux routiers. En ville, la vitesse est limitée à 50km/h, que ça dit.

c'est juste pour moi une horreur à lire.

on est obligé de s'arreter à chaque fin de couleur (le point) , j'ai l'impression d'etre clairement en ville avec une porsche. j'en ai eu marre de freiner sans arret!  :P

 

et le second element :

 

-  « Mé cé pa du jeu kan ton tir sur lfoutu ticheurte. »

 

-  « Alor ten porte pa. »

 

-  « Cé clèr putin. »

 

-  « Ya pa foto. »

 

-  « Ta vu le chapo du gran pédé? Genr ouesterne. »

 

-  « Putin oué cé tinterdi dentré. »

 

-  « Conar va. »

 

-  « Tu plante dé çiso ça pèt'. Splach splach boum boom. Dé gro bou dfo nichon partou partou. »

 

-  « Foutu pute va. Jvé tlenculé mignon. »

 

-  « Veu dire koa tlenculé? »

 

des dialogues comme ça, ça ne peut être qu'un repoussoir. le langage sms pour donner un style , c'est bien. faire que du sms, horreur le retour  ;D

 

c'est pas forcément le cas, mais j'ai l'impression de lire un truc fait par un gamin qui sait pas écrire (alors que ça semble clairement pas ton cas) dans les phases de dialogues.

je crois que beaucoup de monde a un peu une overdose du langage sms....alors ça ne joue pas en ta faveur.

 

je serais toi, sans l'enlever complètement, je me donnerais une contrainte de pas mettre plus de 2 mots en langage sms par phrase.

 

sachant que mettre des "pa" ou "alor', 'putin'  => ça apporte rien au niveau vocale comme ça peut l'etre d'un 'cé' ou 'tlenculé '  qui ont une autre sonorité que 'c'est' ou 'l'enculé'.

 

tu vois où je veux en venir, tu alourdis la lecture et ça n'apporte rien de plus à l'immersion dans une conversation un peu 'barbare' ou 'stylé' .

 

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Déja merci pour les remarques.

 

Pour la lourdeur des phrases... c'est peut-être un peu maladroit, mais c'est voulu. D'origine, le narratif était bien plus aéré. Mais j'ai voulu joué sur ce coté punchline qui débite du petit bois à la vitesse de la lumière. Pour justement mettre le doigt sur le coté urbain et viscéral de l'univers décrit.

 

Alors ouais, ça peut être dur à lire, mais j'ai la sensation qu'en rallongeant davantage mes phrases, le texte perdra de son intensité.

 

 

Concernant les dialogues. Dis toi que sur le premier jet, je ne distinguais même pas les syllabes, ni la phonétique d'ailleurs. Tout était attaché, d'un seul bloc. C'était principalement pour appuyer sur le fait que les gosses de rues parlent très vite, sans s'embarrasser le moins du monde des règles élémentaires de vocalisation. J'ai presque hésité à poster cette version, mais me suis ravisé en me disant que découper les phrases de façon phonétique rebuterait un peu moins les lecteurs.

Note, que seul les gamins s'expriment de cette façon. Les adultes qui seront amenés plus tard dans l'histoire s'expriment de façon plus... civilisé (hahaha!).

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j'ai bien compris que la lourdeur était voulu, mais c'est ce qui m'a amené à ne pas finir .

 

Concernant les dialogues. Dis toi que sur le premier jet, je ne distinguais même pas les syllabes, ni la phonétique d'ailleurs. Tout était attaché, d'un seul bloc. C'était principalement pour appuyer sur le fait que les gosses de rues parlent très vite, sans s'embarrasser le moins du monde des règles élémentaires de vocalisation. J'ai presque hésité à poster cette version, mais me suis ravisé en me disant que découper les phrases de façon phonétique rebuterait un peu moins les lecteurs

là je pense que j'aurais même pas essayer  :P

car j'aurais passé plus de temps à trouver le découpage qu'à m'intéresser à ton histoire !

 

 

j'avais eu le même probleme avec une langue inventée, c'était cool . il y avait un petit systeme memotechnique pour reconstituer la phrase

ça marchait avec quoi 10% des gens, la plupart m'ont fait la remarque que ça donne pas envie de faire la gymastique !

 

 

mais ici, ce n'est pas necessaire. vu ce que tu veux faire, c'est trop de faire ça.

 

entre

« Tu plante dé çiso ça pèt'. Splach splach boum boom. Dé gro bou dfo nichon partou partou. »

et

« Tu plantes des çiso ça pète'. Splach splach boum boom. Des gros bouts dfaux nichons partout partout. »

ya aucune différence sur la perception du langage utilisé, il suffit de quelques mots pour comprendre qu'il parlent différemment .

 

mais la premiere, on dirait un écrivain qui sait pas écrire (qui n'a rien à voir avec le fait de mal parler. comme je disais 'bou' ou 'bout' , au son , ça revient au meme ) et qui force le trait pour parler 'djeuns' ....le pire, c'est que les gosses passent plus pour des illettrés que pour des gens qui parlent vite.

alors qu'avec la seconde, ça pète pas les yeux mais on voit bien qu'ils machent leur mot 'dfo' (tu aurais mis d'faux, ça aurait fait aussi parler rapide)  et ya des mots bizarres 'çiso' qu'on comprend très vite par ciseau)

 

je serais toi, je reviendrais à une écriture plus 'saine', mais j'adapterais plus en phonetique.

il y en a qui rajoute un mot qu'ils rabachent à l'image de naruto 'dattebayo' , mais faut savoir dosé. naruto le dit pas à chaque fin de phrase ;)

au contraire de perso secondaire comme dans OP où le Homme poisson rajoutait Dozu ....pour donner un style. mais on savait que ça allait pas durer X arcs ;)

 

sinon ya aussi l'astuce du 'bon parmis les nuls', du genre il y a en a qui reprend la personne.

-"cisseau "

- on dit "ciseau" d'abord, arrete de macher tes mots. on comprend rien.

- on parle comme ça ici, toi, tu te prends pour ces gens ...

--> là on voit bien qu'ils sont différent et parle mal et vite

 

exemple plus parlant, dans orange Mecanique,

pour montrer le coté jeunesse qui a son propre langage, il y a que quelques mots (qu'ils répètent souvent) qu'il a rajouter à la place des mots commun et ça suffit largement !

pas besoin de saloper tout ton recit en langage sms pour comprendre que. ;)

 

 

 

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La suite.

 

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Introturbo

 

 

District centre du Chaos Urbain de BelleFond. Avenue principale George Mégot. Eté. 

 

En ce début de soirée bleu-orangée, l'artère est noire de monde. Les gens se pressent derrière les barrières qui bordent tout le long du trottoir. Les plus vernis ont une place de choix en haut de petits miradors en kit, montés dans la journée pour l'occasion.

La foule s'étale bien au delà du premier tronçon de circuit: mais tout le monde sait que les meilleures places se trouvent ici. C'est à cet endroit précis que tout le merdier commence et se termine. 

 

L'arrivée et le départ.

 

Y'en a qui sont prêts à s'épiler tous les poils du corps à la tronçonneuse afin d'assister au spectacle. Ils rateraient ça pour rien au monde. La plupart des types campent depuis deux semaines pour ne pas qu'on chourre leur emplacement. Et, à chaque course, le délai s'allonge. Bientôt, des neu-neu se planteront là toute leur vie, jusqu'à ce que leurs deux panards soient définitivement coulés dans le béton.

 

Bien sûr, on échappe rarement aux altercations. La faune est tellement hétéroclite que ça pète fatalement dans tous les coins. Mais le service d'ordre est du genre nerveux. Tu fais vite la bise à ton voisin, qui t'a pourtant filé un méchant coup de coude dans la poitrine, si tu veux pas que tes rotules roulent des galoches à de très mignonnes balles dum-dum.

 

Armes interdites. Dope à volonté. L'alcool coule à flot. Mais là encore, tu déconnes de trop: tu gicles. On t'enferme pour la soirée. Si t'es du Chaos, tu peux vaquer à tes occupations le lendemain sans qu'on te blâme plus que ça. Ton nom sera juste inscrit sur liste rouge pour la prochaine compét'. Au pire, t'auras une place dans un tournant dangereux où on voit que dalle, si t'en fais la demande. De toute manière, si t'es un habitué, même grillé, tu seras toujours prioritaire. Si t'es pas du Chaos, tu douilles salement. Dès la fin de la course, Le Bourreau et ses poings américains cloutés viennent te larder la couenne comme un punching-ball, toi et les autres rebuts, jusqu'à l'arrivée du petit jour. On te relâche dans la nature, hors de l'agglomération, à poil, avec un superbe marquage au fer rouge dans la nuque. Et si t'as déjà un marquage au fer rouge dans la nuque sans avoir jamais assisté à une course, suicide-toi fissa, pauvre déchet.

 

Les mecs qui courent représentent un bel échantillon de la lie la plus frappadingue de toute l'Île-Continent. Certains sont venus de très loin. Tous ont foutu des trucs très lourds sur la table. Les mises sont assez libres. La bagnole. La baraque. La pute. La vie.

On ne compte plus le nombre de tarés exécutés illico presto par le vainqueur, pour l'honneur. Pour la gloire. Ces cons là étaient persuadés de tout niquer, avec leur nouveau joujou v8 rutilant. Y'en a qui crèvent dès les premiers cents mètres parcourus, aussi. On appelle ça une anticipation. Pour se marrer, on dit que le type a été particulièrement visionnaire.

Mais ça, on en parle moins avant le démarrage. Un peu de mystère, de non-dit, ça fait toujours mousser l'adrénaline, jusqu'à ce que les fétichistes de grosses cylindrées vénéneuses jouissent dans leur pantalon, dès que le premier ronronnement de moteur surgit entre deux sauvages hurlements. Mais un conseil si tu veux t'inscrire: avise toi de t'afficher dans le bureau du patron avec les clefs de ta deux-chevaux pérave, ta super gourmette en argent, ta tronche de victime, et t'auras un bref avant goût de ce que peut être l'Enfer.

Autre chose: ton co-pilote n'est pas un accessoire. Traite le avec plus de respect que ton cendrier. Et choisis le bien, surtout. Les manchots, ça fait pas un pli.

 

Ici, toute la horde est sapée comme au Carnaval. 

Mais ne va pas te méprendre : BelleFond dégueule toujours les Guignols dans ton genre.

 

Les enceintes perchées sur les balcons des immeubles environnants et sur les toits des miradors hurlent à gogo. Le son est crados. La voix d’un gueulard dans la plus pure tradition néo-générator vient éructer sa prose lyrique entre les riffs de guitares saturées à l’extrême, d’une batterie en roue libre et d’une basse qui imprime sa volonté sur votre rythme cardiaque.

 

Devant la ligne en damiers noirs et blancs, une rouquine méchamment balafrée, déguisée en infirmière de charme, avec sa coiffe croix-rouge et son porte-jarretelles affiché sans vergogne, talons hauts croisés se balançant d'avant en arrière, mégaphone au poing, est assise en haut d'une chaise d'arbitre de tennis. Aux pieds de celle-ci, une grande roue de la fortune montée sur roulettes affiche dix quartiers pour cinq couleurs différentes. 

A ses côtés, l'imposant Bourreau cagoulé, ses muscles difformes semblant pouvoir éclater à tout moment le tissu de son ridicule maillot de corps jaune poussin, a le pied posé sur une petite caisse en bois, frappée d'une tête de mort aux tibias en M-16.

 

Rouge: Grenades.

Vert: Taurus Raging Bull.

Violet: Mini Uzi.

Bleu: Fourchette.

Jaune: Chewing-gum.

 

Quand le premier muscle-car déboule de nulle part pour se placer en première ligne de la grille de départ, un silence de mort s'installe. On aurait pu s'attendre à des crises d'hystéries. Rien de tout ça. Et personne ne sort de la Chevrolet Camaro SS396 1967 rouge incendiaire. 

Une canette de bière vole au dessus de quelques têtes maquillées, et vient s'éclater contre le pare-chocs. Une détonation retentit, quelque part dans la foule, sans que cela ne provoque le moindre émoi. Les gens murmurent beaucoup. Ce pilote a remis son double-titre en jeu. Il part donc premier et favori pour imposer le respect. Mais tout le monde est d'accord pour dire qu'il a tort de prendre la grosse tête de cette façon, et d'ignorer copieusement les spectateurs. Mais allons bon ! Ne pas faire son chaud fait partie du show, pour lui, sans doute...

D'un violent coup de dock martens coquée, le Bourreau fait tourner la roue.

Chance de cocu.

 

- « Tu voi kek'choz toi? »

 

- « Putin 2 putin, jvoi kedal. »

 

- « Fé chié! On é tropti! »

 

- « Mer2 é remer2! »

 

En guenilles, seuls clodos présents dans le périmètre (allez savoir pourquoi ils ont le droit de circuler), noyés au milieu des adultes obnubilés par les bagnoles ou, du moins, ce qu'elles représentent pour eux, deux gamins surjouent leur rôle. 

Ils se dressent sur la pointe des pieds, font semblant de s'intéresser à ce qu'il se passe au devant des barrières, mais s'adressent souvent de petites oeillades nerveuses. Du coin de l'oeil, les morveux observent surtout le gros lard qui les surplombe, à leur droite. Un vrai bouseux, chapeau de cow-boy qui ombrage des traits porcins, mauvais cigare au bec qui empeste à la ronde. Et une fichue salopette cradingue comme s'il se croyait encore au milieu de ses truies. Enfin, c'est peut être un genre qu'il se donne. Mais en tout cas, les minots ne l'ont jamais vu de leur vie. La jeune femme en costume de Cro-Magnon, à leur gauche, le visage criblé de piercings et de tatouages tribaux, ils la connaissent bien, par contre: une prostituée low-cost du district nord, qui bosse et crèche toutes les nuits dans un rade miteux, pas loin du cimetière de voitures.

 

- « Aïvi, vi1 fissa sur mé zépol, tu véra ptêt'. »

 

La môme s'exécute. Mais, les deux poings sur les hanches, en faisant la moue derrière la perruque poudrée d'un Roi de la Renaissance fondu à la crystal meth, elle s'exclame:

 

- « Crote! Kedal! »

 

Elle remet pieds à terre, et commence à tortiller un pan de la salopette du lardon géant.

 

- « Hé monssiheu! Hé môssieu! Hep zvou plé! Zvou plé! »

 

Porky Pig ne réagit pas et, d'une brève oscillation de mâchoire, place le cigare de l'autre côté de sa gueule. La morveuse continue son cinéma, et agite de plus en plus rapidement ses mains autour des plis de la salopette.

 

- « Zvouplé! Zvouplé jpeu vnir sur vo zépol?! Zvouplééééé!!! »

 

Une réponse ne tarde pas à arriver: un épais crachat verdâtre s'aplatit contre le nez et les lèvres de la mini-zonarde. Il repousse ensuite la petite poitrine plate d'un simple revers de battoir.

 

La dernière voiture, une Dodge Charger R/T 1969 noire pétrole, pile à l'emplacement dédié dans un crissement de pneus épouvantable. Elle est complètement positionnée de travers; les roues ne sont même pas droites. Les spectateurs ricanent.

 

L'infirmière annonce un certain Ernest Giacomazzi. Outsider. Non loin, une troupe de cinq nains en tutu rose fend le peuple, et les voilà bientôt qui sautent comme des diables par dessus les barrières. Ils commencent à parader entre les voitures, en jonglant avec des bâtons de majorettes. Quel défilé du tonnerre.

 

L'infirmière annonce que c'est ça, la mise d'Ernest Giacomazzi. Les spectateurs ricanent encore plus, jusqu'à être pratiquement pliés en deux. 

 

L'infirmière annonce qu'il ne reste plus que le chewing-gum. Le bourreau ne tourne pas la roue.

 

L'infirmière annonce, sans trop y croire, les dates de représentation du Nano-Circus, qui montera son chapiteau à l'extérieur de la ville: suivre la direction centrale géothermique sur six kilomètres.

 

Visiblement éméché, le pilote ouvre la portière et se rétame lamentablement au sol. 

Quand les lilliputiens passent à sa portée, ils relèvent l'énergumène, non sans quelques difficultés. Un grand et malingre jeune homme de vingt ans, affublé d'un accoutrement singulier, tenue de Monsieur Loyal nullement boutonnée, bien trop petite pour lui. Joint éteint entre les dents, il titube, se raccroche au capot, monte sur celui-ci après moult-efforts et, debout, dégingandé, offre à la foule une série de révérences pompeuses, saccadées.

On le hue copieusement, on tourne les pouces vers le bas, on lève haut les majeurs. 

Le ou la co-pilote ne bouge pas d'un poil, et se contente de camoufler son visage en étalant ses mains au dessus de son front.

 

Quelques minutes plus tard, un peu avant le départ, le fermier adipeux fouillera nerveusement la salopette à la recherche de son briquet zippo. En vain. Et, deux cent mètres plus loin, on pourra entendre, si on tend bien l'oreille:

 

- « Tu voi kek choz toi? »

 

- « Putin 2 putin, jvoi kedal. »

 

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Flache-Bak

 

 

 

Maman est en haut. Ça fait très très longtemps qu'elle est en haut. Papa m'a dit qu'elle était très malade. Papa m'a dit aussi que tout allait s'arranger. Qu'il allait bien s'occuper de maman. Et que maman pourrait à nouveau s'occuper de sa petite fille. Que maman avait simplement attrapé une mauvaise grippe. K'cé rien du tou. Que des tas de gens attrapent des mauvaises grippes, et qu'ils en meurent pas. Enfin pas forcément, qu'il a rajouté tout bas. Comme si que j'avais pas entendu. Les adultes sont des fichus cons. Ils croient qu'on est bête. Qu'on peut pas piger. Mais moi. Moi moi moi. Je ne suis pas un petit hamster dans sa roue qui comprend pas pourquoi il tourne. Pour faire son intéressant ? Moi je sais quand ça craint. Papa tremble tout le temps tout le temps et ça m'énerve. J'ai un peu peur. Non. En fait, j'ai très très peur. Surtout quand il se met à pleurer comme une petite fille. Parfois, je crois que moi aussi, je commence à attraper la mauvaise grippe. Alors je tousse très fort. Comme Maman. Et Papa me hurle dessus. Tu va 'rrété ton cinoch alakon, Aïvi! Aïvi sa sufi! J'aime bien quand il crie. Ça change un peu de quand il dit kedal.

 

Moi, je suis en bas. Papa m'a enfermée dans une pièce, avec les poupées. Toutes ces fichu poupé zalakon qui me regardent. Avec leurs yeux morts. Et leur peau en plastique dur. Je préfère les pistolets. Comme celui de mon super copain Neil. Au jardin, tous les enfants sont trempés comme des soupes à cause de lui. Et Neil il rigole. Papa m'a déjà dit de pas approcher Neil. Moi je me suis fâchée. J'ai crié sur Papa parce que Neil est mon super copain. Et Papa m'a fichu un coup sur la joue. Neil dit qu'il n'a pas de Papa et de Maman. Neil dit qu'on lui donne pas de fichu coup. Qu'on lui dit pas quoi faire et tout. Neil nous dit qu'il vient de l'espace, et que c'est pas de l'eau qu'il nous balance au visage. Il dit que c'est du liquide extra-extra-terrastre, ou terrasse. Je sais plus trop. En tout cas son pistolet est drôlement chouette. Bleu, jaune et orange au bout. Quand ça sort, ça fait comme d'la pisse de chien. Vous savez, quand les chiens lèvent la patte et tout. Je crois qu'il raconte des histoires, quand même. Ça sent pas le pisse ni rien. Ou quelque chose d'autres de très bizarre, extra-extra-machin-choze. C'est juste de l'eau.

 

Maman est en haut. Je sais pas trop combien ça fait, mais ça fait plein plein de jours qu'elle est en haut. Moi je suis en bas, dans la pièce avec les poupées trop nazes. Papa et un ami à Papa sont dans le salon. Au début j'ai fait semblant de jouer avec les poupées. Parce qu'on sait jamais. Y peut ouvrir la porte et voir que j'en ai rien à faire, et puis me filer une claque et tout. Et puis j'en ai eu marre et j'ai collé mon oreille contre la porte. En essayant de pas me cogner comme une imbécile, pour qu'ils z'entendent pas. C'était pas très dur de les écouter. Au début ils parlaient vraiment pas fort. Blablabla, tout bas, genre c'est hyper-secret et faut pas trop "s'la raconté", comme qui dit Neil. Et puis tout d'un coup ils se sont engueulés très très méchant. Je crois que l'ami de Papa essayait de calmer Papa, en lui parlant de moustiques, ou je sais pas trop quoi. Et puis Papa lui a dit que c'était un teubé. J'ai pas trop compris ce que ça voulait dire. Peut être que c'est la même chose qu'enkulé. Neil dit souvent enkulé. Au jardin, tous les petits garçons répètent enkulé et les mamans sont pas du tout contentes. Les mamans disent à Neil de retourner dans sa décharge, petit konar. Papa dit que l'histoire des moustiques, c'est pour les fichu kon. C'est des histoires à dormir debout. Pour les satanés bonnes femmes krédul comme toi, qu'il a dit. Il a dit que Maman avait plus jamais voulu bézé 'veklui après la naissance d'Aïvi. Aïvi c'est moi, et Neil dit que c'est super comme prénom. Et Papa a dit que maman avait forcément bézé kékun dotr. Pour chopé la salopri. Que tout le monde savait ça. Qu'on attrapait la salopri en bézan. Et que l'histoire des moustiques, foutre, putain, chiottes, bordel de merde, c'était un truc qu'avait été monté à la télé et tout, pour rendre les gens fous. Papa dit que je dois pas m'approcher de Neil, parce qu'il est fou. Il m'a dit que les petits garçons et les petites filles qu'avaient pas de papa et pas de maman, c'est des fous. Faut pas jouer avec eux. Faut surtout pas répéter ce qu'ils racontent. Même s'il a un pistolet du tonnerre. Un moment, j'ai failli raconter à Papa que je préférais Neil à lui. Ou quelque chose comme ça. Mais je me suis retenue et tout. J'ai eu très peur que Papa soit encore plus malheureux. Même si je l'aime pas trop trop depuis que Maman est très malade.

 

L'ami de Papa a crié très fort lui aussi. Il a dit que les gens étaient pas forcément tous malades pareils. Ke la salopri peux trè bien muté. Ou ke ya ptêt'pluzieur salopri. Que Maman avait pas forcément bézé avec kekun dotr. Alors je me suis dit que c'étai des grozenkulé de parler de Maman comme ça. Je sais pas trop pourquoi j'ai pensé ça. Et puis, plein plein de jours plus tard, je me suis retrouvée toute seule à la maison. Maman toussait plus. Papa était plus malheureux. Y'avait du sang partout partout dans la maison, comme quand on tombe par terre et qu'on se fait mal au genou. Y'avait du sang et plus du tout de biscuits. Et puis ça sentait mauvais. J'ai pas arrêté de vomir mes biscuits. Et puis y'en avait plus. J'avais faim. J'allais quand même pas remanger mon vomi.

 

Alors je suis sortie. Toute seule. Sans Papa et Maman. Ça m'a fait tout bizarre. Je me suis dit : ça y est, je suis devenue fou-fou-fou, et y'a rien d'autre à faire.  Je suis allée au jardin. J'avais très mal au ventre. Et aux yeux. Ça me piquait terrible, vous pouvez pas savoir.

J'ai attendu attendu attendu. Et puis j'ai serré Neil tout fort contre moi et tout. J'ai pleuré un coup, très fort. Comme une petite fille. Comme Papa. Neil sentait pas très très bon lui aussi. Mais il était tout chaud. Avec son beau pistolet bleu, jaune, et orange au bout.

 

 

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Intro kukulapraloch

 

 

District Nord du Chaos Urbain de BelleFond. Cimetière de voitures. Eté. Bonne nuit les petits.

 

Aïvi et Nil, Neil et Ivy, sur le toit du monde. 

Leur gratte-ciel est un yellow school bus à moitié désossé.

 

Nil et Aïvi, Ivy et Neil, écrasés par le toit du monde. 

Le repas visuel est sans crème. 

Le café noir est intense. 

Le sucre scintille pourtant encore, à la surface.

Le croissant tout juste un peu jaune. Fade. Pas bien beurré. 

Quelques tâches sombres. Saloperies de ténébrions.

Oudéchiurdsouri.

 

Les slips sales des deux spectateurs surplombent la rouille et la froide misère du métal ruiné. Séparés d'elles par un matelas miteux, aussi propre qu'un fond de culotte, zébré de traces de pneu. D'éparses gerbes de mousse embrassent les membres chétifs, huilés d'une sueur rance.

 

Leurs jambes sont nouées, inséparables.

Partagent un peu de leurs croûtes qui s'effritent, parfois, au gré d'un orteil aventureux, d'un genou frivole, de petits ongles pétris de crasse qui, inconscients, grattent, grattent, grattent encore.

 

Grattent, grattent, grattent encore. Inconscients. Crrrr.

Portent à la bouche les misérables poussières marrons et rouges. 

C'est marrant, ça. Ce subtil enrobage de pus encore tenace, sous la fine pellicule de sang coagulé.

Qui fond presque contre le palais. 

Qui croustille entre deux incisives.

Komducouki.

 

La petite fille est tournée sur le côté, les paupières closes, le visage enfoui au creux de l'aisselle du petit garçon. Les lèvres presque collées à son têtard-téton.

Le petit garçon fait face au plasma impalpable, les yeux grands ouverts, une cigarette éteinte coincée dans un trou de quenotte, une main engourdie fourrée sous l'occiput.

La clope s'éprend d'amusants va-et-vient réguliers, entre la pointe du menton, et le bout du nez. 

 

Des grognements cotonneux.

Des rires endormis.

Des murmures fugitifs. 

Des ta-gueule précaires.

 

Et ce sera tout, car c'est bien là l'essentiel.

 

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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True Romance

 

 

Ici, les chiards du béton sont aussi sacrés que les vaches en Inde. Tout ce qu'on leur demande, c'est de ne pas trop déconner. Tout ce qu'on leur demande, c'est de ne pas trop faire de zèle. De ne pas profiter de leur statut. De faire ce qu'ils ont à faire le plus discrètement possible.

 

Et, doux Jésus, tout le monde sait bien que c'est foutrement impossible.

 

Parce que tout ce qu'on leur offre à manger, ici, à BelleFond, ce sont des regards fuyants ou haineux. Rien de plus. Parfois du plomb ou du fer acéré, quand on désacralise. Quand on désacralise bien vigoureusement derrière les oreilles.

 

La haine, aussi, c'est sacré. Et tellement plus tangible que la liberté.

 

Qui voudrait adopter des sauvageons pareils ? Leur offrir le réconfort de quelques mamelles de substitution ? Couverts de croûtes tenaces et d'hématomes récalcitrants.

Qui voudrait nettoyer la crasse qui s'accumule sous le petit ongle marron de leur orteil tout ébréché, maculé de sang coagulé ?

 

Tu te vois, toi, frotter cette chienlit avec un coton tige et récurer le reste aux ciseaux ? Frotter en murmurant que tu vas être sa nouvelle maman, sa nouvelle nourrice, à ce petit ongle marron d'orteil tout ébréché, qui pue la pisse de chat de gouttière et la flaque d'égout corrosive ? Tu te vois, toi, murmurer que tout ira bien maintenant, en frottant les petons pourris avec un gant de toilette jaune poussin ? Le gant de toilette jaune poussin bientôt noir charbon.

 

Tu te vois, toi, penchée dans la baignoire, devant la quéquette d'un moussaillon que tu n'as même pas pondu ? Tu te vois, toi, en train de raconter une histoire de petits canards cucul concon en pleurant de joie, alors que de chaudes gouttes de pipi dégoulinent tout le long de ta nuque ? Tu te vois, toi, en train de faire toutes ces choses ? 

Alors qu'il crache comme un lama du whisky frelaté sur ton beau chignon, et qu'il sort un briquet de son trou du cul pour te faire le nouveau brushing à la mode ?

 

Même pour blaguer ?

 

Ce qui n'est pas une blague, c'est la morve verdâtre qui forme des montagnes de moisissure sur les mentons osseux. Ce qui n'est pas une blague, c'est les dents de lait pétées avant l'heure. Ces dents de lait tellement gâtées qu'elles charrient une haleine infecte de personne âgée sur le point de crever.

 

Agressifs, braillards. Imprévisibles et orduriers. 

Tu te vois, toi, leur expliquer qu'il ne faut pas se déshabiller lorsque l'on est à table ? 

T'as dix ans, t'es plus un bébé ? Pourquoi pourquoi tu fais ça ?

Qu'il ne faut pas mettre de la purée de céleri dans ton oeil ?

Ou échanger les pommes noisettes mâchées et remâchées, avec sa soeur de huit ans, french-kiss-inceste à la patate, parce que ce n'est pas du tout ce genre de trucs qui fait de vous quelqu'un de normal ? 

Que ce n'est pas du tout ce genre de trucs rigolos qui lie les gens normaux de la vraie vie ?

 

Qu'est ce que tu en sais, toi, d'abord ?

 

Non, personne ne voudrait que ce genre de mômes se gratte la bistouquette ou le mimi dans le sofa du salon. En rotant comme des diables, après s'être barbouillé la gueule de toute la généreuse bouffe qui gonfle le sein du frigo. Personne ne voudrait décemment qu'un beau matin, en se mouchant dans leurs doigts, ils étalent leurs immenses crottes de nez sur la surface clean du miroir de la salle de bain, en écrivant ENKULE. Ou plutôt ce qu'ils croient être ENKULE. Quelque chose comme OKT%. Personne ne voudrait décemment qu'ils chient sur la cuvette des chiottes. Et écrivent OKT%. Dégueulent dans les serviettes. Et écrivent OKT%. Ou pissent sur TA brosse à dent, que tu vas fourrer dans ta gueule automatiquement, avant d'aller dormir.

 

Même pour déconner, ça te ferait pas rire, juré.

 

Personne ne voudrait décemment qu'ils remplacent le bâton de rouge à lèvre par un tampax couvert de chiasse. Même pour rigoler un coup. Juré. Même le plus crasseux et alcoolique des punks à chien ne voudrait pas avoir affaire à eux une seconde. Trop nombreux. Trop durs en affaire. 

 

Définitivement trop casse-couilles quand, dans la nuit, ils viennent se coller à tes hanches en t'appelant Môman de leurs voix aigrelettes. Ou sur le point de muer.

Définitivement trop casse-couilles quand, dans la nuit, tu sens leurs petites bites pleines de smegma embrasser l'arrière de ton pyjama propre comme un sou neuf.

 

Et définitivement trop casse-couilles quand, dans la nuit, ils se mettent à frotter vigoureusement une charogne de rat pleine de puces...

 

 

... Contre ton vagin qui sent bon la framboise.

 

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J'ai lu @Red !

 

Je ne sais pas par quoi commencer tant ton œuvre est singulière. Déjà, contrairement à ce que l'on fait presque tous dans cette section, tu fais du Seinen pur et dur. On se retrouve dans un univers post-apocalyptique. J'avais vu plusieurs de tes interventions sur les mangas et je remarque que c'est ton style préféré.

 

J'imagine donc forcément que tu sais à peu près ce que je vais te dire. Moi, je trouve que tu écris super bien. En ce moment je lis de plus en plus d’œuvres d'amateurs, et je vois que tu écris parfaitement. Il n'y aucune faute d'ortho. Tu as un vocabulaire énorme. Soit tu lis énormément, soit tu es un écrivain depuis belle lurette. En tout cas c'est parfait. Donc on n'a rien à te reprocher là-dessus.

 

Cependant, je pense que là où les gens pourraient être troublés ce n'est pas dans ton histoire... En fait c'est ton style qui chamboule l'esprit. Ton style est hyper marqué par l'art de la réflexion et de la métaphore. Tu es hyper descriptif, tes tournures de phrases sont géniales et on sent que tu peux décrire tout et n'importe quoi. Mais justement, on a l'impression que tout est dans ta tête. Toi tu le visualises, tu le couches sur papier, mais nous on est un peu exclus parce qu'on voit pas forcément de quoi tu parles. Ton style est très personnel et se repose sur ta seule vision des choses. Donc nous on doit faire un gros effort pour se faire à ta vision, en plus de la notre. C'est mon plus gros problème parce que souvent, on a l'impression de stagner dans le récit. Pour reprendre l'exemple de @Swarl, on avance, on freine brusquement, et on a du mal à repartir, la machine galère un peu. Du coup on a énormément d'informations descriptives, mais peu sur le récit. Je pense que l'emploi du présent y est pour beaucoup.

 

J'ai fait du RP, et j'ai lu certaines œuvres avec des styles comme le tien. Je ne te demande pas de le changer, ça ne servirait à rien. On adhère ou pas. On s'adapte, ou pas. Par contre, j'aimerais vraiment en avoir plus sur l'histoire car je suis dans le flou. Je ne sais pas vers quoi nous allons tendre, vers l'action ou non... Bon, j'ai quand même réussi à distinguer quelques personnages susceptibles d’être les héros.

Le second chapitre sur les courses et les paris, c'était cool. En plus tu as commencé à parler de certaines choses comme des gens du Chaos, qui semblent avoir quelques privilèges. On peut s'attendre à un monde avec des disparités sociales.

 

Voilà tout ce que j'ai à dire sur la forme. Maintenant je me concentrerai sur l'histoire. En définitive, tu es fort, mais tu es aussi très mystérieux.  Mais bon franchement, un seinen, je crache pas dessus. je veux voir ça.  ;D

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Haha.

J'aime bien cette comparaison avec le seinen. Comme quoi, y a des étiquettes qui vous collent à la peau. Mais ça ne me dérange pas outre mesure. C'est même plutôt gratifiant.

 

Merci pour cette critique en tout cas.

Je savais que le style (et peut-être aussi un peu l'histoire, ne nous le cachons pas) allait être un frein pour une grande partie des lecteurs. Mais ces chroniques sont avant tout un immense bac à sable pour moi. Un champ d'exploration littéraire. J'y vais les pieds dans le plat, en lançant ce qu'il me passe par l'esprit (comme tu l'as si bien décrit). On en est tout d'même pas à de l'écriture automatique mais pas bien loin pour selon.

La seule et unique limite que je m'impose, c'est de ne pas rester dans le traditionnel écrit romancé et codifié. En cela je m'inspire beaucoup de quelques auteurs comme Norman Spinrad, les frères Strougatski, Arthur C. Clarke et Ray Bradbury.

Il y aura certainement beaucoup d'autres chapitres un peu nébulaire pour vous, mais même si vous vous sentez perdu dans le récit, dites vous que les personnages le sont aussi. Ca rajoute aussi à l'immersion. Et si il existe une ligne directrice pour l'histoire en sous-main, il n'y a pas encore de grand plan pré-établi pour tout mes personnages.

 

Je tenais à ce concept de chroniques.

Ces dernières permettent de poser un récit déstructuré, et dont il est en même temps facile de suivre la chronologie.

Les personnages sont pour la plupart des spectateurs de l'histoire. Ils n'y auront pas tous une influence (même modeste). Certains ne servent même qu'à décrire la société dans laquelle ils évoluent. J'y trouve plus d'intérêt qu'un simple narrateur omniscient qui te délivre tout les codes sans le moindre effort. Tout passe par l'immersion, et rien de mieux pour cela qu'un bonne dose de mystère (et d'utlra réalisme).

 

Après, je ne suis pas totalement satisfait de tout ce que j'ai pu coucher sur cette histoire. Certaines accroches maladroites notamment. possible que j'y revienne dans quelques temps. Mais en attendant, je conserve cette ligne de conduite d'écriture viscérale. Et on verra bien où cela nous mène.

 

Pour ce qui est de mon expérience dans le domaine littéraire... C'est surtout du RP. Toujours dans un cadre post-apo.

J'hésitais depuis longtemps à poster sur ce forum. Je voyais mes histoires faire un peu tâche au milieu de ces scenarii mangas.

Mais bon, c'était idiot comme réflexion et j'ai sauté le pas.

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Encore un peu de poésie.

 

Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Tu es nouveau en ville

 

 

District nord du Chaos Urbain de BelleFond. Début de l'automne.

Il est trois heures du matin, dans les rues adjacentes et désertes du bien nommé bar à radasses le "Wipe & Out". Il pleut. 

 

Mignonne. Mignonne petite clocharde.

 

Dodue ? Pas vraiment. 

Charnue ? On ne peut pas dire.

Plantureuse ? Hé quoi, c'est rien qu'une gosse.

Développée ? Misère.

 

Autant aller se frotter la nouille dans l'orbite du crâne d'une tombe anonyme.

 

Mais tu sais, gamine: ils ne crient jamais, les os des cimetières. 

Et ils ne pleurent que des vers de terre.

 

Mignonne. Mignonne petite clocharde.

 

Juvénile ? Celle-là ? Pour sûr. 

Allez-quoi. Sept ans. L'âge dur. Ou l'âge con. Je ne sais plus très bien. Con. Dur. Con. Dur. Con. Dur. 

 

Mignonne. Mignonne petite clocharde. 

 

Que fais tu là, toute seule, à cette heure-ci ?

Tes parents sont partis faire dodo et toi tu joues les filles de l'air ? 

Le bon gros dodo de papa et maman.

Le bon gros dodo du cimetière ?

Peut être que tu avais même un petit chien, avant. 

J'en aurai presque la larme à l'oeil, s'il n'y avait pas déjà toute cette eau pour rafraîchir mon visage.

 

Mignonne. Mignonne petite clocharde. 

 

A te trimballer sur le petit boulevard désert. Sous les pâles lampadaires souvent en grève.

A te trimballer sur le petit boulevard désert.

Avec ton petit caddie pour enfant. Ton tout petit caddie pour enfant.

Avec son petit fanion rouge tout déchiré et maculé de gadoue. Son tout petit fanion rouge. Il n'est pas très bien dressé.

 

Mignonne. Mignonne petite clocharde.

 

Je vois bien que tu m'as senti, derrière ton petit dos nerveux. Derrière tes petites épaules fébriles. Je vois bien et je vais te dire: ça me plaît. Oui, ça me plaît particulièrement, de voir tes petites fesses osseuses s'activer crescendo. Tes petites fesses osseuses, moulées dans ton petit maillot de bain une pièce ridicule. Arc-en-ciel, avec ça.

Tu nargues le temps et la météo. Tu es merveilleuse de poésie sans le savoir.

 

Je les devine aussi, tes petits tétons pointés. Tes petits tétons perlés de l'humidité du vrai ciel, derrière la barrière de ton faux arc-en-ciel. Oui. Je vois bien que tu m'as senti, quand tes petites guiboles toutes écorchées commencent à suivre un pas quasi-militaire. Tu t'en vas en guerre, sans baïonnette ?

 

Mignonne. Mignonne petite clocharde.

 

J'apprécie ton insolence. Le détachement que tu essayes de me signifier, alors que je commence à siffloter. Ton petit détachement. Ta petite insolence. Avec ce petit index qui va dans ta petite narine, alors que tu accélères toujours. Alors que tu accélères, à fond les manettes, sous la pluie. Tes petits pieds tout nus et tout noirs de crasse. Même sous la pluie. Alors que tu accélères, et que tu bifurques subitement à droite, en dérapage contrôlé, sur le trottoir luisant et crépitant... 

 

... ça m'a tout l'air plus étroit. Et plus sombre encore.

Ta tentative de fuite annonce de plus en plus notre intimité.

 

...

 

Le Smith & Wesson .38 Chiefs Special fracasse la tempe de la morveuse qui vient de mordre jusqu'au sang la main aimante. A la jonction du pouce et de l'index. Là où on peut bien crocher dans la parcelle d'épiderme plus élastique. Cette main aimante qui vient pourtant de caresser tendrement le côté droit de son visage anguleux, avant de palper le dur petit menton d'un coup d'ongle cajoleur. 

 

La violence du coup de flingue fait dévier la gosse sur la gauche, après un roulement d'orbites vert trinitite brumeux. Elle se prend chaotiquement les genoux dans l'armature de son caddie, la poitrine plate un peu renversée sur la poignée de poussée.

La main aimante lui agrippe par derrière sa tignasse brouillonne, plaquée à l'eau et au sébum, pour redresser son buste. Un coup de genou dans le ventre l'oblige à se plier en deux, tandis qu'un uppercut renforcé à l'acier du canon lui élance le crâne vers l'arrière. 

 

L'homme en imperméable vert poubelle danse alors avec la silhouette osseuse et arc-en-ciel, vers le mur droit, là où les briques semblent faire dégorger l'humidité ambiante. Le bout du nez frondeur épouse violemment l'une d'entre elles.

Une fois. Deux fois. Trois fois. Mariage arrangé au couscous de morve, et anosmie temporaire.

On entend quelque chose craquer, sur ce visage anguleux, alors que deux filets de sang noirâtre s'échappent des narines frémissantes. Une pâte informe de pluie et d'hémoglobine donne de la substance au philtrum.

 

La main aimante passe des cheveux rebelles au tour de cou. Crispe tous les doigts puissants dessus. Une artère carotide saille quand ils entrainent la gamine vers l'avant, pour écorcher son dos contre la grille de cinq mètres de haut, au maillage fin d'acier inoxydable, qui forme un cul-de-sac passager. 

 

Le canon soulève légèrement la lèvre supérieure. Dévoile un peu l'intérieur de la bouche, en roulant maintenant contre la pulpe de la lèvre inférieure. Une petite incisive manquante. Deux canines branlantes. La souris ou la fée ne passeront jamais. La souris crevée au phosphure de zinc. La fée aux ailes arrachées à la pince-tenaille.

 

Les yeux du petit ange des poubelles commencent à se révulser. Pas de larmes. Juste de la pluie. 

La main aimante quitte la nuque et les pulsations du muscle constricteur pour donner quelques claques amicales sur les joues. Tapoter les pommettes par croquignolets jeux de phalanges coquines. Puis donner un gros coup de poing au niveau de l'arcade sourcilière, tout en brusquant la pression de la deuxième main aimante sur la crosse.

 

Pour aliéner la langue de l'enfant. Et lui racler le palais. Et, surtout. Surtout. Pas de mots. Aucune parole. On n'est pas dans une foutue comédie musicale.

 

...

 

Pan.

 

Une étincelle de mille claque-doigts. Un feu unique de cent pétards mammouth. Une gerbe qui annonce son lot de chinoiseries. Il fait soleil l'espace d'un instant.

 

Pan. C'est vraiment parti tout seul. 

 

Pan. Comme ça.

 

Pan.

 

Juste après le zboum, en fait.

Le zboum, alors que l'homme à l'imperméable était tout juste accroupi, surplombant de sa malingre trique le cul du petit ange arc-en-ciel qui, lui, est affalé contre le trottoir pas tout à fait lavé de ses péchés d'ordures. Même s'il pleut à grosses gouttes. Et oui, c'est très crade, par ici. Et ça le restera. District Nord. La mythologie du déluge, rien à battre, franchement.

 

Le petit ange arc-en-ciel affalé dans les mares naissantes aux canards boiteux, avec son philtrum barbouillé de confiote aux fraises. 

 

Le zboum. Alors que la main aimante écartait tout juste une parcelle du maillot des fesses, pour faire apparaître l'insolence cintrée et fendue de la petite pêche imberbe, où roulent quelques gouttes d'eau de pluie. 

 

Et un peu de pisse.

 

Mais voilà. Il y a eu le zboum. Suivi du pan.

 

Un ballon de foot surgonflé qui percute ton occiput après un violent coup de pied arrêté, tu n'imagines peut être pas...

 

... mais ça fait quand même très mal. Zboum. 

 

Ça surprend, surtout. Ça surprend tellement que la main aimante de l'homme à l'imperméable grippe la gâchette et l'actionne involontairement. Pan. En direction du bitume. Au delà de la grille qui forme un cul de sac passager. A peine un mètre après la tête du petit ange arc-en-ciel. Le petit ange arc-en-ciel qui commence tout juste à ramper vers la droite, ou ce qui y ressemble, alors que l'homme à l'imperméable perd l'équilibre et se vautre de tout son long sur ses petites guiboles écorchées.

 

Le petit ange arc-en-ciel et son regard vert trinitite au bord de l'inconscience, qui rampe péniblement vers la droite, à la force de ses petits bras. Qui rampe, en rigolant. En rigolant, sous son philtrum tout barbouillé de gadoue à la framboise. Qui rampe, en toussant. En toussant, la gorge éprise de grotesques élancements. La nausée qui rigole.

La commissure des lèvres maquillée par le trop-plein peu ragoûtant de ce sale bitume où les pigeons obèses vident leurs écoutilles nuit et jour. Ce sale bitume qui chlingue la crotte de bâtard. Qui rampe, en s'étouffant presque. En s'étouffant de la glace au parfum sang-pluie-morve-bitume. La glace au parfum malabar. Le vieux bout de chewing-gum qui a traîné pendant un an sous ta semelle, et qui ressemble à une infime chiure de pneu mazouté. 

 

Le petit ange arc-en-ciel rigole, dans le cul-de-sac tout étroit et humide, parce qu'une vingtaine d'autres petits anges furibards commencent à s'entasser sur le corps de l'homme à l'imperméable vert poubelle. 

 

Et encore, il y a la queue, au portillon. Tout le long de la fichue ruelle. Des vagues informes et épileptiques de membres chétifs mais bandés à morts. Des montagnes de crachats, de croûtes purulentes et de boutons d'acné. Avec des cutters, des clous. Des crampons. Du fil barbelé et de la crème à raser. Des marteaux.

 

Tu les sens forcément, si tu tiens le rôle de l'homme à imperméable. 

 

Oui, tu la sens forcément passer, la crème à raser qui s'enfonce dans ton oesophage, encombrant le conduit alimentaire jusqu'à bloquer mécaniquement tes voies respiratoires, alors que du vomi remonte et se mêle à la mousse. 

Oui, tu le sens forcément passer, le fil barbelé qui encercle ton cou et te cisaille la pomme d'Adam.

Oui, tu les sens forcément passer, les lames de cutter qui t'enflamment la raie des fesses et le dessous des couilles.

Oui, tu les sens forcément passer, les crampons et les clous, qui s'enfoncent dans tes mains aimantes, et font dériver ton arme vers d'autres mains aimantes, en modèle réduit.

Oui, tu les sens forcément passer, les manches de marteaux...

 

Et, tu sais. Même tout au fond de ton cerveau en panne. Tu sais forcément, alors qu'on t'enfonce un majeur recouvert de caca dans la prunelle de ton oeil. Tu sais forcément, alors que ce n'est pas que de la pluie qui dégoutte de ton imperméable vert poubelle, mais des litres d'urine.

Tu sais. Tu sais que tu vas finir dans le petit caddie. Des parcelles de toi dans le petit caddie. Des petits toi dans le petit caddie. Le petit caddie, avec son petit fanion rouge.

 

Son tout petit fanion rouge.

 

Il n'est pas très bien dressé...

 

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Tu disais que tu voulais revenir sur certaines accroches et phrases. Je pense que pour le premier et second chapitre, tu pourrais. Mais pour ceux qui suivent, je pense pas parce que ça passe assez crème. J'ai lu ça assez vite, bien plus vite que prévu. Le narratif était plus cool, limpide, malgré le présent. J'ai lu les trois qui ont suivi, à savoir l'histoire d'Ivy, le poème sur Neil et elle ainsi que la partie sur les enfants de Bellefond.

 

J'ai trouvé l'histoire d'Ivy bonne, bien servie. Je pense que c'est en partie grace au personnage et le point de vue direct qu'on a. Nous voyons tout avec les yeux d'Ivy, on est directement dedans et dans l'empathie. Et il y a de quoi, entre une mère malade ( HIV atteint par MST ou non, tu laisses dans le doute ), et un père violent et tortionnaire, elle en a bavé cette petite. Heureusement, il y avait Neil, mais on se demande si ses séjours dans la pièce aux poupées ne l'auraient pas rendu folle.

Surtout qu'à la fin du chapitre, nous sommes dans le flou sur la mort de ses parents. Maladie ou meurtre ? Un inconnu ou Ivy ?

 

Le poème était dans la forme assez fou. Je pense aux métaphores que tu as trouvé pour décrire le ciel en utilisant le sucre pour les étoiles, le café pour la nuit etc.

Mais sur le fond, on voit ce dont tu parles depuis le début. Les orphelins de Bellefond sont clairement à l'abandon. Ici tu montres qu'Ivy n'a plus que Neil, Neil n'a plus qu'Ivy, et qu'ils en bavent. La faim, la maladie, le danger du monde, tout ça les tuent mais ils n'ont plus qu'eux.

 

Sur la suite, tu reviens sur les orphelins de Bellefond et le manque de compassion des gens envers ces enfants. Ils devraient être rééduqués, ce qui prend énormément de temps et d'argent. Donc personne n'en veut, personne ne veut s'occuper d'eux, ce sont des parias. Cela ressemble au traitement des enfants orphelins où je viens, on les traite de la même manière. Du coup, ça fait écho avec ce que j'ai pu voir de mes propres yeux. C'est très réaliste.

 

J'aime ça dans la SF et l'anticipation. Montrer vers quoi une société peut tendre, en regardant sur le présent.

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Dans les faits, j'ai l'idée de travailler sur des destins croisés. Avec une chronique centrée sur un personnage à chaque fois. Tout mes différents personnages n'ayant finalement que peu d'interactions (sinon aucune) entre eux.

Chacun apportant une vision très différente de l'univers dans lequel ils évoluent.

 

Dans le cas d'Ivy, c'est évidemment une vision d'enfant.

La confrontation d'une certaine forme d'innocence avec la violence de BelleFond.

Les autres personnages n'auront pas la même approche. Et j'essayerais d'adapter le style d'écriture en fonction de cela.

 

J'ai déja laissé quelques miettes laissant suggérer qui seront les prochains personnages.

Et l'intrigue principale n'a pour l'instant été qu'effleurer. Ivy me sert surtout à décrire le paysage post-apocalyptique de BelleFond. Ca me semblait important de commencer par ça.

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Parenthèse-Anticipation

 

 

La pièce est noire. Les murs sont noirs. La porte est noire. Sans poignée intérieure. 

 

Dans le coin gauche, ou le coin droit, de la chambre noire de 15m², il y a un lit d'adulte noir. Les couvertures noires. Au carré. A l'opposé, il y a un évier noir. Et un bidet noir, juste à côté. Un peu plus loin, un chiotte noir. Du papier toilette noir. Une brosse à dent noire, dans une tasse noire. Un tube de dentifrice noir. Une serviette et un gant de toilette noirs. Un carré de savon noir, dans une coquille Saint-Jacques noire.

Au centre, une table de bois noir. Une chaise noire. Des crayons noirs. Une lampe noire, qui diffuse un peu de jaune, dessus une feuille blanche. Un long questionnaire noir, sur la feuille blanche. Des côtés de carrés noirs avec du blanc au milieu. Souvent, des gribouillis de lettres, dessus des pointillés noirs.

 

Ce n'est vraiment pas évident, tu ne trouves pas ?

 

- « Recommence. »

 

Une grande ombre noire, tout en cagoule et en coton noir, surplombe une maigre gamine blanche, dix ans peut être, vêtue, elle, d'une simple blouse. Comme à l'hôpital. Mais ici, la blouse est noire.

La feuille blanche est chiffonnée par l'ombre noire. Une boule blanche de papier, dans des gants de cuir noir. La boule blanche est lancée contre le visage anguleux de l'enfant, maintenant cramoisi.

 

Du vert trinitite qui danse dans des orbites perdues, dessus des cernes violettes.

 

- « Mé je sé pa écrir'. Fichu kon. »

 

L'ombre noire qui ricane froidement. D'une voix robotique. Asexuée. Inhumaine.

 

- « Justement. »

 

L'ombre noire replace une feuille blanche sur le bureau noir. Bien alignée. Perpendiculaire et parallèle avec tous les côtés noirs.

 

La gamine en blouse noire s'avance vers l'ombre noire, soudain hargneuse. Le nez froncé, les narines fébriles, avec, dans sa petite pogne toute blanche, propre, un peu couturée, un stylo noir.

 

Un gros coup de ranger noire lui fend sa blouse noire, au niveau du nombril, avant même que la pointe du stylo noir n'atteigne le coton noir. Le souffle coupé, la gamine se voit partir en arrière, et son occiput blanc, son petit crâne blanc intégralement rasé, donne un joli baiser blanc au sol noir.

 

- « Recommence. »

 

Cinq jours que le grand lit noir au carré n'a pas été défait. L'enfant dort sur le sol noir. Recroquevillée. Son pouce blanc dans la bouche rouge. Mais l'enfant ne dort que d'un oeil. Les jambes agitées. Le vert trinitite souvent figé sur la table en bois noir.

 

- « Recommence. »

 

- « Mé Je Sé Pa lir Trou Duk'. »

 

- « Tu sais. »

 

Grognements hostiles.

 

- « Les panneaux routiers. Les devantures des magasins. Les journaux et les papiers gras. Ta Game-Boy. Tu sais lire et écrire. »

 

Se moucher dans des doigts blancs, et étaler la morve orange sur la blouse noire.

 

- « Tu sais. »

 

- « Ou Hé Nil Bordel ?! »

 

- « Recommence. »

 

- « Je crèv'la dal put1 denkulé! »

 

- « Essaye-encore. »

 

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Parenthèse-Anticipation II

 

 

La première fois que tu entres en transe, ça fait un drôle d'effet. Tu y restes plusieurs jours, crois moi. Peut être même toute la vie.

 

Quand tu fais l'amour dans le noir, ça n'a vraiment plus rien à voir, après ça. En réalité, ça n'arrive qu'une fois par mois, à n'importe quel moment. Oh, n'importe quel moment, ou une fois par mois. Quand tu es en permission, je veux dire. Ou en formation.

 

On a toujours le choix, avant d'avoir le droit. Sache juste que ça, c'est toi qui décide. Tu l'as bien mérité, en quelque sorte. Ce n'est vraiment pas évident, tu ne trouves pas ?

 

D'abord, tu as le droit à vingt coups de barres à mine dans ton ventre, ton dos, tes jambes et tes flancs, alors que tu dors tranquillement dans ton lit noir, vêtue d'une ample chemise noire et d'une petite culotte noire. Ensuite, quand tu as le temps de rouvrir tes paupières brûlantes de larmes transparentes, pour ne rien observer de plus que des ombres noires qui dansent dans le noir, on t'enfonce un bâillon noir dans la bouche rouge, et on pose sur tes yeux vert trinitite quelque chose qui te fait voir plus noir que le noir.

 

Mais sache que si tu as peur du noir, il y a toujours quelques étoiles, dans le noir. Là, derrière tes paupières. Tu ne pourrais pas trop dire de quelles couleurs elles peuvent bien être.

 

Au bout d'un moment, ce ne sont plus les simples petites étoiles que tu observes avant d'aller te coucher. Tu finis toujours par imaginer un autre paysage, crois moi. A donner corps au trou noir. De la verdure, en général. Sinon tu deviens fou-fou-fou. Comme les enfants de la décharge. Petikonarva.

 

Oh, je dis ça, mais là, c'est seulement si tu n'as pas l'honneur d'avoir un bon coup de bombe lacrymogène dans la gueule. Au cas où tu aurais entendu les ombres. Au cas où tu ne dormais pas. Et que tu aurais commencé à te rebiffer avant même que la première batte n'atteigne tes côtes. Parce que là, avec le gaz lacrymogène, crois moi, tu t'en fous un peu, des étoiles.

 

Ensuite, généralement, on pose un casque noir sur ton crâne blanc. Puis tu sens ton corps meurtri et bleu se faire soulever. On t'entraîne vaille que vaille, même si tu n'y mets pas de la bonne volonté. 

Au bout de quelques séances, tu as appris à marcher en cadence avec les ombres. Tu danses presque comme elle. Oui, sur le chemin vers le labyrinthe noir, tu danses presque comme les ombres et les ombres apprécient. Avec elle. Elles n'ont même pas besoin de te donner un coup de pied noir au cul noir pour que tu entres dans le labyrinthe noir. Tu y vas en chantant et en sifflotant arc-en-ciel. Derrière ton bâillon noir.

 

On t'enlève le casque noir et le bâillon noir et le noir de tes yeux vert trinitite plus noir que le noir, on te pousse dans le noir, et tu entends la lourde porte noire se refermer dans le noir.

 

Je te préviens, n'essaye pas de repartir par là. Tu le regretteras. Tout ce que tu as à faire, c'est avancer dans le noir. Tu y trouvera simplement d'autres ombres noires. Comme toi. Et sache qu'elles ont beau être noires dans le noir, comme toi. Tu apprends très vite qu'elles n'ont pas toute la même couleur.

Et dans le noir, il y a ce genre de musique, qui couvre tout, en boucle.

 

Elle baise avec lui, le fait gonfler puis accoucher. C'est sa langue. Ou son sexe. Ou ses doigts. Ou son spermatozoïde gagnant. Tu te fais pénétrer en beauté, parce que tu es noire. En fait, c'est de l'autoreproduction.

 

Tu dois simplement trouver la sortie. Certains couloirs sont très étroits. En fait, ils sont tous très étroits. Ne t'inquiètes pas si tu n'y arrives pas au bout de 24 heures. Tu peux très bien y arriver en dix minutes.

 

On appelle ça: contrôler ses émotions. 

On appelle ça: faire corps avec son environnement. 

On appelle ça: reconnaître les siens.

On appelle ça: sérénité. 

On appelle ça: unité.

 

Et, crois moi, quand tu finis par former une ligne d'ombres noires reliées entre elles par des mains blanches perdues, tu peux affirmer que c'est ça, l'amour.

 

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Partie I

Les Gentils-Méchants Enfants

 

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Parenthèse-Anticipation III

 

 

Deux ombres noires ont refermé la porte derrière une gamine squelettique en blouse noire.

 

Dix ans peut-être. Elle roule des yeux verts trinitite. Partout. Se gratte nerveusement les tempes, les joues, ainsi que le menton de sa tête blanche toute rasée. Se gratte nerveusement les avants-bras, bourrés de petites écorchures croûteuses sur le point de cicatriser. Reste près de la porte, en s'agitant sur elle même, ainsi. N'avance pas dans la pièce.

 

Ici, la lumière est. D'une lampe en oeuf d'autruche, avec un abat-jour plein d'arabesques, et de fichus machins bordeaux en entrelacs. On y trouve un beau bureau boisé imprégné de tabac encadré par des tableaux marines qu'elle regarde à peine.

 

Un homme assez âgé, soixante-cinq ans peut être, trapu, rasé de près, ses quelques maigres cheveux gris et blancs plaqués à l'arrière de son crâne, de fines lunettes rectangulaires au bout de son nez rond, fume une cigarette sans filtre en se massant parfois la tempe droite du bout du majeur, et feuillète, de l'autre main, un classeur noir rempli de fiches multicolores, sensiblement aussi gros qu'un volume d'encyclopédie classique.

Il y a aussi une carafe à spiritueux emplie d'un liquide ambré. Un verre en cristal taillé. Un lecteur de vinyl, sur une commode, derrière. Et toutes ces conneries. Fichukon.

 

La môme le fusille du regard, quand celui-ci ne rebondit pas frénétiquement sur une salopri de bergère. Ou une mappemonde alakon. Ou un cadre toupouri et une foto en noir et blanc, avec un fichukon de mec en costume ridicule, qui roule une putain de pelle à sa fichukonne de blondasse, blondasse dans un costume encore plus ridicule.

 

Comme si qu'on était obligé de se prendre en photo chaque fois qu'on s'embrasse. Putain de putain de fichukon. Des copies de copies d'actions. Des souvenirs qui ressemblent à des glaçons. Compactes au début. A chaud, un peu froids. Puis, de plus en plus liquides. Quand il n'y a plus qu'une flaque tiède, c'est en général là qu'on a le lac brûlant des yeux qui déborde.

Comme si qu'on était obligé de conserver une photo qui ne mouille même pas et qui ne sent pas la salive ou la transpiration ou quoi. C'est même pas nous qui devrions pleurer au final je crois. C'est les gens sur la foto.

Ça ferait, avec Neil, treize ans et demi, quelque chose comme cinq cent trente-quatre photos le lundi, qui seront toutes racornies d'humidité dans vingt-cinq ans. Trois cent deux le mardi. Huit cent quatre-vingt-dix-sept le mercredi. Et ainsi de suite.

Je vous raconte pas combien ça ferait de clones d'Aïvi et Nil qui chialent en souriant, depuis leurs yeux en carton ou papier glacé, jusqu'à leurs pulpes en noir et blanc ou haute résolution, avec éclair de flash sur grain de beauté, zoom intégral sur perle de muqueuse, panorama d'éclat d'amour mineur figé, et tout le tralala qui fera de vous une flaque tiède qui ne sent même pas la salive.

 

La fumée débaroule des narines du vieux chnok. Puis ses petites lèvres sévères s'entrouvrent, pour transpercer les volutes d'une voix chaude et grasse.

 

- « Bonjour Ivy. »

 

L'autre, celle que le nom indique, elle tourne vivement la tête ailleurs. Direction la porte. Et son être malingre émet quelque chose qui ressemble à des borborygmes de mécontentement. 

 

- « Mon nom est Général. Il y a différentes façons de m'appeler Général. Pour toi ce sera Général. Comme toi tu t'appelles Ivy. »

 

L'autre, elle se contente de maugréer dans sa barbiche inexistante. 

Le vieux chnok s'éprend d'un sourire en coin, et les rides de ses joues forment une panse d'accordéon. Il appuie le bout de son index contre un endroit du classeur.

 

- « Je lis ici: à leurs arrivée, 1-B, après le repas en commun, dont le déroulement effarant est détaillé en 1-D, après le nettoyage, 1-G, la désinfection, 1-H, et les soins, 1-I, la séparation l'a rendue hors d'elle, incontrôlable. Elle semble s'être néanmoins contenue jusqu'à un moment précis, voir 1-L, pour déclencher sa fureur. Exactement comme si elle attendait...blablabla.... Elle a surement jugé que les engagés...blablabla... La petite, sans hurler, mais plutôt en émettant de lourds grognements agressifs, s'est jetée sur le bureau dès qu'elles se sont installées, puis s'est acharnée contre la tête et les cheveux de Mlle Flemming, avant que celle-ci n'arrive à s'extirper avec beaucoup de difficulté de la situation. Elle continuait toujours de briser avec acharnement les lunettes de Flemming sous son talon quand l'engagé...blablabla... »

 

- « … »

 

- « On voit bien là un rapport rédigé d'une plume trop sensible. »

 

La petite citée, elle se racle la gorge bruyamment. Elle n'arrête toujours pas de se gratter nerveusement le visage et les bras.

Le vieux chnok écrase sa cigarette sans filtre. En reprend aussitôt une autre, dans son étui en cuir à la poche poitrine de sa chemise kaki. Craque une allumette et l'allume. Encore des bouffées qui débaroulent du nez. Avant que la main libre tourne quelques fiches multicolores, puis appuie à nouveau son index.

 

- « Je lis ici: ce n'est qu'au bout du dixième transport dans une pièce identique qu'elle s'est arrêtée soudainement dans son oeuvre de saccage systématique. Elle n'était pas calmée pour autant, ni épuisée d'ailleurs. Elle a continué de nous couvrir d'injures et tenté de nous frapper chaque fois, mais elle ne touchait plus à rien dans la pièce. Chaque fois que nous entrions, tout était exactement à sa place. Elle ne s'asseyait pas sur la chaise ou le lit. La plupart du temps, elle nous attendait près de la porte pour nous surprendre. Les échecs répétés de ses assauts, autant verbales que physiques, s'espacèrent de plus en plus. Quand nous nous sommes mis à parler pour la première fois, la violence a repris de l'ampleur, mais, là encore, elle s'est peu à peu dominée quand elle a constaté que ses gestes étaient vains. »

 

Le lutin rasé continue de bougonner. Le vieux chnok poursuit, après un temps de silence, coupé tantôt par une dégustation appuyée de l'alcool. Troisième cigarette. La voix devient de plus en plus grasse.

 

- « Je lis ici: si elle refuse catégoriquement le confort de couchage disponible, elle n'a jamais tenté de nuire à la salubrité de son environnement direct. Elle fait ses besoins aux toilettes. Le seul fait notable de nuisance par les excréments a été dirigé exclusivement contre nous, rf. 5-G. »

 

- « … »

 

- « Où est-ce que les soins sont détaillés, Ivy ? »

 

Aïvi, elle fait franchement la gueule, de dos. Elle grince entre ses dents quelque chose qui ressemble à un maigre "Vatfèr".

 

- « Allez allez... Tu ne peux t'en prendre qu'à toi après tout. Si tu n'avais pas agressé la psychologue, si tu y avais mis un peu plus de bonne volonté tout le long des tests... Mais enfin... Maintenant, ce n'est qu'une question de minutes pour le retrouver. On te l'a déjà dit. Je pense que tu es trop excitée pour pouvoir discuter. N'est-ce pas ? »

 

Le vieux chnok regarde les aiguilles de l'horloge. Le sale regard en coin de la morveuse rebondit du visage âgé jusqu'à ces mêmes aiguilles.

 

- « Disons vingt-cinq minutes et trente-six secondes. Trente-deux. Trente. »

 

- « Gnumpf.... Grumpf... Humpf.... 1-I... »

 

- « Pardon Ivy ? »

 

- « Jé di 1-I. »

 

- « Pourrais-tu dire pourquoi tu as retenu cette information insignifiante ? »

 

- « Kesk'jen sai fichu kon. 1-I cé tou. »

 

- « Tu es une petite fille sans aucune trace d'imagination sensible. Contrairement à ton copain. Veux-tu que je te montre ses dessins, et les tiens ? »

 

- « 8 s'conde... »

 

- « Sais-tu pourquoi tu as fait des représentations quasi-exactes de quelques objets ou images que tu connais déjà, avec une grande précision d'ailleurs, au lieu de faire un dessin plus...personnel, disons ? »

 

- « 52 s'conde. »

 

- « Neil a dessiné des espèces de monstres bleus entourés d'arbres oranges. Toi, tu as croqué ta Game-Boy sous tous les angles, les éléments qui la constituent. Neil a dessiné d'énormes chiens et de toutes petites maisons au milieu d'un fouillis d'éclairs et de nuages. Toi, tu as croqué un revolver. Tu as même dessiné une balle adéquate pour ce revolver à côté, avec un respect d'échelle presque parfait, sans avoir autre chose que des crayons à disposition. Quand Neil dessine un avion de chasse sous l'eau qui mitraille des poissons et des voitures, tu reproduis un certain Ouroboros que tu as dû voir sur un mur ou tatoué sur quelqu'un. Aux écailles près. »

 

- « Vintroa s'conde. »

 

- « Bien qu'analphabète, il est capable de raconter une histoire imaginaire à l'oral. La seule chose que tu aies faite à l'écrit, après quelques règles et vérifications élémentaires, pour ta rédaction d'une histoire imaginaire, c'est raconter ta journée dans les moindres détails. Ce qui fait à peu près quatre lignes... Quatre lignes que tu ratures toi même parce que ce n'est pas imaginaire. Tu as commencé à te mettre en colère toute seule, au bout de deux minutes, devant la feuille. Et tu n'as pas voulu raconter une histoire oralement. »

 

- « 7 s'conde. »

 

Quatrième cigarette.

 

- « Après de brèves explications, exemples, et instructions écrites, tu es capable de réussir parfaitement des exercices de mathématiques d'un niveau incroyable pour ton âge et ton expérience, quand Neil sait tout juste compter sur ses doigts. »

 

- « 41 s'conde. »

 

- « On a lu une poésie à Neil. Puis on lui a demandé s'il aimait simplement ça. Il a répondu Oui. Toi, non seulement on t'en a lu une, mais on t'en a fait lire plusieurs. Tu as coché la case Non. Et quand on t'a demandé pourquoi, tu as dit que tu t'en "fichais pas mal". Et tu as rajouté quelque chose d'étonnant. »

 

- « 19 s'conde. »

 

- « Tu as dit que n'importe quel abruti peut écrire des conneries. Tu as dit que les lettres et les mots étaient des choses moches. Qu'on ne devrait pas mettre le nom des auteurs, et plutôt remplacer par: n'importe qui. Et tu as dit que si tu voulais faire un métier précis, plus grande: ce serait remplacer les mots par ce qu'ils sont réellement: des nombres. Pourrais-tu m'en dire plus sur cette drôle d'idée ? »

 

- « 27 s'conde. »

 

 

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Abrakakadoi! Voyage dans l'temps.

Fini les conneries.

 

Partie II

Les Gentils-Méchants Enfants II

 

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La Flaque Tiède

 

 

District Nord du Chaos Urbain de BelleFond. Le « Wipe & Out ».

Autre époque. Saison indéterminée.

7 ans + 26. Orage magnétique.

 

- « YEP ! C'KITFODRA CHÉRI ?! »

 

- « J'SUIS PAS TA CHÉRIE ! »

 

- « RELAAAAAAAAAAX BÉBÉ ! »

 

- « UN THÉ ! »

 

L'escogriffe, derrière le comptoir, glousse.

 

Les néons bleu-gyrophare, au dessus des pistes d'exhibition, déversent parfois sur sa trogne maladive quelques ronds lunaires, au sein de la simili-pénombre violée par quelques loupiotes ocres. 

Les inclinaisons de son crâne agité font tinter quelques clochettes, accrochées au bout de ses dreadlocks rousses. Un tocsin de petit tambourin, étouffé par la sono tonitruante.

 

Dans une des backrooms, des mains gantées de plastique rose enduisent de vaseline un bâton lumineux vert fluo, long de trente-deux centimètres.

 

- « WOOOCH ! UN T ! EXTRA ! ET 'VEK ÇA COMBIEN D'SUSUKRE PUSSYCAT ?!  UNE LARMICHOUILLE D'LAIT D'LA ZONMAI P'TÊTRE ?! DES P'TITS BISCUITS AUSSI ?! »

 

Son sourire déjà large comme un ravin s'étire en une mimique de Cheshire, sous ses pupilles dilatées.

Son front est lardé de rides jaunâtres avant l'heure. Il se frotte le bout de la langue contre la pointe de sa canine, plombée de petites tâches brunes.

 

- « UN SODA ALORS ! N'IMPORTE QUOI SANS ALCOOL ! »

 

Le barman danse d'un pied sur l'autre. Joue avec le piercing qui barre son téton, du côté où son t-shirt blanc est déchiré.

 

- « HEIN ? »

 

La femme est assez imposante. Dans les un mètre quatre-vingts. Ses cheveux sont empaquetés dans un bandana noir. Elle porte un ample sweat-shirt à capuche, de la même couleur. Au dessus de la poche kangourou, une tête de mort en sérigraphie, composée de minuscules 0 et de 1. Des croix rouges au sein des orbites creuses.  Un treillis banal mais usé jusqu'à la corde lui recouvre ses longues guiboles. Rangers aux pieds. Son teint est cadavérique. Les cernes comme des douves. Tous les pores de sa peau fondent dans une sueur abondante. Son menton et ses tempes sont blindés d'une acné bien enflammée. Elle se tient raide comme un piquet, les bras dans le prolongement du corps.

 

- « J'AI PAS UN ROND ! »

 

- « KESTUDI ? »

 

- « J'AI PAS UN ROND ! »

 

- « RÉPÈTE UN PEU POUR VOIR ? »

 

- « TU M'RECONNAIS PAS ? »

 

- « ... »

 

- « C'EST MOI ! IVY ! »

 

- « HEIN ?! »

 

- « IVY ! QUAND ON ÉTAIT GO... »

 

Le dreadeux plonge subitement sa main grêlée de bagues phosphorescentes sous le zinc.

 

- « J'TE SITUES PAS L'CORBAC ! TU COMMENCES A FAIRE CHIER ! TIRE-TOI OU... »

 

- « ET TOI C'EST FRED ! »

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « HAAAAAAAN !! L'AUTISTE ! QU'EST-C'TU VIENS BRANLER AU CHAOS ? 'FAIT UNE PAYE! »

 

Grimace gênée.

Haussement d'épaules.

 

Deux nouveaux clients aussi élégants que le reste se penchent au dessus du comptoir et font l'accolade au rouquin. Ils observent une seconde la femme d'un air mauvais, avant de partir vers d'autres horizons. Frotter les poils de leurs narines dans la raie des fesses d'une mama de 130 kilos.

 

- « AHAHAHAH ! ÇA ALORS ! L'AUTISTE ! BORDEL QU'EST-C'TU VEUX ? »

 

- « J'CHERCHE DU BOULOT ! »

 

- « HEIN ? »

 

- « J'DIS J'CHERCHE DU TAF ! »

 

- « ICI ? »

 

- « BEN... »

 

- « AHAHAHAH ! 'LORS MONTRE TES NIB' POUR VOIR L'AUTISTE ! »

 

- « PAS C'GENRE DE... »

 

- « HEY ! LA VAMPIRELLA DU COUVENT ! OHEEE ! RÉVEILLE-TOI ! T'ES FRACASSE OU BIEN ? »

 

- « NAN JE... »

 

Le rouquin quitte le face à face en ricanant. 

Il secoue sa tignasse de droite à gauche, dans une démarche martiale saccadée. 

S'arrête sous l'écran géant à un coin du bar, qui diffuse en accéléré une compilation amateur d'éjaculations faciales. Mime une session de surf, en équilibre précaire sur ses moon-boots rose bonbon. Puis imite une masturbation devant son slim qui lui compresse le paquet, avant d'éclater d'un rire tonitruant. Il finit par sortir du carré pro, en sautillant comme un diablotin. Et avance vers la grande gigue, le visage soudain extrêmement sérieux. Il fouille dans ses cheveux. Puis tend un petit cachet rond à Ivy, au creux de sa paume.

 

- « ENTRETIEN D'EMBAUCHE ! MAINTENANT ! »

 

Moment de flottement. Le dos de Violet se raidit. Les mâchoires se bandent. Les yeux vert trinitite dansent la gigue. Paumés.

 

Le dénommé Fred attrape violemment une des manches du sweat-shirt noir. Vide.

 

- « BEN MERDE ALORS ! KESTAFICHU D'TON AUTRE MAIN ? UN TRIP COMME ÇA, ÇA VAUT D'L'OR ! FAIS PÉTER L'MOIGNON SALOPE ! »

 

 

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Après tout, aux chiottes le narratif.

 

Partie II

Les Gentils-Méchants Enfants II

 

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La Flaque Tiède II

 

 

Lieu indéterminé.

 

- « Ca c'est sûr. Beau cv. Mais sans main, pas d'argent. Sans argent, pas de main. »

 

- « ... Mais là... là, ça indique que vous cherchez une institutrice.  je peux faire ça... »

 

- « Regardez la tête que vous avez. Votre présence. Vous êtes au croisement du pitbull et du zombie. C'est pas la racaille que l'on éduque pour ce poste là. Ce sont nos fils et nos filles. Vous n'êtes plus dans votre caserne. Et votre tenue. On dirait que vous vous apprêtez à commettre un attentat. Sans compter que la main... Et puis le tatouage sur l'autre. Soit vous allez les terroriser, soit ils vont se moquer.  Il leur faut quelqu'un de non seulement présentable, mais aussi quelqu'un de charmant. Vous voyez ? Parfum, tailleur, peau lisse, lumineuse et maquillée. Beau cul belle gueule. Pas de tatouage avec des crânes ou je-ne-sais-quoi. Et un cerveau. Surement moins imposant que le vôtre. Certes. Mais. On ne demande pas la lune. Et hors de question de vous faire crédit. Je veux du tout cuit. Une autre femme est sur le point de prendre le poste. ...non. Vraiment, ça coince. J'en suis navré, croyez-moi. »

 

- « ... mais... »

 

- « Si vous ne voulez pas finir à la rue, il ne vous reste plus que les affaires du District Nord, pour mourir d'infection, d'overdose, ou de coups et blessures dans les six mois. Ou alors on en revient à ma première proposition. Plus raisonnable, plus sécur'. Avec un autre entretien, dès demain matin. Je ne vois que ça. Autrement je ne peux vraiment pas vous aider. Toutes les places sont déjà prises. »

 

- « ... non... hors de question de faire la pute ou du porno... »

 

- « ... Tentez votre chance dans les grandes fermes ou les autres villes libres. Mais à mon humble avis, le problème restera le même. »

 

- « Bon et bien... merci de m'avoir accor... »

 

- « Attendez. »

 

- « ... »

 

- « J'ai une affaire à double tranchant. Pour moi et pour vous. Mais plutôt pour moi. Vous... vous n'avez plus grand chose à perdre. N'est-ce-pas ? »

 

- « ... »

 

- « Vous avez le profil. Quelque chose de très spécial. Avec... Beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent à la clef. De quoi vous payer une merveille, pour votre avant-bras. Et de vivre à l'aise au Chaos, sans devoir travailler. Rien de sexuel. Assez rapide. Qui ne nécessite pas la pleine possession de ses membres. »

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « ... à double tranchant ? »

 

- « Le fric ou la mort. »

 

- « ... »

 

- « Vous allez la provoquer en duel. »

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « Comment ça...?! »

 

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Et non, ce n'est pas du théâtre.

 

Partie II

Les Gentils-Méchants Enfants II

 

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La Flaque Tiède III

 

 

Même lieu. Toujours indéterminé.

 

- « Voilà votre part.»

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « Impressionnant, n'est-ce-pas ? »

 

- « ... »

 

- « Mais enfin... »

 

- « ... »

 

- « Dîtes quelque chose bon sang ! Vous allez bien ? »

 

- « ... »

 

- « Écoutez, prenez l'argent et partez... C'est fini. Hop là. Merci de votre collaboration. Ce fut un plaisir de faire des affaires avec vous. »

 

- « ... »

 

- « Madame Violet ? »

 

- « ... »

 

- « Écoutez, je...je vais... »

 

- « Je veux recommencer. »

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « Pardon ? »

 

- « ... »

 

- « ... »

 

- « J'ai dit. Je. Veux. Re. Co. Men. Cer. Recommencer. »

 

- « Mais enfin...voyons… c'est complètement dingue... vous a... »

 

- « Je veux recommencer. »

 

- « ... Prenez la mallette et sortez. Sortez maintenant ! Pour l'amour du ciel. Vous... »

 

- « Je veux recommencer. C'est quand le prochain ? »

 

- « Mais... Bon. Une petite seconde... »

 

- « ... »

 

- « Robards ? Oui... Madame Vi... »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « J'VEUX RECOMMENCER ‘TAIN ! T'ENTENDS ENKULÉ ?! HMPF ! J'VEUX RECOMMENCER ! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « ARGH... ARGLLllBlf... »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « ALLO ! ALLO ?! HUMPF ! T'ENTENDS ENKULÉ ?! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « JE ! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « VEUX ! »

-

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « RE ! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « CO ! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « MEN ! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

- « CER ! »

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

*Grognements gutturaux d'origine féminine.*

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment un crâne d'homo sapiens.*

 

*Grognements gutturaux d'origine féminine.*

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment quelque chose qui devrait ressembler à un crâne d'homo sapiens.*

 

*Hurlement rauque d'origine féminine.*

 

*Bruit d'un combiné téléphonique qui percute violemment quelque chose qui devait ressembler à un crâne d'homo sapiens.*

 

 

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Partie II

Les Gentils-Méchants Enfants II

 

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La Flaque Tiède IV

 

 

A l'arrière d'un taxi.

 

- « Le but, quand même... »

 

Tu possèdes un lagon. Mais tu fais des yeux de merlan frit.

 

- « C'est d'faire le show. Si vous voyez c'que j'veux dire... Là... »

 

La brillantine qui dégorge des tempes de ce type te rappelle que tu as ciré tes rangers pendant trois heures, vingt sept minutes et trois secondes, hier soir.

 

- « Un surnom. Une tenue qui pète. Z'avez d'jà vu Death Race 2000 ? J'vous vois bien du genre Frankenstein version girl power à la mord-moi-l'noeud. Mais en moins ringard. Voyez l'genre. Un p'tit r'looking des familles. Hein. Parce que bon... Voyez vot' genre... »

 

Lorsque tu as donné le coup de brosse numéro 11 183, une perle rouge a dégringolé d'une de tes cavités nasales. Tu t'es évanoui, et ton front a embrassé ton sang, le cuir, et la graisse de baleine.

 

- « Z'avez ça ? Des fringues qui claquent ? Moi j'peux vous en dégotter. Mais c'est pas gratos. »

 

Peu après ton réveil, les lèvres collées au journal hebdomadaire qui date déjà d'une semaine, tu as craché un glaire rougeâtre sur la page des "disparitions inquiétantes".

 

- « Faut bien penser qu'ça peut être votre dernière représentation sur cette foutue planète. S'rait dommage de crever habillée comme une cas'o's. J'veux pas dire qu'vos fringues font cas'o's... ça non... mais ouais. Quand même. Voyez l'genre. Et puis... Bordel m'zelle... C'est la fin du monde. Voyez c'que j'veux dire. Ok, ça dure. C'est p'tête bien la fin du monde d'puis qu'on est né. L'spectateur s'endort un peu. C'pour ça qu'on organise, c'pour ça qu'on est dans l'coup. Faut l'réveiller à coup d'matraque électrique, si vous voyez c'que j'veux dire... »

 

- « … »

 

- « Une p'tite ligne, ça vous dit ? C'est bibi qui régale.. » 

 

Sans bouger d'un poil, tu as lu en diagonale l'interview de la semaine -dernière-. La photographie représente un enfant rouquin, criblé de tâches de rousseurs, habillé d'un pull-over mauve. Il prétend, en se mettant à notre niveau d'imagination, que la terre n'est qu'un minuscule organe, et que cet organe présente une sorte de cancer. Il prétend être une sorte de caméra médicale. Il prétend avoir passé deux mois à expertiser la terre, en vue de mener à bien sa vidange. Il a fourni aux journalistes un calendrier des catastrophes à venir. Ce n'est que le calendrier des pompiers du Queens, daté de 1982.

 

- « Nan ? Bon... sniiiiiiiifrrrr.... aaah... S'agit pas d'déconner plein tube non plus. Y'aura des points rouges sur votre tête, si vous voyez c'que j'veux dire, mam'zelle. Faudra pas s'mettre à foutre le bordel. Faut respecter l'protocole. »

 

La roue avant-droite du véhicule encrasse quelques mots oubliés sur le bitume.

 

- « Vous savez qui c'étaient les nazis ? Des genres d'sado-maso. J'vous vois bien en officier nazi. Ouais. Avec un gros décolleté. Et un machin genre bras d'fer... j'sais pas où qu'on va dégotter ça tiens... Ouais... Iron Maiden...ouais...ahah...ou Fräulein truc si on veut faire allemand... dans c'goût là... sniiiiiiiifrrrr... ahem... ouep... teinte en blonde vous s'rez bien trash... hein... sauf votre respect. Voyez c'que j'veux dire. »

 

Depuis quelques temps, tu découpes et noircis des pans de journaux, et tu y trouves, chaque fois, au moins un message codé.

 

Au feu rouge, la chauffeuse arrête brutalement le radio cassette, et sort un pétard de sa boîte à gants. Et, alors qu'elle arme son jouet en zyeutant nerveusement les junkies à la ronde, tu n'entends que le bruit effréné de sa mastication de bubble-gum.

 

Ton reflet dans la vitre se brouille à grandes eaux.

 

- « Hé, vous saignez du nez m'zelle... z'avez pourtant rien foutu d'dans... »

 

- « J'suis pas m'zelle. »

 

Le feu passe au vert. La taxi driver démarre en trombe. La montgolfière de malabar éclate, pour conclure la musique mécanique du levier de vitesse et des pédales. Sa main gauche gantée de mitaine jaune tient à peine le volant, alors que son semi-automatique s'appuie tranquillement dessus, étreint d'une poigne de fer. 

 

Sa main droite passe violemment la seconde, puis déclenche à nouveau le radiocassette, d'une pression de l'index, à l'ongle maculé de vernis jaune.

 

Tu remarques que cette main, elle, n'est pas couverte de mitaine. Tu remarques que les ongles de l'autre main ne sont pas couverts de vernis. Tu penses à ta main gauche absente, et tu sens à nouveau le sang battre dans cet espace vide. Tu te demandes alors si elle possède des cheveux, sous sa chapka jaune, et tu ne penses pas une seconde qu'en levant le coude et en dépliant ton articulation, sa nuque pourrait sentir ton membre fantôme lui glacer les prémices de sa colonne vertébrale. De toute façon, il y a justement une glace de séparation.

 

- « L'truc aussi, c'est qu'vous soyez hyper vigilante niveau spectateurs. Ces cons là ont beau être tenus en laisse... voyez c'que j'veux dire... béh… »

 

Quand tu remarques qu'elle te mire méchamment dans le rétroviseur, sous ses paupières fardées de paillettes jaunes, tu détournes tes yeux vaseux, et tu les noies à nouveau dans ton visage évanescent, virtuellement giflé par la neige du dehors.

 

- « ... y'en a toujours un pour devenir taré... ouais... pigez l'délire... les mouches sont attirées par la merde... j'veux pas dire qu'vous êtes une merde hein... au contraire même... une future superstar ouais... p'tête bien ouais... sniiiiirrffrr...  hem... hem... han putain... mais tout ce spectacle qui sent la mort... forcément hein... ouais... voyez c'que j'veux dire... »

 

- « On va pas assez vite. La musique est trop forte. J'aime pas cette musique… ça fait vingt minutes qu'on écoute ce genre de merdes en boucle. »

 

- « Hé... Zou... t'peux mettre moins fort ? Pour la m'zelle. Ca lui casse les oreilles... Et moi ça commence à m'casser les couilles sévère aussi. Tu vois c'que j'veux dire. »

 

- « J'suis pas m'zelle. »

 

La fille qui conduit, tu te rends compte, en quittant la vision de ta propre image sur laquelle tu crachais de la buée, qu'elle ne doit pas avoir plus de quatorze ans, sous son maquillage. Son soupir s'allonge dans une explosion de bulle rose contre sa langue, alors qu'elle éjecte la cassette et la balance sur le tableau de bord. Pour en reprendre aussitôt une autre à la volée, et la fourrer dans la fente noire. Ses mandibules ondoient en cadence avec la boîte à rythme.

A travers le hublot, sans se retourner, elle vous octroie un doigt d'honneur pétillant d'insolence. Sa montre Maya l'Abeille indique :

 

- « ... sniiiirfff… »

 

Sept heures et demie du matin, sur la Terre. Le ciel est bleu électrique. Ou gris. Tu ne sais plus très bien.

 

- « ... han... ah ouais putain... z'êtes sûr qu'on s'arrête pas à la droguerie... z'avez l'air bizarre... »

 

- « C'est rien. Juste les restes du coma. »

 

 

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Replonger dans l'univers de Bellefond demande d'avoir les nerfs solides... J'ai lu jusqu'à l'anticipation numéro II. Mais comme d'hab, j'ai beaucoup de choses à dire.

 

Tout d'abord, je ne peux que te féliciter et surtout te poser une question... Comment tu as fait ?

Sur la première partie du chapitre je me suis demandé comment tu as pu entrer dans la tête d'un monstre comme l'homme à l'imperméable. Les mots ont été appliqué avec une telle justesse que j'ai été immédiatement saisi. J'ai ressenti du débout lors que j'ai lu, et beaucoup d’anxiété pour la petite fille qu'il poursuivait. Franchement, c'était parfait. Effroyablement parfait.

 

La seconde partie, quand tu as repris la narration à la troisième personne, était bonne grâce à ce que tu avais introduit. Il y avait longtemps que je n'avais pas été perturbé comme ça. J'ai énormément d'histoires sombres dans mon esprit, et jamais je ne pourrai les écrire comme tu le fais. J'ai eu peur, j'ai eu de la colère et à la fin, une satisfaction pour le sort qui lui a été réservé. 

 

Cependant, dans la seconde partie, je me suis un peu perdu dans le récit car j'ai cru que tu faisais une immense parabole. J'avais dans l'esprit que le canon et la bouche étaient des images pour symboliser le viol. Mais plus en avançait, plus j'ai pris cela au pied de la lettre. Finalement, là, je suis dans le doute. Et c'est  ce dont j'avais parlé dans mes premiers commentaires. Ton style très imagé est difficile à percevoir parfois. Sinon au point de vue de l'écriture, aucun reproche. Même si à certaines phrases, j'ai senti que tu as lutté pour trouver les mots adéquats et les expressions adéquates. T'en as chié pour l'écrire ce chapitre.

 

Pour les Anticipations, chapeau pour l'utilisation du mot noir. Tu as eu l'intelligence de faire quelque chose de court pour ne pas blaser le lecteur. On est toujours dans le mystère et on est toujours perdu. Cependant, contrairement à tes premiers chapitres, où on galérait pour savoir où tu voulais en venir, ici les personnages sont installés. On revoit Ivy et on voit que le mystère est volontaire de ta part. La confirmation vient avec l'Anticipation II, toujours aussi glauque. Mais malgré ce noir mystère, on veut toujours savoir sans faire preuve d'impatience.

 

Au niveau de l'histoire, on commence à avoir un début de synopsis et de la vie dans ce Bellefond grâce aux personnages. Déjà, quel plaisir de voir que les enfants de Bellefond sont aussi solidaires entre eux. Ils sont presque une communauté à part dans ce monde, prêts à tout pour survivre. J'aimerais les voir dans quelques années. Du coté d'Ivy, cette dernière a été enlevée, comme d'autres enfants dans ce monde en noir. Neil est porté disparu, mais comment le retrouver avec toutes ces ombres qui ne peuvent se voir ?

 

Bref ! Enfin ton histoire démarre @Red ! C'est du bon ! 

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Replonger dans l'univers de Bellefond demande d'avoir les nerfs solides... J'ai lu jusqu'à l'anticipation numéro II. Mais comme d'hab, j'ai beaucoup de choses à dire.

 

Tout d'abord, je ne peux que te féliciter [...]

 

Si tu me voyais. Je suis rouge comme une pivoine :P

 

[...] et surtout te poser une question... Comment tu as fait ?

Sur la première partie du chapitre je me suis demandé comment tu as pu entrer dans la tête d'un monstre comme l'homme à l'imperméable. Les mots ont été appliqué avec une telle justesse que j'ai été immédiatement saisi. J'ai ressenti du débout lors que j'ai lu, et beaucoup d’anxiété pour la petite fille qu'il poursuivait. Franchement, c'était parfait. Effroyablement parfait.

 

La seconde partie, quand tu as repris la narration à la troisième personne, était bonne grâce à ce que tu avais introduit. Il y avait longtemps que je n'avais pas été perturbé comme ça. J'ai énormément d'histoires sombres dans mon esprit, et jamais je ne pourrai les écrire comme tu le fais. J'ai eu peur, j'ai eu de la colère et à la fin, une satisfaction pour le sort qui lui a été réservé. 

 

Cependant, dans la seconde partie, je me suis un peu perdu dans le récit car j'ai cru que tu faisais une immense parabole. J'avais dans l'esprit que le canon et la bouche étaient des images pour symboliser le viol. Mais plus en avançait, plus j'ai pris cela au pied de la lettre. Finalement, là, je suis dans le doute. Et c'est  ce dont j'avais parlé dans mes premiers commentaires. Ton style très imagé est difficile à percevoir parfois. Sinon au point de vue de l'écriture, aucun reproche. Même si à certaines phrases, j'ai senti que tu as lutté pour trouver les mots adéquats et les expressions adéquates. T'en as chié pour l'écrire ce chapitre.

 

Content d'avoir réussi mon coup, mais j'étais plutôt satisfait dans l'ensemble.

Parce que en toute honnêteté, ça n'a pas été le chapitre le plus dur à écrire pour moi.

Les Parenthèses-Anticipations m'ont demandé bien plus de travail. Beaucoup plus de travail.

 

En tout cas, dans ce registre. Celui qui tente de se mettre dans la tête d'un sociopathe, James Ellroy a été une énorme influence. Notamment avec son roman Un tueur sur la route.

Je n'irais pas jusqu'à dire que j'ai singé son style, mais un peu quand même. On ne peut pas vraiment renier ses maitres.

 

Pour les Anticipations, chapeau pour l'utilisation du mot noir. Tu as eu l'intelligence de faire quelque chose de court pour ne pas blaser le lecteur. On est toujours dans le mystère et on est toujours perdu. Cependant, contrairement à tes premiers chapitres, où on galérait pour savoir où tu voulais en venir, ici les personnages sont installés. On revoit Ivy et on voit que le mystère est volontaire de ta part. La confirmation vient avec l'Anticipation II, toujours aussi glauque. Mais malgré ce noir mystère, on veut toujours savoir sans faire preuve d'impatience.

 

Mystère. Le mot ne convient pas vraiment. Perdu(e) est plus juste.

L'idée, c'est surtout d'amener le lecteur à voir les choses comme Ivy. Et cette pauvre petite n'a pour elle que des suppositions. Et des coups de bâtons.

 

Le background est volontairement nébuleux. La raison en est simple : les gosses de BelleFond n'en ont strictement rien a carrer de l'histoire et de la "politique" qui règne ici-bas. Ce sont des marginaux. Et leur monde est proprement anarchique. ils ne connaissent pas les règles du jeu et se contrefoutent bien de les apprendre.

Et quand les deux mondes se confrontent, on se retrouve avec un blanc. Une parenthèse. Et tout ce qu'il reste à faire, c'est d'anticiper la suite des événements. C'est toujours une question de survie.

 

Au niveau de l'histoire, on commence à avoir un début de synopsis et de la vie dans ce Bellefond grâce aux personnages. Déjà, quel plaisir de voir que les enfants de Bellefond sont aussi solidaires entre eux. Ils sont presque une communauté à part dans ce monde, prêts à tout pour survivre. J'aimerais les voir dans quelques années. Du coté d'Ivy, cette dernière a été enlevée, comme d'autres enfants dans ce monde en noir. Neil est porté disparu, mais comment le retrouver avec toutes ces ombres qui ne peuvent se voir ?

 

Coming Soon :P

 

Bref ! Enfin ton histoire démarre @Red ! C'est du bon !

 

Merci pour ce commentaire en tout cas ;)

Ca me conforte dans certaines de mes idées. Reste plus qu'à poursuivre tout ça.

 

Encore un petit chapitre à venir d'ici la fin de semaine, et après je prendrais une légère pause.

J'ai besoin de faire quelques recherches assez techniques. Pas trop envie de balancer des inepties.

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  • 2 weeks later...

Des chapitres de dialogues oui, mais pas que... C'est assez fort. Je vais expliquer pourquoi.

 

Parce qu'en un chapitre, l'Anticipation III a énormément fait avancer les choses alors qu'il y a peu de description et beaucoup de dialogues. Et ce chapitre est tout bonnement génial. Je m'étais arrêté avant, je ne l'avais pas lu du coup mon bonheur en le lisant a été géant. Pourquoi ? Parce que tu as réussi à faire du slow burn dans cette Anticipation.

 

Déjà tu as arrêté avec le mot noir, on assistait à la fin de cette répétition (ce qui me laisse penser que j'aurais du lire les trois Anticipation d'un coup). Pour avoir fait beaucoup d'exercices de style à l'époque, je sais que tu en as bavé pour réussir à bien utiliser ce mot. Et l'effet est qu'à la lecture ça ne se ressent pas car on saisit le rythme et on est dedans donc c'est réussi.

 

Ensuite, l'apparition du Général était bonne car il montre qu'il est très intéressé par les enfants de Bellefond. Pourquoi ? Ça tu ne nous le révèles pas encore. Mais ce n'est pas le plus important. Car tu te focalises directement sur Ivy. Et c'est là que je te félicite parce que ce personnage que je trouvais déjà fort dans les flashback l'est encore plus dans ce chapitre.

 

Déjà dans l'Anticipation I, on montrait qu'elle avait un instinct, un véritable instinct. Dans les Flashback, on voyait qu'elle connaissait très bien son monde. Mais on ne se doutait pas de la surprise de fin de l'Anticipation III. Au départ, on pense qu'Ivy est sauvage, puis au fil du rapport, on apprend qu'elle saisit très bien les choses. Et quand elle a dit "1-I" j'ai compris ! Et quand elle a enchainé avec le décompte, j'ai juste eu un putain de sourire parce que cette fille est géniale en plus d’être attachante. Finalement, Ivy a un Q.I très élevé et c'est ce qui a séduit le général. Chapeau !

 

Tu as enchainé avec une ellipse de sept ans. Là on se retrouve un peu comme au départ de la fiction. On est encore dans le flou mais la lumière arrivera vite. L’évolution d'Ivy est assez plaisante, j'attends de voir ce qui va lui arriver. Dans quel genre de business elle s'est lancée ? Qu'a-t-elle fait avec le Général ? L'intrigue commence vraiment à naitre. Tu disais que lorsque les enfants et adultes se rencontraient il y avait un blanc. Du coup, cet ellipse pourrait faire du bien à l'histoire. C'est du bon quoi. Voilà...  :D

 

 

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